Résumé de la 2e partie Ils vont se poursuivre pendant plusieurs jours, dormant et mangeant peu, plein de rage et de fatigue. Avançant toujours, le Danois voit un fusil abandonné à quelques pas du corps. Puis, de nouveau, Olsen s?arrête. Son regard vient de saisir quelque chose de vivant, les yeux de l?Allemand qui l?observe. Tuer cet homme ? Et après ? Après, se coucher, dormir enfin près du cadavre, ou parler, mais tout seul. Olsen laisse glisser son sac et ramasse le fusil. L?Allemand le laisse faire. Il a quarante ans, un visage dur, la peau affreuse, à la fois desséchée et striée de crevasses où la chair est à nu. Le Danois, pétrifié de n?avoir pas tiré, réalise qu?il est maintenant trop tard. Il fallait le tuer tout de suite ou jamais. «Vous êtes mon prisonnier.» Celui-ci grimace un sourire, et le Danois le secoue : «Levez-vous ! Vous allez geler sur place. ? Fichez-moi la paix !» L?Allemand a répondu dans un souffle et les deux hommes se regardent en silence. Olsen, pour relever cet homme vaincu qui ne souhaite plus que la mort, glisse ses mains sous ses épaules. l?Allemand est officier météorologiste. Il s?appelle Schraeder. Le Danois fait l?inventaire des vivres et objets contenus dans son sac, c?est-à-dire très peu de choses. Alors l?Allemand ricane : «Avec ce que nous avons comme vivres et le chemin qu?il faut faire pour rejoindre la côte, à deux, nous ne nous en tirerons pas. ? Si. ? Non. Vous, ou moi, peut-être, mais pas nous deux.» Olsen hausse les épaules : «Vous devez être livré aux autorités danoises. ? Soit. Mais je n?ai plus de sac de couchage. ? Nous coucherons tous les deux dans le même sac.» Serrés dans le même sac, par moins trente, ils vont passer leur première nuit. L?Allemand est assommé de fatigue, mais le Danois, qui se méfie, reste éveillé. Le prisonnier, désarmé, accablé par le froid, la faim et le désespoir, semble peu dangereux. Pourtant, Olsen n?a pas confiance et l?inquiétude le tient dans une veille épuisante. C?est un soleil resplendissant qui éclaire au matin suivant le groupe minuscule des deux hommes perdus sur l?Inlandsis où rien ne bouge, sauf le blizzard faisant courir au ras du sol une neige poudreuse où se joue la lumière. «Je vous préviens, a dit le Danois, il faudra marcher droit. Moi, je veux vivre.» Le prisonnier, qui se tient plusieurs pas devant Olsen, s?est retourné subitement après quelques heures d?une avance harassante. «Hier, dit-il, vous aviez le droit de me supprimer et de vous emparer de mes vivres pour sauver votre peau. Aujourd?hui, je suis votre prisonnier, me tuer serait un crime. Si vous devez le commettre, faites-le tout de suite.» Quelques heures plus tard, l?Allemand se retourne de nouveau : «L?homme qui était avec vous, je l?ai blessé ? ? Il est mort.» Plus tard, le Danois considère gravement une photo puis la tend à l?Allemand : «Vous voulez le voir ? ? Qui ? ? L?Esquimau que vous avez tué?» L?Allemand prend la photo et la regarde : «Il n?avait pas l?air intelligent.» Olsen arrache la photo : «Salaud ! Pourquoi dites-vous ça ? ? Vous n?aviez qu?à ne pas me la montrer. A ma place, vous l?auriez tué aussi. Vous êtes aussi fou que moi.» Mais le soir, le Danois, qui découpait à coups de hache un morceau de poisson séché, se retourne et, brutalement, interroge son prisonnier : «Qu?est-ce que vous mangez ? l?Allemand pâlit : ? Vous ne croyez pas que j?en ai volé ? ? Si ! Crachez !» Comme l?Allemand refuse, le Danois serre les doigts sur la crosse du revolver. Il essaie de lire la vérité sur le visage du prisonnier. «Je vous donne dix secondes pour cracher ! dit Olsen. Un? deux? trois?» Mais le fusil, par malheur, est resté chargé et l?Allemand l?a saisi. (à suivre...)