Secours n C'est en recourant à la vente de m'hadjebs qu'une mère de famille – composée de 6 personnes – a pu survivre durant neuf mois et échapper à la mendicité. Certains travailleurs ont la chance d'avoir des épouses actives qui les ont aidés à surmonter, un tant soit peu, le calvaire des neuf mois sans salaire. Mais d'autres ont été contraints d'opter pour le système D afin d'assurer leur survie. C'est le cas d'un employé de l'entreprise nationale de textile (Enaditex) qui a pu gagner sa vie durant toute cette période grâce à la précieuse contribution de son épouse. «C'est elle qui a fait vivre la famille depuis le mois de juin 2008. Elle préparait les m'hadjebs que je vendais aux commerçants de différents quartiers… et c'est grâce à cela que nous sommes restés en vie», témoigne Mahmoud – appelons-le ainsi puisqu'il ne veut pas être reconnu par ses collègues – la cinquantaine. «Au début de la crise, enchaîne-t-il, j'allais prendre la décision de quitter définitivement l'entreprise et 'opter pour des travaux de chantiers, mais ma femme m'a convaincu d'y rester, au moins pour assurer une retraite.» Une épouse responsable et courageuse qui se lève quotidiennement à six heures du matin, prépare le petit déjeuner et… met les mains «dans la pâte». «A 7h 30, une bonne quantité de m'hadjebs est déjà prête. Je la distribue aux commerçants pour 15 DA l'unité. Je ne gagnais pas beaucoup, vu la cherté de la semoule, la tomate et l'huile. Mais nous avons survécu», renchérit-il, reconnaissant envers son épouse. Toute la journée, son épouse ne cesse de préparer les m'hadjebs et une fois une bonne quantité prête, elle envoie les enfants qui se chargent de les vendrer. Le soir aussi, lorsque Mahmoud rentre du travail, il trouve une autre quantité. «Heureusement que beaucoup de gens apprécient ce produit. La demande ne cesse d'augmenter, mais j'ai peur pour la santé de mon épouse qui commence à avoir des maux de dos. C'est une vraie battante. En sus des travaux ménagers et l'éducation de nos quatre enfants, elle fait vivre toute une famille», affirme encore ce malheureux employé. Comment a-t-il pu faire face aux besoins de la famille durant le ramadan, la rentrée scolaire, les deux fêtes de l'Aïd ? Notre interlocuteur qualifie ces rendez-vous à fortes dépenses de «catastrophes». Durant le ramadan, les m'hadjebs ne se vendaient pas et il était alors contraint de vendre du tabac la nuit pour gagner quelques sous lui permettant d'acheter du pain et les ingrédients pour préparer la chorba. Pour la rentrée scolaire, il a emprunté de l'argent – toujours pas remboursé – aux voisins. Vu la situation financière fragile de cette famille, Mahmoud n'a pas pu faire le sacrifice à l'Aïd el-Adha. «Mes enfants se sont contentés d'observer la célébration de ce rite. Je me suis senti inutile. J'ai subi une grande humiliation ce jour-là», se désole-t-il. Mahmoud n'est qu'un exemple du calvaire vécu par des centaines d'employés. Même si les histoires diffèrent, le «châtiment» infligé à ces travailleurs reste le même….