Avec l'entrée de notre pays dans le système libéral, l'ouverture de nos marchés à la concurrence et au crédit, des milliers d'Algériens n'ont pas hésité à s'engouffrer aujourd'hui dans le créneau des facilités bancaires. Rien ou presque n'est plus payé cash comme cela se faisait auparavant. Les temps ont bien changé. Exit l'époque où l'on économisait pendant des mois pour se payer un téléviseur couleur. Pour acquérir la chambre de ses rêves, celle de sa nuit de noces, des années de privation étaient nécessaires et bien souvent la fiancée mettait la main à la poche. Quant à l'achat d'une voiture, on n'y pensait même pas, elle était hors de prix pour nos bourses. Ne pouvaient posséder un véhicule que les gens fortunés ou qui avaient su amasser sou après sou pour se permettre, en fin de carrière, un tel luxe. Aujourd'hui, quel que soit son salaire, un travailleur moyen peut accéder à toutes ces commodités en un temps record, il lui suffit, pour cela, de constituer un dossier de crédit auprès d'une banque et le tour est joué. Regardez autour de vous, voyez le nombre de véhicules neufs actuellement en circulation, vous ne pouvez pas stationner, vous ne pouvez pas vous arrêter. Il n'y a plus d'heure de pointe, toutes les heures le sont. Il y a des bouchons partout. Voyager en bus s'avère finalement plus pratique. Sans vouloir faire de jeux de mots stupides, mais pendant ce temps, le compteur des intérêts tourne à la banque. Les premiers moments de griserie passés, on se rend vite compte que les dettes doivent être honorées chaque mois et ce, pendant cinq ans, intérêts apparemment non compris. Et, bien sûr, pendant cinq ans, il faut faire avec, c'est-à-dire se priver, faire attention à la moindre dépense, surtout quand elle n'est pas nécessaire. Et lorsqu'il n'offre pas son cou à la corde du prêt pour la voiture, le travailleur lambda le tend à la corde du prêt pour l'habitat. Indépendamment de ces commodités dont on se passerait difficilement et qui restent nécessaires, des jeunes, sans aucune expérience n'ayant que leur fougue et leurs bras valides, sont «tombés», eux aussi, dans la même nasse des crédits bancaires. Les prêts Ansej ne sont apparemment pas faciles à éponger, surtout quand le projet n'aboutit pas. Des agriculteurs, des milliers d'agriculteurs ont contracté pour augmenter leur rendement des crédits substantiels qu'ils n'arrivent pas à honorer… jusqu'à ces dernières semaines où l'Etat s'est engagé à les effacer. D'autres corporations sont dans la même situation et à l'évidence nous n'avons pas encore acquis la gestion rationnelle du crédit. Et c'est toute une culture…