Nasser Hannachi Souvent évoquée dans les cercles officiels depuis que les grands projets structurants ont été inscrits dans le cadre du Plan de développement local, la modernisation de la ville de Constantine ne s'est pas encore concrétisée sur le terrain ni donné une idée, même en pointillés, du visage que la ville aura à terme. Les façades détériorées se ressemblent et les panoramas sont parfois «brisés» par des constructions qui ne s'intègrent pas et ne s'harmonisent pas avec le cachet architectural environnant de la Cité millénaire. Le cadre de vie et l'environnement direct dans lesquels le citoyen évolue sont loin de disposer des éléments élémentaires d'esthétique qui, pourtant, aujourd'hui, sont intégrés dans les normes universelles d'aménagement et/ou de réalisation urbanistique. La nouvelle ville Ali-Mendjeli est l'exemple éloquent d'une urbanisation non réfléchie et lancée dans l'urgence de bâtir. On a construit sans trop se soucier de l'apparence finale, des touches de verdures, de l'esthétique du mobilier urbain, en quelques mots comme en mille, de l'introduction de l'art dans l'urbanisation. Et le coup est parti ! Le ministère de l'Aménagement en est conscient. Avant de passer à l'Industrie, Amara Benyounès avait dressé un tableau noir sur cette nouvelle ville aux contours hétéroclites. «Cette maquette devra servir de mauvais exemple aux cités programmées dans le futur», avait-il asséné alors. Le plan d'urgence de remodelage a été arrêté il y a plus d'une année avec un budget préétabli. C'est l'argument avancé, mais qui ne justifie aucunement cette laideur urbanistique. «La problématique des habitations précaires fausse toute initiative d'harmonisation du bâti et d'esthétisme, alors que la modernisation et la sauvegarde du cachet architectural originel en sont grandement tributaires», explique un architecte local. Cette situation est en train d'imposer une révision des plans esquissés. Le constat fait, les pouvoirs publics relancent, et à l'échelle nationale, la nécessité d'agrémenter le cadre de vie et l'ornementation des sites urbains qui doivent avoir une apparence moins agressive. Il s'agit donc d'éviter ces métamorphoses ternes et inadaptées, sans goût ni beauté, qu'on voit dans quasiment la plupart des cités en banlieue et dans la ville. Constantine devra batailler dur pour recouvrer sa beauté urbanistique. C'est le vœu, voire l'impératif, si on entend redonner à cette troisième ville du pays son lustre d'antan. Les diverses administrations qui se sont succédé à la tête de la wilaya ne sont pas parvenues à équilibrer une équation, insurmontable, délicate : reloger, éradiquer les bidonvilles et se pencher en parallèle sur l'aspect esthétique de la ville. Les initiatives prises visaient un objectif : réduire la pression sur le logement. L'absence d'une implication directe des spécialistes en aménagement urbain et des artistes versés dans la culture urbaine a fait que de la cité demeure un chantier à ciel ouvert où le bricolage perdure... D'autres points énigmatiques sont également à déplorer au sein même des deux Assemblées locales. Les commissions chargées du traitement des divers secteurs sont disparates, de l'avis des observateurs et de quelques élus. A titre d'exemple, des personnes se sont vues attribuer des rôles qui ne relèvent pas de leur compétence. «La majorité des élus ne sont pas imprégnés de leur rôle, et les compétences individuelles existantes ne sont pas du tout exploitées. A mon point de vue, l'image de l'APW est une miniature du gâchis de compétences de la ressource humaine quand le politique prend le dessus sur le technique», affirme une urbaniste, Mme Samia Benabbas Kaghouche, qui a accepté de nous accorder l'entretien qui suit. Constantine belle. Ce ne sera pour demain, tant que l'urbanisation piétine ses propres règles. N. H.