Des politiques urbaines contradictoires et parfois irrationnelles ont durement affecté un patrimoine séculaire. Nos mégapoles ont grandi trop vite sans s'être donné les moyens de contrôle d'une urbanisation galopante et un développement anarchique, deux fléaux imputés, dans la quasi-majorité des cas, au non-respect des normes urbanistiques, notamment les plans directeurs d'aménagement et d'urbanisme (PDAU) et les documents de référence théoriquement revus et corrigés tous les dix ans. Pour autant, dira l'un des intervenants, le chas urbanistique persiste dans une indifférence générale confortée par les passe-droits et le laxisme des pouvoirs publics. Invités au colloque international, organisé depuis hier et jusqu'au mercredi 4 avril 2011 à l'initiative de l'université Mentouri de Constantine, des dizaines d'enseignants et chercheurs universitaires nationaux et étrangers ont été appelés à livrer leurs réflexions sur une thématique à plusieurs spectres: «les tissus existants pour une ville durable». Tout un programme cher au Pr. Samia Benabbas Kaghouche, directrice du laboratoire de recherche d'architecture, d'urbanisme technique, et espace et société (AUTES). Partant de cette thématique, l'expertise a porté sur six axes de réflexion, dont le vieux bâti et la problématique des tissus historiques chère à la directrice du laboratoire AUTES. Pour cette dernière, les tissus historiques représentent «un patrimoine important et un pan d'histoire et de mémoire des peuples, ce qui exige de ce fait une prise en charge en rapport avec les enjeux consistant à restaurer les monuments et réhabiliter le vieux bâti». Ignorance et laisser-aller Sur ce point nodal, l'attention s'est focalisée sur, entre autres centres d'intérêt traitant de ce sujet d'actualité, une étude présentée par Nedjoua Mehenni, enseignante au département d'architecture et d'urbanisme de l'université Mentouri de Constantine. Prenant en exemple la médina de cette ville, l'intervenante n'ira pas par quatre chemins pour stigmatiser «l'ignorance et le laisser-aller affectant le vieux bâti et l'absence d'une prise en charge de son patrimoine, autant de facteurs qui ont abouti à la destruction du tissu traditionnel. Une situation induite par des politiques urbaines contradictoires et parfois irrationnelles». S'appuyant, d'une part, sur la destruction, frisant l'irresponsabilité (pour ne pas dire la débilité !), de 29 bâtisses ancestrales de l'antique Souika, en février 2005, et, d'autre part, sur les limites démontrées du Master plan adopté en 2003, la conférencière soumettra à ses pairs deux interrogations essentielles: «Quels sont, face aux contraintes urbaines, les moyens et les stratégies à mettre en œuvre pour préserver et sauvegarder un label porteur de mémoire ? » et « Faut-il prévoir un règlement urbain encadrant les interventions patrimoniales et les projets de développement durable de la ville ? » Ce qui fera dire, d'un air désabusé, à un vieux briscard de la sphère urbanistique constantinoise: « Le débat est lancé mais, pour autant, on n'est pas près de voir le bout du tunnel.»