Ould Ali Plus que la calentica, ce plat à base de pois-chiche qui fait le bonheur de milliers d'Oranais, plus que le raï que Khaled a popularisé à travers le monde, c'est, sans doute, Sidi-El-Houari qui incarne l'identité culturelle d'Oran. «Qui n'a pas visité Sidi-El-Houari n'a pas connu (ou ne connait pas) Oran», affirme l'adage populaire. Et pour cause : historiquement, Sidi-El-Houari n'est rien de moins que le plus ancien quartier de Ouahran, que plusieurs civilisations ont façonné à travers dix siècles, depuis le débarquement des marins andalous. Depuis l'an 903 environ qui a vu la naissance d'un premier faubourg au pied du Murdjadjo, vers l'Ouest. Oran a ainsi connu le passage de plusieurs civilisations (des Omeyyades jusqu'aux Français, en passant par les Fatimides, les Almohades, les Espagnols et les Turcs) qui apposèrent leur empreinte architecturale et gonflèrent un patrimoine historique déjà riche des vestiges des époques précédentes (punique, romaine...). Résultat : Sidi-El-Houari, plus que tout autre ancien quartier de la ville, est un musée à ciel ouvert abritant de précieux vestiges qui feraient le bonheur des chercheurs et passionnés d'Histoire. «Voilà pourquoi nous demandons que le Vieil Oran soit classé patrimoine mondial», explique un responsable de l'association Bel-Horizon pour lequel un simple classement national ne rend pas justice à «la valeur historique inestimable» de ce patrimoine : la Casbah, cette citadelle militaire, la mosquée du Pacha, les Bains turcs, l'ancienne préfecture, le kiosque à musique, les Portes de Canastel ou du Santon, le Tambour Sain-José, l'église Saint-Louis, le Château Neuf, la mosquée de la Perle, le Palais du Bey, la demeure du Bey Hassan..., et des dizaines et dizaines d'autres vestiges attendent d'être interrogés par les spécialistes pour raconter les présences arabe, turque, française ou espagnole à la grande époque des conquêtes. «Mais pour cela, il faut d'abord le protéger», estime-t-on parmi les associations de défense du patrimoine historique. Patrimoine immatériel Pour la petite histoire, le nom de Sidi-El-Houari provient du temps où un certain Abou Abdellah Mohammed ben Omar El-Houari (présumé né en 1350 et décédé en 1439) était venu s'établir à Oran pour se consacrer à l'étude des sciences et à la pratique de la sainteté. Les historiens rapportent que pendant des années, l'homme avait sillonné le monde en quête de connaissance et savoir. Voyageant par terre et par mer, il est notamment passé par le Maroc, l'Egypte, la Mecque, Médine, El Qods, la Syrie où, rapporte Hadj Omar Dib, historien algérien aujourd'hui décédé, «il chercha à fréquenter les savants, à assister aux cours des maîtres réputés pour leur savoir et la notoriété de leurs œuvres. Dans les zaouïas et les mosquées, les écoles religieuses et les universités, on le vit assidu, passer des heures - et parfois des nuits entières- à recevoir des cheikhs [...]. A Damas, il participa, semble-t-il, à des ‘‘samaâ'', ces sortes d'assemblées restreintes où des maîtres de la pensée soufie présentaient leurs derniers écrits devant un aréopage de savants choisis». Après avoir écumé les pôles du savoir, il finit par s'établir à Oran. «Sidi El Houari fut considéré comme le chef des mystiques ; ne dit-on pas à son propos qu'il était le cheikh des cheikhs, la langue de la vérité, le chef de ses émules, le sage de son époque ?», insiste l'historien pour expliquer la place que le Saint occupe aujourd'hui dans l'imaginaire populaire. Patrimoine matériel précieux, Sidi-El-Houari est, donc, également un patrimoine immatériel à explorer pour comprendre l'histoire tourmentée de celle qui, aujourd'hui, aspire à devenir une métropole méditerranéenne à rayonnement régional. S. O. A