Conflit à rebondissements, le différend qui oppose Moscou à Kiev au sujet de la commercialisation du gaz russe transitant par l'Ukraine semble s'enliser. Les Hongrois, privés du gaz russe depuis presque une semaine, passent à l'action, faisant savoir leur colère aux Ukrainiens. La société gazière hongroise EMFESZ a porté plainte contre la société ukrainienne Naftogaz pour arrêt total des livraisons de gaz russe. EMFESZ, en tant que deuxième importateur de gaz hongrois, a, en effet, porté plainte le 9 janvier contre Naftogaz et contre l'Ukraine devant la Commission européenne, note un communiqué diffusé hier par l'entité hongroise. EMFESZ écrit dans des termes clairs qu'elle déplore que Naftogaz ait géré le gaz qui est la propriété d'EMFESZ comme le sien et qu'elle n'ait pas assuré son transit. Contre l'Ukraine, EMFESZ a fait référence à l'article 22 de la Charte européenne de l'énergie selon lequel les parties contractuelles «doivent gérer leur activité et les activités des sociétés d'Etat conformément aux obligations de l'accord». Cela est la première suite judiciaire de la crise gazière en dehors de l'Ukraine et de la Russie. Les dommages de la société hongroise, qui fournit du gaz à quelque 100 000 foyers et 400 sociétés industrielles, remontent à 30 millions de dollars. Tout en étant le deuxième importateur de gaz hongrois, EMFESZ figure loin derrière le group MOL qui fournit du gaz à la majorité des 10 millions de Hongrois. EMFESZ a un contrat avec la société RosUkrENergo de 3 millions de m3 de gaz par an jusqu'à 2015. Pendant ce temps, les efforts des diplomates russes, ukrainiens et européens se poursuivent. Le Premier ministre russe Vladimir Poutine a reçu le président en exercice de l'UE, le Premier ministre tchèque, Mirek Topolanek, pour discuter de cette crise gazière qui perturbe l'approvisionnement énergétique de l'Europe depuis plusieurs jours. Topolanek, dont le pays préside actuellement l'Union européenne, se trouve en Russie pour une médiation dans le conflit qui oppose depuis des semaines la Russie à l'Ukraine et s'est traduit par une suspension totale des livraisons de gaz russe en Europe via l'Ukraine depuis mercredi dernier. Selon le géant russe Gazprom, les négociations continuaient hier d'achopper sur la question du déploiement d'observateurs pour surveiller le transit du gaz par l'Ukraine. La mise en place de cette mission composée d'experts internationaux est une condition essentielle à la reprise des livraisons de gaz vers l'Europe, notent les Russes. Et toujours pas d'accord, selon l'agence russe Ria Novosti. L'Ukraine n'a toujours pas signé l'accord sur la création d'une commission multilatérale chargée de contrôler le transit de gaz russe vers l'Europe en raison de la position du président Victor Iouchtchenko, a déclaré hier à Moscou le porte-parole du holding gazier russe Gazprom Kouprianov, cité par Ria Novosti. Le protocole sur la création d'une commission multilatérale de contrôle du transit du gaz par le territoire ukrainien n'a toujours pas été signé malgré les déclarations de la partie ukrainienne. Cela signifie qu'une décision du président ukrainien entrave encore les livraisons de notre gaz vers l'Europe suspendues depuis deux jours, a indiqué Kouprianov sur les ondes de la radio «Echo de Moscou». Vendredi dernier, les représentants de l'Union européenne (UE) sont arrivés à Kiev pour contrôler les fournitures de gaz à l'UE. Toutefois, ils n'ont pas de statut d'observateurs tant que le protocole n'est pas signé par toutes les parties, a noté Kouprianov. De plus, il faut effectuer le monitorage du transit à l'entrée et à la sortie du réseau des gazoducs ukrainiens et aux sites de stockage souterrains ukrainiens au lieu de le contrôler dans la capitale du pays. Y. S.