Nacer Haniche Pas moins six nouvelles productions théâtrales sont au programme du Théâtre régional de Constantine (TRC) pour l'année 2014. Les planches ne vont pas chômer, semble-t-il. Le recours à des coopératives et à des troupes théâtrales indépendantes s'impose impérativement pour mener à bien tous les projets qui sont dans le tuyau. Tournant avec huit comédiens seulement, après le départ à la retraite des anciennes figures ayant marqué le quatrième art à Constantine, l'institution devra s'appuyer sur ces contributions pour combler son programme, d'autant plus qu'il s'avère ambitieux et opulent. Et ça sera le cas pour les deux années à venir, de l'avis de la direction du théâtre et des comédiens. «Le déficit en acteurs, comédiens et personnels est une réalité. Aujourd'hui, il est nécessaire de renforcer la composante humaine pour apporter un nouveau souffle à la création», nous dira le comédien professionnel et chef de production artistique au TRC, Mohamed Tayeb Dehimi, l'une des pièces maîtresses de ce théâtre lorsque ce dernier avait le vent en poupe dans les années 1970-1980. «C'est le seul écueil auquel on est confronté. Cette insuffisance mettra du temps pour être aplanie. Former et perfectionner les jeunes talents émergeants aptes à maintenir avec professionnalisme l'activité est la condition sine qua non», ajoutera-t-il, tout en soulignant l'apport du ministère de la Culture qui subventionne l'activité du théâtre. «Sur ce plan, l'institution est gâtée. Mais cette garantie ne pourra éclipser les insuffisances visibles. Le théâtre doit se réapproprier son statut perdu en associant la nouvelle génération, surtout que celle-ci n'avait pas connu et suivi toutes les mutations du 4e art algérien. Elle doit faire partie de la reconstitution de la mémoire de cet art, entrecoupée au fil des années et notamment lors de la décennie noire. Cela s'acquiert progressivement à travers plusieurs formes de transmissions qui font participer toutes les compétences existantes», déclarera M Dehimi à la Tribune. Il faut faire une rétrospective pour pouvoir tracer des perspectives. «Dresser un bilan en présence des nouveaux acteurs est le meilleur moyen pour se projeter dans l'avenir», ajoutera le producteur. Evoquant l'aspect relatif à la qualité des œuvres, notre interlocuteur admet qu'il ne peut y avoir un véritable projet artistique sans le concours de plusieurs partenaires dont l'université, la société et les pouvoirs publics. Et d'avouer le déficit dans quelques «segments» théâtraux (costumier, scénographe, éclairagiste, décorateur,...) qui pénalisent souvent les adaptations et même les créations. «Ce sont des métiers qui sont morts et qu'il est important de ressusciter et de réactiver pour pouvoir produire des pièces de qualité. Parfois on a recours à la friperie pour se procurer les costumes nécessaires. Une fois trouvés, les habits sont remis à un costumier et c'est là où le problème se situe : la touche créative n'existe pas faute d'une expérience et d'une formation en la matière», dira M. Dehimi. A ce propos, le comédien insiste sur la nécessité de mettre en place des structures de formations. «Sans quoi, on ne pourra prétendre à des productions de qualité», affirmera-t-il, même si on a une montagne de textes, romans et scénarios. Constantine qui s'était illustrée par le passé avec Rih semassar, Ness el houma et tant d'autres pièces à succès, pour ne citer que ces deux pièces, s'efforce aujourd'hui de redonner vie à sa scène théâtrale «en s'éloignant de cette période nostalgique qui actuellement n'apporte rien à l'expression théâtrale au vu de tous ces changements. La donne a changé et le théâtre vit sa grande mutation», soutient le producteur. Dans ce sillage, l'artiste n'omettra pas de souligner l'indépendance «teintée» du TRC qui, comme tous les théâtres algériens, servait de vecteur au «discours politique ambiant». «La scène s'est appropriée un langage qui n'était pas le sien. Aujourd'hui, elle est en train de recouvrer son langage originel», dira-t-il. En 2013, le Théâtre régional de Constantine a monté deux pièces dont la Symphonie du cinquantième, en plus des productions pour enfants qui s'enchainaient en période de vacances. Toutefois, si la redynamisation du théâtre est en voie, il reste cependant le problème de son audience à prendre en charge. Un théâtre sans public est comme un seau sans fond, il ne sert à rien. «L'engouement pour le 4e art doit se manifester à l'école en collaboration avec les organisations culturelles (associations) et offices afin d'inculquer aux personnes dès leur jeune âge les délices des arts», affirme Mohamed Tayeb Dehimi, qui soulignera l'importance d'autres supports surtout médiatiques pour participer à une bonne promotion des productions dans des cadres bien précis. N. H.