Sur le dossier énergétique, la France semble évoluer vers une position plus pragmatique. Ces derniers jours, de nombreux bruits ont circulé concernant un possible virage du gouvernement en faveur de la construction de nouveaux EPR et une exploitation du gaz de schiste, en cas de développement d'une technologie plus propre. Les arguments d'industriels comme EDF, Total et Areva auraient fait mouche. Les Verts vont-ils prochainement avaler d'autres couleurs ? C'est en tout cas ce que l'on peut attendre de la loi sur la transition énergétique actuellement en préparation. Celle-ci devrait aborder le thème du nucléaire, mais pas exactement de la façon souhaitée par le parti écologiste. En effet, d'après Le Monde, le gouvernement souhaiterait privilégier les intérêts stratégiques du pays et des industriels du nucléaire (EDF, Areva, Alstom) et souhaiterait la construction de nouveaux réacteurs EPR sur le territoire afin de remplacer les vieilles centrales, dont la rénovation coûterait trop cher à l'Etat et au groupe d'Henri Proglio. L'idée serait de ne pas prolonger la durée de vie des centrales les plus anciennes, mais de conserver les sites et les installations électriques pour y construire des réacteurs de nouvelle génération. La production électrique d'origine nucléaire resterait ainsi constante, mais la part de cette énergie dans la production totale dans l'Hexagone baisserait grâce à l'augmentation de la population et la hausse de la consommation électrique. Une telle décision ne manquerait pas de faire grincer des dents au sein de la majorité, mais serait salutaire pour l'économie française. En effet, outre le fait que le secteur du nucléaire emploie de nombreux travailleurs et sous-traitants, la construction de nouveaux EPR ferait de la France une véritable vitrine pour soutenir les industriels nationaux du nucléaire à l'export. Les secteurs qui réussissent à l'international ne sont pas si nombreux et il convient de leur permettre d'obtenir un maximum de nouveaux contrats. Récemment, un pays comme l'Arabie saoudite a par exemple annoncé sa volonté de travailler avec la France pour bâtir une industrie nucléaire efficace. De plus, et l'exemple allemand ne peut que conforter le gouvernement dans cette voie, le maintien d'une production électrique d'origine nucléaire d'envergure ne peut qu'avoir des effets positifs sur le prix de l'électricité (inférieur à la moyenne européenne) et donc la compétitivité de l'industrie française. À part pour le symbole politique et la volonté de conserver de bonnes relations avec le parti écologiste, il n'y a guère d'argument permettant de contester la pertinence de cette possible décision du gouvernement. Sur le dossier du gaz de schiste toujours, François Hollande semble privilégier le pragmatisme et la compétitivité au détriment des amis de Cécile Duflot. En effet, le président de la République aurait affirmé lors de son voyage à Washington que le gouvernement recherchait à chercher «des technologies autres que la fracturation hydraulique pour l'exploitation des gaz de schiste en France», selon BFM TV. Le chef de l'Etat s'exprimait ainsi lors d'une visite à huis clos au siège de la puissante chambre de commerce américaine. À ce moment-là, les discussions portaient notamment sur le différentiel de compétitivité entre les entreprises françaises et américaines, dues notamment au faible prix de l'énergie outre-Atlantique. Certains pourraient crier au «couac», prétendre qu'il s'agit là d'un propos isolé. Or, celui-ci survient quelques jours après une déclaration similaire sur RTL du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, candidat plus ou moins déclaré à Matignon, en faveur de «recherches pour savoir s'il y a une autre possibilité d'exploiter le gaz de schiste». Rappelons que cette position est défendue depuis le début du mandat de François Hollande par Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif et particulièrement à l'écoute des industriels du secteur. On s'achemine donc vers un virage salutaire en faveur de la recherche autour du gaz de schiste – avec les conséquences positives en matière d'emploi que cela peut entraîner – et du soutien à la filière nucléaire. Le chef de l'Etat entend ainsi mettre toutes ses forces au service de la lutte contre le chômage et choisit la voie industrielle. On ne peut que saluer un tel pragmatisme et il faut espérer qu'aussi bien l'opposition que les chefs d'entreprise sauront saisir l'occasion de contribuer à la bataille de l'emploi.