Merzak Meneceur Les résultats sont accablants dans le balancement des villes qui sont passées de la gauche à la droite. Pas moins de 155 municipalités de plus de 9 000 habitants ont été conquises par la droite regroupant l'UMP, le grand vainqueur, et ses alliés centristes. La perte de Toulouse, la 4e ville de France, de Limoges, socialiste depuis 1912, de Saint-Etienne, Quimper, Roubaix, Tourcoing, Laval, Angers sont le symbole de la cuisante défaite de ceux qui, en 2012, avaient promis aux Français le changement. L'électorat populaire qui avait porté Hollande au pouvoir ne s'est pas mobilisé pour aller aux urnes afin de changer la tendance constatée au premier tour. Le Parti socialiste a un peu sauvé l'honneur en gardant Paris, qui a pour la première fois une femme comme maire, Anne Hidalgo, Lille Lyon et Strasbourg. C'est peu, très peu comme lot de consolation face à un rapport de forces politique bouleversé au profit d'une droite qui pavoise. Autre bénéficiaire de la déroute socialiste, le Front national. Pour la première fois de son existence, le parti d'extrême droite se trouve à la tête de onze villes, dont Fréjus et Béziers, et a fait élire plus de 1 200 conseillers municipaux. C'est une nouvelle donne politique qui ne manquera pas de peser sur la vie politique nationale en renforçant la dynamique d'implantation locale de l‘extrême droite et ses idées d'intolérance et de discrimination. Si le Parti communiste a fait preuve de résistance en perdant peu de municipalités, si les écologistes ont pris une ville aussi importante que Grenoble, cela n'enlève rien au grand constat de l'autre élément fondamental du second tour des élections municipales que constitue le taux d'abstention. Avec 36,3%, l'abstention a atteint un niveau jamais atteint sous la Ve République. C'est là que réside la déroute des socialistes. L'absence de mobilisation d'une partie importante de l'électorat traditionnel de la gauche, celui qui a permis à Hollande d'accéder à la présidence de la République, est à la base de la journée noire pour le locataire de l'Elysée et son camp. Comme le souligne le journal Le Monde : «François Hollande paye donc brutalement -mais logiquement- la note d'un début de mandat raté, faute d'être porté par un projet clair et clairement expliqué. Tout y a contribué : la faiblesse de son dispositif politique(...), l'absence de résultats sur le front décisif du chômage, la grogne fiscale des classes moyennes et enfin l'absence d'une pédagogie capable de convaincre les Français de la pertinence du cap économique trop tardivement fixé.» Face à la gravité de la situation dont il aurait pris conscience il y a déjà quelques jours, François Hollande devait intervenir publiquement, via une intervention télévisée, en début de soirée, après avoir consulté durant toute la journée son Premier ministre. Jean-Marc Eyrault, donné partant, et les ministres influents de son gouvernement, comme Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense. Mais, coup de théâtre en fin d'après-midi avec l'annonce par Matignon de la démission du Premier ministre. De son côté l'entourage de Manuel Valls a annoncé que celui-ci a été nommé par Hollande Premier ministre et chargé de former un nouveau gouvernement. Le chef de l'Etat devait confirmer ces informations dans son intervention de 20h. Mais cela ne serait pas suffisant pour signifier aux Français que leur message électoral a été bien reçu. La gauche du Parti socialiste, les communistes et les écologistes demandent, pour certains, un changement de cap de la politique économique et sociale, pour d'autres une simple inflexion de la politique actuelle par des mesures sociales immédiates en faveur des Français frappés sévèrement par la crise et la politique fiscale actuelle du pouvoir. A cet égard, le journal L'Humanité est catégorique : «Tout confirme qu'à moins de faire le choix d'une crise politique grave et d'une rupture entre le pouvoir et les citoyens, un changement de cap gouvernemental est nécessaire. Tout artifice, tout changement de tête sans rupture avec les politiques d'austérité, remanier aujourd'hui pour ne rien changer, sera interprété comme un mépris.» Comme s'ils ne tiraient jamais de leçons de l'Histoire, les socialistes ont payé le prix du reniement de leurs promesses pour accéder au pouvoir au profit d'une autre politique qui s'avère à chaque fois impopulaire. M. M.