Pas de suspense pour l'élection présidentielle en Egypte qui devrait avoir lieu lundi et mardi prochains. L'armée égyptienne devrait confirmer son emprise sur le pouvoir dans cet important pays arabe. L'homme fort du moment Abdel Fattah al-Sissi est archi-favori dans un scrutin quasiment sans enjeu. Après avoir renversé le premier président civil, Mohamed Morsi issu des Frères musulman Al-Sissi se présente comme la seule alternative pour l'Egypte post-Moubarak. Le maréchal Al-Sissi, qui s'est retiré de l'armée pour pouvoir se présenter, est déjà présenté comme le futur président de la République. Son unique adversaire Hamdeen Sabbahi semble ne pas faire le poids et devrait pour la majorité des analystes constituer un «lièvre» pour Al-Sissi dans son accession à la tête de l'Etat. Le maréchal devrait devenir le cinquième président issu des rangs de l'armée depuis la chute de la monarchie en 1952. En fait même au plus fort de la révolte populaire de 2011, tout en s'attirant une partie de la rancœur des manifestants réclamant la liberté dans le fracas du «Printemps arabe», l'armée n'a jamais perdu la main en Egypte. L'état-major sifflera néanmoins la fin de la récréation après 18 jours de «révolution» poussant Moubarak à la sortie. Les militaires, toujours eux, assureront l'intérim jusqu'à l'élection de Morsi. Et lorsque des millions de manifestants sont descendus dans la rue un an après son investiture pour réclamer son départ accusé de vouloir islamiser de force la société, l'armée, qui selon nombre d'analystes restait en embuscade en laissant pourrir la situation, a repris les rênes. Depuis Al-Sissi, derrière le rideau, a installé un président et un gouvernement par intérim et organisé un processus électoral taillé à sa mesure. L'élection du maréchal devrait refermer une parenthèse particulière dans l'histoire récente de l'Egypte, après avoir vu «l'expérience démocratique» échouer. Un échec qui sera évidemment imputé aux mains maladroites et intéressées des Frères musulmans avides de pouvoir après 85 années de clandestinité et de répression. Pour Al-Sissi, volontiers comparé à Abdel-Nasser, l'heure n'est plus aux manifestations et à la «liberté d'expression» mais à la restauration de la sécurité et à la guerre contre les «terroristes» Frères musulmans. L'Egypte ne peut pas connaître la «vraie démocratie avant 20 ou 25 ans», dira-t-il. Al-Sissi et l'armée sont soutenus par un élan populaire bien réel qui estime que seul un «homme fort» peut diriger l'Egypte d'aujourd'hui. Une majorité d'Egyptiens, fatigués par le désordre actuel dans ce pays fragilisé, appuient la répression contre les pro-Morsi : 1 400 manifestants tués, 15 000 Frères musulmans arrêtés, des centaines de condamnations expéditives à mort ou à de lourdes peines de prison. Cependant l'Egypte peut-elle effacer d'un trait ce pan douloureux de son histoire ? M. B./Agences