Malik Boumati La nouvelle ministre de la culture, Nadia Labidi, a interpellé récemment les directeurs de wilaya de son secteur dans le sens du développement d'une culture de proximité qui devrait bénéficier à un large pan de la société. Femme de culture qu'elle est, elle semble consciente des lacunes existant sur la scène culturelle en Algérie et son constat touche particulièrement à la nécessité d'élargir les activités culturelles dans le but de faire bénéficier et de faire participer le maximum de citoyens. Autant dire qu'elle entend, à travers cette interpellation, rendre effective l'idée de la socialisation de la culture qui fait toujours défaut dans différentes régions d'Algérie. Cependant, cette idée ne peut aboutir sans la concertation avec le mouvement associatif et l'implication de toutes les associations culturelles susceptibles d'apporter un plus qualitatif à l'action culturelle. Mme Labidi a justement demandé aux directeurs de la culture au niveau des wilayas de privilégier la concertation et le dialogue avec l'objectif de travailler pour une animation culturelle pérenne. Tout un programme que l'Etat et ses institutions à tous les niveaux ne peuvent concrétiser sans l'apport du mouvement associatif. À Tizi Ouzou, des associations participent à l'animation culturelle aux côtés des pouvoirs publics, mais d'autres ne sont pas impliquées. D'autres encore ne reçoivent même pas une aide qui leur permettrait d'activer dans la sérénité et d'assurer une pérennité à leur activité. Cette même pérennité que la ministre de la Culture a demandé à ses subalternes. Et si Nadia Labidi n'a pas précisé les modalités pratiques qui mèneront vers la promotion de la culture de proximité et sa pérennité, les responsables du secteur au niveau local devront trouver le meilleur moyen d'y parvenir. Ils sont, à ce titre, conscients qu'ils ne peuvent aboutir dans cette entreprise sans l'implication directe des associations culturelles qui ne demandent qu'à activer aux quatre coins de la wilaya, y compris dans les localités les plus reculées. Ils sont également conscients qu'il ne peut y avoir de culture de proximité sans un programme d'activités qui mettrait fin à l'oisiveté ambiante dans ces localités éloignées et enclavées. Pour cela, ils devraient lâcher du lest en matière d'initiation et d'organisation des activités culturelles au profit justement des associations qui pullulent inutilement dans les villes et les villages de la wilaya. Car non seulement l'Etat ne peut pas assurer, à lui tout seul, une animation culturelle pérenne et sur tout le territoire de la wilaya, mais il est admis aussi que l'omniprésence de l'Etat dans l'activité culturelle est incompatible avec l'essence même de la culture et de l'activité artistique. D'ailleurs, les animateurs associatifs et culturels n'arrivent toujours pas à comprendre cette situation et se demandent quand les responsables de l'Etat vont-ils comprendre que les missions principales des pouvoirs publics dans le secteur doivent se limiter à l'élaboration des politiques culturelles et la réalisation des infrastructures et que les activités culturelles doivent être prises en charge exclusivement par le mouvement associatif en toute liberté. Oui en toute liberté. Parce que sans liberté de pensée et d'initiative, la culture perd son âme et les associations culturelles deviennent des structures serviles qui ne servent pas la culture, mais le maître du moment. L'Etat pourrait également réorienter les aides qu'il octroie annuellement aux associations culturelles s'il veut vraiment aller vers la promotion de la culture de proximité et la pérennité de l'action culturelle. Deux changements dans la politique des subventions sont à même de donner un nouveau souffle à l'activité culturelle : arrêter d'émietter la cagnotte au profit des associations, qu'elles soient actives ou non et qu'elles produisent des activités de qualité ou non, et de la répartir sur les seules associations qui font un travail sérieux et de qualité. Cette action aidera ces dernières associations et les amènera à améliorer encore davantage leurs programmes d'activités. La deuxième action que pourrait mener l'Etat en faveur de la socialisation de la culture par le biais d'actions de proximité, consiste en la réduction de l'aide octroyée aux associations activant uniquement au chef-lieu de wilaya ou dans les grands centres urbains et la réorienter vers celles qui seront appelées à animer les villages, particulièrement les plus éloignés. De nombreuses structures associatives hibernent et n'attendent qu'une petite aide pour se remettre dans l'action, pourvu que la scène culturelle soit assainie. M. B.