Malik Boumati La nouvelle ministre de la Culture, Nadia Labidi, a du pain sur la planche. Si elle est maintenue après la révision constitutionnelle prévue à la fin de cette année, la remplaçante de Khalida Toumi sera appelée à avoir une imagination des plus fertiles pour redonner à la culture ses lettres de noblesse. Le chantier qui l'attend est énorme. Non par le volume, mais plutôt par la complexité des réformes à cibler. Il lui faudra fournir un énorme effort intellectuel pour venir à bout des énormités qu'elle a héritées. Mais cet effort intellectuel ne peut venir sans une volonté politique implacable qui mènera la nouvelle titulaire du ministère de la Culture vers une nouvelle politique culturelle. Mme Labidi devra commencer par un grand toilettage sur la scène culturelle et au sein du mouvement associatif. En effet, de nombreuses associations ne font que parasiter la scène culturelle algérienne en profitant des subventions de l'Etat sans qu'elles n'apportent un plus à la culture. Des associations qui bénéficient de certaines largesses financières pour leur proximité avec les décideurs alors que les sommes qu'elles ont englouties auraient pu servir à d'autres bien plus présentes sur le terrain, mais surtout plus créatives et plus utiles pour la culture et les arts. D'autant que de multiples associations avec des idées innovantes et généreuses n'attendent que des moyens pour mener à bien leurs différents projets. «La nouvelle ministre devrait revoir la politique de distribution des subventions de l'Etat en favorisant celles qui produisent des activités de qualité et qui font montre de régularité et de persévérance sur le terrain», affirme un responsable au sein d'une association culturelle activant dans la wilaya de Tizi Ouzou. Ce qui n'est pas encore le cas pour l'instant, quand on voit des associations fantômes bénéficier de l'aide des pouvoirs publics alors que d'autres plus présentes, y compris sur le plan qualitatif, sont complètement ignorées. Pour un président, interrogé par la Tribune, «il est temps d'en finir avec l'émiettement aveugle de la cagnotte réservée aux associations et de passer à une distribution qui prendrait en compte la présence des associations et la qualité de leurs activités», précisant que la scène culturelle doit aujourd'hui passer à la qualité après avoir connue la quantité. Le même interlocuteur revendiquera l'encouragement de la liberté d'initiative pour celles qui activent sur la scène culturelle. Et également la liberté de pensée qui reste l'âme de toute action culturelle. Les associations ne doivent plus subir la marginalisation en raison du contenu de leurs activités, soutiennent certains animateurs, pour qui «les responsables de la culture ne doivent prendre en considération que la qualité artistique et culturelle des activités». Cette politique, si elle est adoptée par la ministre de la Culture, permettra à son secteur de se consacrer pleinement à l'élaboration d'une politique culturelle digne de ce nom et de laisser l'action culturelle aux associations dont les membres connaissent mieux le terrain, particulièrement dans les villages et les villes où l'Etat peine à être présent culturellement. Ce paramètre induit un nouveau comportement de la tutelle à l'égard du mouvement associatif pour que l'action culturelle retrouve toute sa place dans notre pays. L'Etat doit effectivement faire confiance aux associations et cesser de se comporter comme un tuteur pour des associations considérées comme des mineurs. L'action culturelle est foncièrement libre et autonome, et l'omniprésence de l'Etat sur la scène culturelle ne peut être qu'un fardeau pour l'activité culturelle. L'Etat doit faire confiance aux associations et leur céder le terrain de l'organisation des activités culturelles et artistiques. Cette attitude permettra aux pouvoirs publics par l'intermédiaire du ministère de la Culture de s'occuper principalement de l'élaboration de la politique culturelle devant régir le secteur, mais aussi de poursuivre les actions visant la réalisation de nouvelles infrastructures culturelles et la réhabilitation de celles qui ne répondent plus aux normes. D'autant plus que le problème des infrastructures continue de se poser avec acuité, tant le manque est toujours important. M. B.