Enoncés de principe et professions de foi mis à part, on ne savait pas trop ce que le président américain comptait faire au sujet du conflit israélo-palestinien. Deux jours après son investiture, on commence toutefois à y voir un peu plus clair. On découvre alors un quarante-quatrième président mi-figue, mi-raisin qui ménage la chèvre israélienne et le chou palestinien. Le nouveau maître de l'Amérique post-Bush est apparu à la fois colombe et faucon. Sans être pour autant dans l'équidistance, Barack Obama a accordé des attentions inéquitables aux Palestiniens et aux Israéliens. Plus d'égards pour les Israéliens et un peu moins pour les Palestiniens, le fait apparaître finalement comme un faucon dont le bec est orné d'un rameau d'olivier. Yasser Arafat aurait peut-être apprécié. Mais il faut regarder avant tout l'enseigne de la nouvelle politique et l'homme, «l'émissaire de paix», censé en être la première vitrine. De la bouche même d'Obama, on sait désormais que «la politique de son administration consistera à rechercher activement et énergiquement une paix durable entre Israël et les Palestiniens, ainsi qu'entre Israël et ses voisins arabes». Voilà pour le cadre général. Quant au nouveau missi dominici dans la région, il s'agit donc d'un diplomate chevronné, de bonne réputation et bon connaisseur du dossier. George Mitchell, qui a fait ses preuves dans le cabinet Clinton, est notamment l'auteur d'un rapport remis en avril 2001 à l'ONU et à George W. Bush sur les causes de la seconde Intifadha et les moyens de stopper la violence. Ce document fut jugé en son temps comme un modèle d'impartialité. Volontariste à souhait, cet ancien sénateur de mère libanaise, a d'emblée affirmé que «les conflits insolubles n'existent pas». Dans le détail, Obama semble clairement jouer la carte Mahmoud Abbas, perçu comme acteur dans la reconstruction de Ghaza et interlocuteur privilégié des Israéliens. D'ailleurs, le président de la discréditée Autorité palestinienne fut le premier «chef d'Etat» étranger auquel il a téléphoné. Et, comme on s'y attendait un peu, il n'a pas condamné la chaotique offensive «Plomb Durci» contre Ghaza. Il l'a même justifiée : «L'Amérique est résolue à défendre la sécurité d'Israël et elle soutiendra toujours son droit à se défendre contre des menaces légitimes.» Dans la balance de la terreur et dans le registre de la douleur, les Israéliens, de son point de vue, semblent être plus égaux que les Palestiniens. Du coup, Hamas apparaît à ses yeux comme le déclencheur de foudres guerrières israéliennes justifiées. On aurait compris les choses autrement si Obama n'avait pas cru bon de rappeler que «pendant des années le Hamas a lancé des milliers de roquettes sur d'innocents Israéliens». On ne l'ignore plus, c'est le pot de terre qui a toujours tort. Classique. Mais, le président américain, vite rattrapé par les réalités, est tout de même dans la subtilité. La nuance qu'il apporte au discours culpabilisateur du Hamas mérite tout de même l'attention. «Si les tirs de roquettes sur les Israéliens sont intolérables, c'est également le cas d'un avenir sans espoir pour les Palestiniens.» Avec de tels propos, Barack Obama semble rompre avec l'unilatéralisme et l'indifférence de l'administration Bush qui ne voulait pas s'impliquer dans le conflit avant de se ressaisir et proposer le déséquilibré meccano d'Annapolis. Tout n'est donc pas si négatif dans l'attitude du moment d'Obama, même si Hamas n'y a pas vu pour l'instant quelque esquisse de lendemains palestiniens qui ne déchanteraient guère. Dans ce cas, les dirigeants islamistes semblent avoir oublié que l'invisible diplomatique peut être plus intéressant que l'affichage. Selon le quotidien britannique The Guardian, qui puise ses informations dans le staff chief diplomatique et militaire du président étasunien, Obama aurait été convaincu qu'isoler Hamas serait une «solution contre-productive». Stratèges et spin doctors réfléchiraient aux moyens de discuter avec lui. Donc, pas de négociations officielles pour ne pas donner l'impression de «le légitimer» et crisper du coup les Israéliens. L'amiral Dennis Blair, nouveau patron de la CIA, y serait favorable. Avec Obama, c'est peut-être le début de l'amorce de l'esquisse de quelque chose… N. K.