Nasser Hannachi On ne lit plus comme c'était le cas il y a 30 ans. Phénomène mondial en termes de régression de la lecture et de l'intérêt au domaine livresque, à cause des multimédias notamment. Mais à l'échelle locale et nationale, le désintérêt semble atteindre des proportions démesurées, à l'exception de quelques cercles estudiantins ou ceux des personnes nostalgiques des vertus de la vieille école qui maintiennent leur engouement intact pour le livre. Le livre aurait trouvé son fidèle et éternel compagnon à l'école si la volonté des acteurs principaux au niveau des académies et des établissements avait maintenu sans relâche les «mesures» tracées par la tutelle en 2010 quant à l'incitation à lire en milieu scolaire. Une bonne intention pour provoquer chez l'enfant l'envie de bouquiner et croquer les esquisses, toutes catégories confondues, reflétant son imaginaire. Le projet n'est pas allé à son terme, pourtant ce ne sont pas les ouvrages qui font défaut compte tenu des assurances de la tutelle à en alimenter tout le réseau national en quantité et en qualité. Ce qui devait être considéré comme une option, voire une obligation, pour la promotion de la lecture dans les collèges, puisque des appréciations en points y étaient prévues, s'est effritée à mi-chemin sans que les artisans n'en donnent des évaluations concrètes. Si ce n'est quelques généralités. «L'élève devra retrouver la lecture progressivement surtout que les programmes ne permettent pas une évasion permanente pour la lecture des manuels extrascolaires», dit-on. De tout temps, la lecture publique était du ressort des municipalités à travers leurs bibliothèques, et les parents sont les premiers incitateurs de leurs enfants dès le jeune âge. Aujourd'hui, les espaces de lecture se sont rétrécies, et les festivals, locaux ou nationaux, tel «Lire en fête», une autre initiative du seul ministère de la Culture - alors que celui en charge de l'Education devrait être partie prenante, voir initiateur- visant à ranimer l'amour du livre et le désir de le feuilleter pour éveiller l'envie de lire chez les enfants, se cherchent encore de cité en cité faute d'une adhésion massive des concernés. Les rondes -de localité en localité- effectuées par des bibliothèques mobiles chargées d'ouvrages en quête d'adeptes et de disciples ont engrangé une maigre récolte. En clair le lectorat demeure toujours à l'état quasi embryonnaire si l'on excepte quelque engouement éphémère. Et le rituel cercle de transmission et de vulgarisation (communes, chargés des offices culturels, Assemblée populaire de wilaya, et associations) n'a pas trouvé impact chez les citoyens. L'on persiste au demeurant ! Au lieu de changer son fusil d'épaule et d'éplucher le mal de lire au sein des populations locales. Le malaise est certes mondial au vu de l'explosion des multimédias et autres supports high-tech venant faire décroitre la courbe de lecture. Mais au niveau régional la plaie est profonde. Les bibliothèques ne sont pas fréquentées pour le seul besoin accru de lire, mais pour s'acquitter des devoirs scolaires en groupe. En parallèle il faut relever l'absence de multiples associations versées dans le créneau, et dont la mission est d'inciter les scolarisés et autres catégories à se ruer vers les bibliothèques ou même à embellir leur temps libre d'un recueil nourrissant. Constantine (quoique préoccupée par le renouvellement et la réhabilitation de ses infrastructures culturelles en perspective de 2015) dispose de plusieurs aires où le livre pourra s'étaler. La quasi-totalité des municipalités renferment au moins une salle et un meuble. Ce n'est pas aussi difficile. La platitude est issue d'une implication frêle. Même les parents, dépassés par le rythme scolaire, ne cherchent que les résultats du cursus, ce qui est pour le moins logique. En revanche, selon quelques pédagogues, cet alibi ne devra pas éclipser la lecture publique ou en milieu scolaire. Le Festival de la lecture, contrairement à d'autres essais culturels, n'attise que peu d'acteurs. C'est ce qui étaye sous un autre angle la faiblesse de fréquentation dans les bibliothèques. Un autre dessein, une autre projection devront éclore des milieux éducatifs ou d'associations avec évidemment le concours du ministère pour tenter de relancer la lecture publique qui, il faut le crier haut et fort, n'a pas décollé ou recouvré son aura d'antan. Quoi que l'on dise dans les sphères habituées à caresser dans le sens du poil, le baromètre indique tout le contraire. Du moins la frénésie livresque n'est de mise que dans le parascolaire ou chez quelques personnes véritables amis du livre. N. H.