Bon gré mal gré, les étudiants à travers le pays, anciens et nouveaux, rejoignent les campus pour une nouvelle année universitaire 2014-2015. Ils courent derrière le diplôme, quelle que soit sa nature, pourvu qu'ils l'aient et que cela soit sans grandes tracasseries et, encore moins, de démêlés avec l'administration ou autre! L'apprentissage des langues, la pratique des sciences, la compréhension des choses de la vie, la sagesse, l'intelligence, l'élévation spirituelle...tout cela est secondaire. Rien ne presse. Le jeune sortant de l'université a toute la vie devant lui pour comprendre de lui-même ce qu'il a à découvrir dans les livres et dans les enseignements donnés par ses professeurs. Ce qui compte, c'est d'abord le diplôme parce qu'il s'agit de se débrouiller un travail et se lancer au plus tôt dans la vie professionnelle. Avoir un salaire et un statut. Faire face aux besoins de la vie quotidienne mais aussi avoir une place dans la société. Voilà comment pense la majorité des étudiants et ce qui explique leur peu d'intérêt pour les études. Un dilemme, un piège, une erreur...quel que soit le qualificatif, la vérité est une seule dans ce cas : seul le diplôme, le papier, intéresse le jeune étudiant. La faute est au gouvernement qui ne garantit pas l'emploi au sortant de l'université. La faute est au gouvernement qui prétend travailler de façon à réunir les meilleures conditions d'enseignement, d'hébergement, de transport et autres sans pourtant assurer le minimum. La faute est au gouvernement qui continue dans les mêmes erreurs. La réforme de l'enseignement supérieur est un échec comme c'est le cas pour l'éducation nationale. Les responsables des deux secteurs et les initiateurs des deux réformes ont beau prétendre le contraire mais les faits sont là. Le système LMD (Licence-Master-Doctorat) a échoué en Algérie. Et cet échec a été annoncé bien avant que le nouveau système ne soit mis en marche. à l'université des sciences et technologies Houari-Boumediène (Usthb) de Bab Ezzouar et ailleurs, des protestations estudiantines contre ce système ont eu lieu à différentes occasions mais l'administration a répondu par l'indifférence totale. Au lieu de songer à revenir sur sa démarche, le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a engagé toute une procédure pour la généralisation du nouveau système et l'éradication de l'ancien, au lieu de laisser la faculté aux étudiants de choisir entre les deux. Le LMD, tel qu'appliqué en Algérie, a montré toutes ses limités et, malheureusement, c'est toute une génération qui en paie les frais et d'autres à venir. «Ils n'auraient pas dû aller dans cette voie. C'était prévisible, dès le départ, que cela ne va pas marcher en Algérie. C'est clair, les conditions ne s'y prêtent pas. Il est vrai que de grands efforts ont été déployés pour la réalisation de nouveaux établissements universitaires, l'amélioration des conditions d'accueil et d'hébergement mais cela reste insuffisant. Pour que le LMD réussisse, il ne faut pas qu'il y ait surcharge des salles et des amphithéâtres. Il faudrait que chaque étudiant dispose d'un ordinateur connecté à Internet. Il faudrait que tous les établissements soient dotés de tous les moyens didactiques nécessaires. Il ne faudrait pas, non plus, qu'il y ait manque d'enseignants et tous doivent être de haut niveau... », souligne un enseignant de l'université de Bouzaréah. Et ce dernier d'évoquer les problèmes qui persistent dans cette même université, pour dire que les projets «trop ambitieux» des responsables du ministère ne pourraient être atteints à court et moyen terme. «Parlons seulement de la clôture pour ne pas aller loin dans la liste des problèmes qui persistent dans cette université. L'établissement n'est pas sécurisé. Des étrangers rentrent à leur guise et personne ne leur parle. Les étudiants ne sont pas en totale sécurité. Il y a eu déjà des agressions et d'autres ne sont pas à écarter», dit-il. Le problème de transport comme c'est le cas pour tous est des plus contraignants. Le parc s'est doté d'un plus grand nombre de bus universitaires de façon à pouvoir assurer toutes les dessertes mais les problèmes de circulation dissuadent de nombreux étudiants de faire le trajet, de manière régulière. «L'essentiel, c'est d'être là pour les examens. Pour le reste, on se débrouille comme on peut avec les profs pour justifier nos absences», rapportent des étudiants qui résident dans les cités de Beni Messous, Dély Brahim et, pire encore, Sidi Abdallah. «C'est un calvaire ce problème de transport», disent-ils. Les études universitaires en Algérie n'intéressent pas grand monde, c'est juste le diplôme qui «fait bouger», reconnaissent des étudiants eux-mêmes. Il y a quelques années, des étudiants de la faculté des sciences économiques (Dély Brahim/Alger) ont observé plusieurs jours de grève pour faire pression sur l'administration qui refuse leur passage à la deuxième année pour cause de non obtention de la moyenne de 10/20. Non seulement ces étudiants n'avaient pas la moyenne de 10/20 mais ils en étaient très loin, à peine 8/20, et ils insistaient malgré tout pour passer sans les rattrapages. «Ce n'est pas de notre faute. Ce sont eux qui nous ont imposés ce système LMD et c'est difficile pour nous», déclaraient les étudiants, qui sont arrivés jusqu'à fermer l'université et à menacer de séquestrer le recteur et les employés. Si les responsables du département ministériel avaient pris la peine d'examiner le problème à l'époque, à partir de ces faits et de ce constat, les déperditions n'atteindraient pas le niveau actuel. Ce phénomène de déperdition que les représentants du ministère ne prennent pas au sérieux, jugeant que les étudiants sont assez mûrs pour prendre les chemins qui leur conviennent dans la vie : quitter ses études pour travailler, parfois quitter le pays pour suivre ses études ailleurs et d'autres options encore. La réalité est que beaucoup d'étudiants se retrouvent au chômage et le subissent pendant des années. Ne supportant pas leur situation, certains tombent dans la déprime, la dépression et autres maladies, autres fléaux qui rongent la société. K. M.