* Les travailleurs de la C-TO, ex-Cotitex, ont vécu trois années, de 2006 à 2008, pleines d'actions de revendication et de protestation, dont quelques-unes avaient atteint un seuil de radicalité jamais dépassé par les syndicats successifs depuis l'existence de l'entreprise. Des recours extrêmes allant d'actions à Alger jusqu'à la fermeture de la RN12, le plus important axe autoroutier situé à quelque mètres de l'usine, justifiés par la dégradation des conditions de travail dans les ateliers et le manque d'initiatives d'intéressement des travailleurs de la part de leurs responsables directs et de la tutelle. Las d'alterner entre chômage technique et grèves et actions de protestation «ordinaires» et conflits intrasyndicaux dans l'enceinte de l'entreprise, en plus de vivre toute l'année avec un salaire misérable, les travailleurs dans leur majorité avaient décidé contre l'avis de quelques porte-parole «usés» de se reporter au registre des actions radicales. Le 18 septembre 2006, ils ont eu recours au blocage de la RN12 pour exiger le paiement de deux mois d'arriérés de salaire et l'approvisionnement en matières premières. Cette action a été renouvelée à chaque fois que le virement des salaires n'est pas effectué à temps. Dans le sillage de ces fermetures répétées de la RN12, le collectif des travailleurs a organisé durant la même période plusieurs autres actions de protestation devant le siège du groupe à Alger. * «La situation préoccupante dans laquelle se débat la CTA, n'est pas une fatalité. C'est une situation bel et bien orchestrée par les pouvoirs publics, à l'effet de la pousser à sa fermeture pure et simple», avertissaient les travailleurs de la C-TO au summum de la crise des salaires fin 2006 et durant l'année 2007. Ils avaient aussi dénoncé «une stratégie de mise à genoux du complexe», allusion à la rupture de livraison de matières premières et les retards acculés dans le payement des arriérés de salaire. * Vers la fin de l'année et jusqu'au 31 mars 2007, les travailleurs (ils étaient 618 à l'époque) ont été mis au chômage technique pour cause de non disponibilité de matières premières. Beaucoup de travailleurs avaient interprété cette «solution temporaire» comme un avant-goût de la volonté de liquidation de l'entreprise, d'autant que la banque ne répondait pas favorablement aux sollicitations d'ouverture de lignes de crédit. * A maintes reprises, les travailleurs de la C-TO avaient dénoncé le refus des banques d'accompagner l'entreprise par des lignes de crédit dans le cadre des plans de sortie de crise. C'était grâce aux aides en matières premières «refilées» par des entreprises de la même filiale du groupe que la C-TO arrivait à boucler des commandes nécessaires à la survie de l'entreprise et à la continuité du travail. * Au 31 novembre 2006, la C-TO cumulait 255,366 millions de dinars de dettes contre 1,049 milliard de dinars de créances. Le nouvelle section syndicale «ignore» l'origine de cette dette qui doit augmenter depuis la fin 2006 et n'a «aucune idée» sur le montant actuel et les organismes créanciers de la C-TO, selon les représentants syndicaux. * Beaucoup ont remarqué le manque du tissu indispensable à la confection de la foudha, sorte d'ornement nécessaire qui accompagne toujours la robe kabyle et qui autrefois était fabriquée par la C-TO. Selon le syndicat, qui confirme l'indisponibilité de ce tissu à la C-TO, les raisons sont économiques mais aussi techniques. Il affirme que le «travail pour la confection de la foudha est complexe ; mais si jamais il y a une commande nous sommes prêts à la satisfaire». La plupart des femmes qui en confectionnent se procurent ce tissu par le biais des émigrés vivant pour la plupart en France. * La perspective de privatisation ne fait pas peur ni au syndicat ni au CP, à condition que celle-ci préserve les emplois, revoit à la hausse les salaires, respecte les doléances des travailleurs et tient compte des objectifs dans le cadre de l'investissement. Les représentants insistent aussi sur le maintien de l'actuelle activité de tissage et de filature pour ne pas jeter les travailleurs dehors.