La ministre de l'Education nationale, Mme Nouria Benghebrit, sort de sa posture de réserve et passe à l'offensive. Elle accuse les syndicats en grève d'œuvrer pour la privatisation du secteur. C'est ce qui a été rapporté par l'APS, à l'issue de l'ouverture d'une session de formation des inspecteurs, hier à Alger. La dépêche APS indique que la ministre «déplore les agissements irresponsables de certains enseignants qui font la grève, d'une part, et assurent des cours en privé, d'autre part». Et de poursuivre, «les évènements qui marquent le secteur dévoilent une volonté de privatiser le secteur, en encourageant les élèves à bénéficier de cours particuliers et à s'orienter vers les écoles privées». Aussi, «la méconnaissance des lois régissant l'éducation en Algérie est également à l'origine de ces troubles». Une accusation «grave», diraient beaucoup. Le Cnapeste serait le premier à réagir officiellement à telle accusation du fait qu'il soit en grève illimitée depuis deux semaines. Une grève qui a de lourdes conséquences sur l'organisation des devoirs du deuxième trimestre et, depuis hier, les compositions. Les autres syndicats composant la CSE (Coordination des syndicats de l'éducation), à savoir le CLA, le Snapest, l'Unpef, le Snte, le Snapep, le Snapap et le Satef, eux aussi, se sentiront concernés. Pour cause : ces 7 syndicats avaient observé une grève de deux jours, les 10 et 11 février dernier, et ont appelé à une autre de trois jours renouvelables chaque semaine, à partir du 9 mars prochain. Voilà qui va jeter de l'huile sur le feu au moment où les élèves et les parents d'élèves s'attendent à des mesures qui seront à même d'apporter l'apaisement dans la famille de l'éducation. Et surtout si les accusations de la ministre sont fondées, du moins en ce qui concerne la partie où elle dit que les enseignants en grève assurent des cours en privé. En effet, ce n'est un secret pour personne, depuis bien des années, des enseignants, en grève ou pas, assurent des cours en privé parallèlement à ceux en classe. Parfois même, ils s'investissent plus dans l'activité «illégale» et donnent très peu pour celle pour laquelle ils «sont suffisamment bien payés et régulièrement». La ministre, dans ses réponses aux journalistes, a évoqué la loi. Allusion faite à un possible recours à la justice pour sanctionner ceux qui s'adonnent à cette activité complémentaire, non reconnue officiellement. Un autre syndicat s'est manifesté hier, mais par pour répondre aux accusations de la ministre. Simplement parce qu'il ne se sent pas visé. Il s'agit de la Fnte (Fédération nationale des travailleurs de l'éducation), affiliée à l'Ugta. Celle-ci n'est pas en grève. Un article d'un journal arabophone, dans son édition d'hier, a donné une information pour la moins surprenante : «La ministre Benghebrit a fait appel aux enseignants de la Fnte pour assurer d'autres cours à la place des enseignants qui sont en grève.» À cette information «mensongère», la Fnte a tenu à assurer ses militants et autres qu'à aucun moment un responsable du département ministériel n'a contacté ceux de l'organisation syndicale pour une telle mission. Déjà qu'ils ont des cours à assurer pour leurs propres élèves ! Pour ce qui est de la session de formation d'hier, au profit des inspecteurs, celle-ci a eu lieu à l'Institut national de formation et de perfectionnement des personnels de l'éducation d'El Harrach. Elle profite à 418 inspecteurs et devra se poursuivre jusqu'à la fin de l'été prochain. Cette formation, a souligné la ministre, «s'articule autour de la stratégie du ministère dans le domaine de la formation, notamment en ce qui concerne la question de gouvernance. Cette dernière revêt une importance particulière en matière de gestion du secteur au double plan local et central dans le but de remédier aux dysfonctionnements». Par ailleurs, apprend-on, la ministre Benghebrit a été invitée hier à une réunion, au siège du ministère du Travail, avec le secrétaire général de la centrale syndicale Ugta, Sidi Saïd, et le ministre du Travail, Mohamed El Ghazi, dans l'espoir de trouver une issue à ce conflit qui n'arrête de peser sur tous. À l'heure où nous mettons sous presse, aucune information n'a filtrée à part le fait qu'elle se déroule normalement. K. M.