Le débat sur la place de la culture en milieu scolaire revient au devant de l'actualité. La ministre de l'Education nationale, Noria Benghebrit, et sa collègue de la Culture, Nadia Labidi, ont paraphé cette semaine une convention-cadre pour le développement des activités artistiques à l'école. On doit, d'abord, rappeler qu'un accord similaire, avec néanmoins une portée plus modeste, a été déjà conclu entre les deux départements au milieu des années 2000, du temps du tandem Khalida Toumi-Boubekeur Benbouzid, qui avaient aussi signé une convention pour la réintroduction du livre de lecture dans les programmes scolaires. Visiblement, ce partenariat n'avait pas porté ses fruits pour que les deux ministères se décident, comme cela, à refonder leur projet de coopération. Pour ne pas refaire les mêmes erreurs du passé, les deux parties se doivent d'examiner minutieusement ce qui a empêché cette première initiative d'aboutir et d'atteindre les objectifs tracés. En premier, de nombreux pédagogues soulignent le peu d'intérêt accordé à ce module de l'animation culturelle au sein du système scolaire. Souvent, les enseignants d'éducation culturelle ne sont pas spécialement formés et la plage horaire accordée dans ce sens reste négligeable. Au primaire, des instituteurs de langue arabe ou de français s'efforcent de parler musique et dessin à des petits enfants qui ne comprennent que dal. Les diplômés des instituts des beaux- arts et les artistes ne sont pas autorisés à postuler à cette fonction pédagogique. De plus, une séance hebdomadaire, d'une ou deux heures, est manifestement insuffisante pour une initiation artistique, aussi sommaire soit-elle. Il va falloir alors accorder plus de temps aux activités culturelles et ludiques à travers l'allègement horaire des autres matières, d'autant plus que les élèves et le corps enseignant se plaignent constamment d'une grande surcharge des programmes. En plus de ces considérations pédagogiques, il y a aussi des moyens et des supports à mettre en place. Rares sont les écoles qui disposent d'un petit atelier de peinture ou d'un espace adapté aux arts de la scène. Dans les cycles moyen et secondaire, cette matière est carrément abandonnée. Le manque de moyens didactiques, l'absence de manuels scolaires adaptés et la totale indifférence de l'administration achèvent ce qui reste de ce fameux module d'instruction culturelle. Dans leurs déclarations respectives, à la cérémonie de signature de la convention, les deux ministres ont promis d'agir avec efficacité à travers la mise en place prochaine d'une commission intersectorielle qui se penchera sur les tous les détails. Ce groupe de travail mixte se chargera aussi de l'encadrement des festivals culturels scolaires. Visiblement, ces cellules de réflexion mixtes seront étendues aux wilayas et aux communes pour une meilleure couverture des établissements scolaires. On a aussi, bien entendu, parlé de peinture, de théâtre, de lecture, de photographie et de cinéma. C'est une belle promesse qu'on ne doit pas décevoir à la fin. Les attentes de la famille éducative sont grandes. Les parents jubilent aussi, même si les insuccès du passé sont toujours vivaces dans les esprits. Lors de la rentrée scolaire de 2011, on a annoncé, en grande pompe, la réintroduction officielle du fameux devoir de lecture dans les écoles primaires, les collèges et les lycées. Ainsi, chaque élève était supposé lire au moins trois livres par an (un pour chaque trimestre), en présentant un résumé de l'œuvre lue pour l'appréciation de son enseignant et ses collègues. Il s'agissait d'une charge obligatoire. En son temps, l'entreprise avait, comme aujourd'hui, enthousiasmé tout le monde : le corps enseignant, les parents d'élèves, les libraires et les bibliothécaires. Quatre années plus tard, rien ne s'est concrétisé de tout cela. A qui la faute ? Là aussi, on revient à la dimension que l'on veut réellement donner à la culture dans système scolaire. L'école doit, d'abord, savoir exactement ce qu'elle veut pour solliciter, ensuite, l'assistance bien ciblée des professionnels de la culture. Idem pour le sport scolaire. Les réformes successives des programmes scolaires se caractérisent, toutes, par une espèce de «mépris» pour les activités culturelles au nom d'une thèse qui prône l'épanouissement des facultés intrinsèques de chaque apprenant. Aucune place n'a été accordée aux loisirs, aux beaux-arts, à la création artistique et aux belles lettres. De vrais ateliers de peinture, de musique ou de théâtre sont pourtant nécessaires aux élèves. En plus de la détente que cela procure, ce type d'initiatives permet aux petits d'être à la page et de mieux comprendre leur époque. Le partenariat «gagnant-gagnant» conclu entre les deux ministères de l'éducation de la culture, est incontestablement une belle chose. Mais, le plus dur consiste à le concrétiser réellement sur le terrain. Tout dépendra de la détermination, de la passion et du suivi qu'on y déploiera. K. A.