La situation humanitaire s'est dégradée au Yémen suite à l'intervention militaire d'une coalition de pays arabes menée par l'Arabie saoudite. Le Yémen, pays déjà fragilisé par les luttes politiques internes, se retrouve aujourd'hui face à une véritable guerre imposée par les raids des avions saoudiens et ses bombardements meurtriers. Le Conseil de sécurité de l'ONU réfléchit à proposer des «pauses humanitaires» dans un conflit qui engage plusieurs acteurs régionaux. La campagne militaire de pays arabes menés par l'Arabie saoudite, lancée le 26 mars, a ralenti l'avancée des Houthis vers Aden, la grande ville du Sud, après avoir contrôlé la capitale Sanaa et des régions du nord et du centre du pays. Mais l'intervention militaire a poussé le pays vers davantage de chaos. Sur le terrain, les Houthis et leurs alliés font face à la résistance des «Comités populaires», une force paramilitaire soutenant le président Abdrabbou Hadi Mansour. Ce dernier est toujours réfugié en Arabie saoudite. Les bombardements et les combats, qui se concentrent à Aden ont fait 185 morts et 1 282 blessés, dont 75% de civils. Plusieurs ONG ont appelé les organisations internationales et les monarchies arabes du Golfe, engagées dans l'opération militaire «Tempête décisive», à apporter une assistance médicale d'urgence aux hôpitaux d'Aden. L'ONU et les organisations humanitaires s'inquiètent du nombre croissant de victimes civiles dans un conflit appelé visiblement à perdurer. Sur proposition russe, le Conseil de sécurité de l'ONU voudrait instaurer des «phases» pour venir en aide aux blessés et soulager les civils. La responsable des opérations humanitaires de l'ONU, Valerie Amos, qui s'est dite «extrêmement inquiète» pour la sécurité des civils, a fait état de 519 morts et de 1 700 blessés en deux semaines de guerre au Yémen. La Croix-Rouge internationale a déploré la mort à Aden de deux agents humanitaires alors qu'ils secouraient des blessés, trois jours après la mort d'un employé du Croissant-Rouge à Dhaleh. La coalition arabe menée par Ryadh a parachuté près du port d'Aden un lot d'armes et de munitions pour les pro-Hadi. À Riyadh, le porte-parole de la coalition a dit que celle-ci «ne doit pas être pressée» dans sa mission, alors que l'Arabie saoudite a déjà perdu trois de ses gardes-frontières par des tirs en provenance du Yémen. L'intervention terrestre, inéluctable pour certains observateurs, reste pourtant redoutée pour ses conséquences désastreuses pour toute la région. Devant l'insécurité croissante, la Jordanie a évacué vendredi 48 de ses ressortissants du Yémen par voie terrestre, via l'Arabie saoudite, au lendemain de l'évacuation de dizaines d'Egyptiens. Les ambassades sont fermées à Sanaa depuis fin janvier. Et les employés étrangers de l'ONU et des sociétés ont été rapatriés. Le réseau Al-Qaïda profite du chaos pour prendre le contrôle de Moukalla, chef-lieu du Hadramout, après avoir donné l'assaut contre la prison centrale et libéré 300 détenus, dont un de ses chefs. D'aucun parlent déjà de risque «d'anarchie généralisée» dans le pays. M. B./Agences