Le procès de l'affaire dite de l'autoroute Est-Ouest reprendra aujourd'hui devant le tribunal criminel d'Alger. Ce sera le premier procès à avoir lieu -s'il se tient- d'une série de quatre grands procès de corruption qui seront examinés dans les prochaines semaines dont, rappelons-le, celui de Khalifa Bank et Abdelmoumène Khalifa, prévus le 4 mai prochain, et l'affaire Sonatrach annoncée pour le 7 juin. En ce qui concerne l'affaire dite de l'autoroute Est-Ouest, rappelons que ce procès a été renvoyé par le président du tribunal criminel d'Alger, en mars dernier, pour absence des avocats étrangers du principal accusé dans cette affaire, Chani Medjdoub. Ce dernier avait refusé que le tribunal lui désigne un avocat commis d'office. Aujourd'hui, il est attendu que le procès s'ouvre en présence des deux avocats étrangers de Chani Medjdoub, à savoir Me William Bourdon et Philippe Penning. Mais la tenue du procès est loin d'être garantie en raison des conditions émises par le collectif des avocats des prévenus, qui avaient demandé la présence de tous les témoins dans cette affaire. D'ailleurs et selon un article de presse, les avocats de Medjdoub Chani ont publié une lettre dans laquelle ils exigent la présence de tous les témoins, surtout les sept pour lesquels ils viennent de déposer une demande de convocation. Selon le collectif des avocats «ces témoins sont très importants. Ils doivent être présents, quitte à utiliser la force publique, afin de créer un débat contradictoire lors du procès». Ainsi donc, sans ces garanties, le collectif risque de se retirer considérant que le procès «ne sera pas équitable». En plus des exigences des avocats, il y a aussi la décision du bâtonnier Abdelmadjid Sellini de s'opposer à la constitution de maître William Bourdon «pour non-respect des règles de déontologie et usages prévus par l'accord judiciaire algéro-français». Dans une lettre adressée à Me Bourayou, chez lequel l'avocat luxembourgeois William Bourdon a élu domicile pour se constituer au profit de Medjdoub Chani, citée par le quotidien El Watan, Me Sellini explique que l'avocat français «Me Bourdon a foulé aux pieds tous les usages en s'adressant à la presse en tant que membre de la défense de Medjdoub Chani, et donc en violant les règles d'éthique qui régissent la profession d'avocat. Ce que je ne peux accepter. De ce fait, j'ai informé le procureur général et le président de la Cour d'Alger de ce refus», ajoutant qu'il «n'accepte pas la constitution de confrères étrangers qui minimisent de l'importance des barreaux algériens en pensant qu'ils n'ont pas d'autorité». Il s'agit-là donc d'une autre raison qui risque de faire reporter la tenue du procès. Rappelons enfin que dans ce dossier qui a fait couler beaucoup d'encre, 16 personnes et 7 entreprises sont poursuivies pour plusieurs chefs d'accusations, dont association de malfaiteurs, blanchiment d'argent, abus de pouvoir, corruption et dilapidation de l'argent public. Parmi les accusés, Chani Medjdoub, déjà impliqué dans l'affaire du Faki (Fonds algéro-koweitien) qui remonte à une dizaine d'années, le secrétaire général du ministère des Travaux publics, Bouchama Mohamed, le chef de cabinet, Belkacem Bouferrach, le directeur des nouveaux projets auprès de l'Agence nationale des autoroutes, Mohamed Khelladi, Ouzane Mohamed (dit colonel Khaled) ainsi que l'intermédiaire Addou Tadj et son neveu Sid Ahmed. Les trois filles Ghereib (filles de l'ancien ambassadeur, député FLN et membre de l'autorité de lutte contre la corruption) sont également accusées dans cette affaire. L'affaire, qui remonte à 2007, a éclaté après les investigations menées par les éléments de la direction de renseignements et sécurité (DRS). L'enquête a permis de découvrir que d'importantes sommes d'argent ont été perçues par des responsables du ministère des Travaux publics à différents niveaux en contrepartie de «facilitations» ou «informations» offertes à des entreprises étrangères dans le projet de l'autoroute Est-Ouest. H. Y.