Le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, a promis une législation plus dure pour «lutter contre le terrorisme», au lendemain de l'assassinat du procureur général Hicham Barakat dans un terrible attentat à la bombe. «La main de la justice est entravée par les lois. Nous n'allons pas attendre. Nous allons amender la législation pour nous permettre de rendre justice rapidement», a déclaré Sissi dans une allocution à la télévision égyptienne, durant les funérailles du procureur. Une annonce qui augure de lendemains difficile. La situation inquiète déjà les organisations des droits de l'Homme. L'Egypte est devenue «un Etat tout-répressif», avec plus de 41 000 personnes arrêtées depuis 2013, dont de nombreux jeunes militants, a d'ailleurs accusé Amnesty International, dénonçant le «silence de la communauté internationale». Dans son rapport publié à quelques jours du deuxième anniversaire de la destitution du président Mohamed Morsi, l'ONG, basée à Londres, affirme que le pouvoir du président Abdel Fattah al-Sissi cherche à «tuer dans l'œuf toute future menace à son autorité». «Les manifestations de masse ont été remplacées par des arrestations de masse» et «des jeunes militants croupissent derrière des barreaux, témoignant que l'Etat a régressé, pour devenir un Etat tout-répressif», affirme l'ONG. Amnesty évoque «plus de 41 000 personnes arrêtées, inculpées de crimes ou condamnées après des procès injustes». La sortie d'Amnesty n'a pas été du gout des autorités égyptiennes. Le ministère des Affaires étrangères a aussitôt dénoncé le «manque d'objectivité» et «la politique de deux poids, deux mesures» de l'organisation internationale, accusant notamment Amnesty «d'ignorer délibérément» les grâces présidentielles plusieurs fois accordées à «des centaines de jeunes». Dans son rapport, Amnesty indique que les autorités ont mené une nouvelle vague d'arrestations mi-2015, avec au moins 160 personnes en état de «disparition forcée». L'ONG rappelle que la répression qui a débuté contre les Frères musulmans en juillet 2013, en même temps que la destitution d'un président élu Morsi, a touché toutes les tendances politiques du pays. «L'Egypte emprisonne des militants pacifiques tandis que la communauté internationale regarde de l'autre côté. Il y a un silence des Etats, un silence des dirigeants du monde et un silence du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU», dénonce Amnesty. L'ONG dénonce la duplicité des alliés, notamment occidentaux, de l'Egypte empêtrés dans «une course à des activités commerciales lucratives» avec notamment des «ventes et transferts d'équipements policiers pouvant faciliter» les dérives. Morsi, premier président élu démocratiquement en Egypte, a été destitué par l'armée le 3 juillet 2013, après des manifestations réclamant son départ. Les nouvelles autorités ont ensuite lancé une répression sanglante, avec plus de 1 400 personnes militants où proches des Frères musulmans tués dans les semaines suivantes. Cette répression s'est ensuite élargie aux autres tendances politiques qui ont mené la révolte de Tahrir de 2011 qui a vu la chute de Hosni Moubarak. Pour beaucoup d'observateurs le nouveau régime en Egypte semble plus autoritaire que celui décrié de Moubarak. M. B./Agences