Le monde entier est d'accord pour l'émergence d'«un nouvel ordre mondial». Le Forum de Davos n'a fait que confirmer ce qui se tramait déjà depuis quelques mois. La crise financière a contraint, en effet, les pays du monde entier à revoir leur copie. Mais les choses n'avancent pas au rythme voulu. Tout le monde s'est mis d'accord mais comment donner naissance à cet ordre qui, semble-t-il, commence à germer uniquement dans les laboratoires des puissances économiques. Ainsi, au moment où la chancelière allemande Angela Merkel propose la constitution d'un conseil économique des Nations unies afin de superviser la coordination internationale des affaires économiques, plusieurs autres puissances et même des pays émergents s'insurgent contre ce qu'ils appellent le protectionnisme. De nombreux responsables montent au créneau et dénoncent les mesures de protectionnisme économique prises à travers le monde pour faire face à la crise économique. Les dirigeants présents à Davos n'ont pas lésiné sur les moyens, multipliant les appels en faveur du libre-échange, alors que la tentation protectionniste se fait de plus en plus pressante. Entre un nouvel ordre mondial et des mesures de protectionnisme de plus en plus apparentes, le fossé s'élargit au fur et à mesure que la crise gagne du terrain. Hier, les Etats-Unis, accusés d'opter pour un protectionnisme à outrance, ont cédé devant le poids de la menace des pays partenaires. Ils ont décidé en fait de réexaminer une clause protectionniste contenue dans le plan de relance de l'économie américaine, laquelle prévoyait de protéger les sidérurgistes nationaux contre les importations d'acier étranger. Ce qui a poussé Bruxelles à parler de la possibilité de porter plainte contre les Etats-Unis auprès de l'Organisation mondiale du commerce si cette mesure était adoptée par le Congrès. Cette décision de réexaminer cette mesure a été accueillie favorablement notamment par l'Inde, estimant que «c'est une avancée formidable». Outre les mesures protectionnistes qui semblent pulluler de par le monde, le nouvel ordre mondial aussi attend son heure de gloire. Certains voient même dans la tenue du Forum l'accouchement «difficile d'un nouvel ordre mondial», selon les propos du Premier Ministre britannique Gordon Brown, qui estime que la crise a placé le monde devant le choix suivant : «Nous pouvons être tentés de laisser cette crise être le signal du début de retrait de la mondialisation.» «Comme certains le veulent nous pouvons fermer nos marchés -aux capitaux, aux services financiers, au commerce et à la main-d'œuvre- et ainsi réduire les risques de la mondialisation», a-t-il poursuivi. «Mais cela réduirait la croissance mondiale, nous priverait des bénéfices du commerce mondial et acculerait des millions de gens à la pauvreté.» Concrètement, la réponse vient de la chancelière allemande Angela Merkel qui propose la constitution d'un conseil économique des Nations unies, expliquant que cet organisme sera à l'image du Conseil de sécurité. En attendant des décisions concrètes, le Forum de Davos pourrait au moins préparer le terrain pour la prochaine réunion du G20 qui se tiendra en avril prochain à Londres. S. B.