Même si les signaux sont de plus en plus au vert à propos de la reprise économique, le sommet de Davos (Suisse), de cette année, est fortement critiqué, car il n'a pas su prévoir, selon les spécialistes, le krach financier de 2008. En effet, le Forum économique mondial de Davos, qui célèbre cette année son quarantième anniversaire, même avec un thème qui a servi de fil conducteur aux débats, à savoir «améliorer l'état de la planète, repenser, remodeler et reconstruire», n'a pas échappé aux reproches des détracteurs de l'événement qui ont déjà crié au gâchis financier. Face à ces sceptiques, les organisateurs de Davos, son président Klaus Schwab en tête, ont défendu bec et ongles, le principe d'un forum économique planétaire. Pour ces derniers, il s'agit bel et bien d'une «rencontre» entre acteurs économiques, politiques et sociaux afin, de «mieux gérer les conséquences de la mondialisation». Pour les spécialistes en la matière, le Forum de Davos a fermé ses portes dans une ambiance loin d'être euphorique car si la croissance est bien repartie, les problèmes budgétaires de certains Etats, comme la Grèce, suscitent beaucoup d'inquiétudes tandis que la réforme bancaire continue de diviser.Le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, a même prévenu que le rétablissement des finances publiques serait l'un des principaux problèmes pour l'économie mondiale dans les années à venir indiquent les agences de presse. «Le problème de la stabilité budgétaire va être l'un des plus gros problèmes, peut-être le plus gros problème des années à venir», a-t-il déclaré. Pis, il a jeté, selon certains analystes, un véritable pavé dans la marre en indiquant : «Nous allons être confrontés [à ce problème] pendant cinq, six ou sept ans, selon les pays». Le motif ? DSK l'explique par le fait que les Etats se sont endettés pour sortir leurs économies de la récession, mais doivent maintenant se préparer à revenir sur les mesures exceptionnelles et coûteuses mises en place. Ce processus sera très délicat car si cela est fait trop rapidement, cela pourrait replonger l'économie dans la récession. Si pour la majorité des participants, la nécessité d'une gestion de l'après-crise économique mondiale par des mécanismes financiers et économiques devant éloigner à jamais le spectre d'un retour à la case départ a été mise en exergue le week-end dernier, durant le Forum, banquiers et politiques se sont opposés sur le thème de la régulation bancaire mis en avant la semaine dernière de manière spectaculaire par le président Obama, qui a annoncé vouloir réduire la taille des banques et les empêcher de mélanger l'activité de banque de dépôts et certaines opérations sur les marchés financiers. Le président français Nicolas Sarkozy a enfoncé le clou, mercredi dernier lors du discours inaugural, en dénonçant les dérives du capitalisme financier et «des comportements indécents qui ne seront plus tolérés par l'opinion publique».Face à cette offensive, les nombreux banquiers présents à Davos ont multiplié les mises en garde contre une réglementation trop stricte qui réduirait leur marge de manœuvre et les empêcherait, selon eux, de financer l'économie. Dans le même débat, Joseph Ackermann, patron de la Deutsche Bank, a reconnu la nécessité d'une réforme mais a mis en garde contre un assèchement du crédit. «Nous savons tous que quelque chose doit être faite pour restaurer la confiance mais il faut absolument une harmonisation au niveau mondial des réglementations et de la fiscalité», a-t-il dit. Le P-DG du FMI, dont l'organisation vient de relever ses prévisions de croissance pour le monde à 3,9%, s'est, lui, montré prudent comme beaucoup d'intervenants depuis le début du Forum. «Les nouvelles sont meilleures, la croissance revient plus vite et plus tôt que prévu mais il faut garder à l'esprit que cette croissance est encore fragile car une grande partie est soutenue par les fonds publics et la demande privée est encore faible», a-t-il expliqué. Même son de cloche chez le conseiller économique du président américain, Lawrence Summers, qui s'est dit «perturbé par le niveau de l'emploi». En sus de ces déclarations prudentes, plusieurs ministres des Finances, banquiers centraux et banquiers privés se sont réunis en aparté, avant-hier, pour discuter notamment de la régulation du secteur financier projetée par plusieurs gouvernements occidentaux. Au chapitre des conclusions, celle du président du Forum de Davos est des plus remarquables : «Le chômage sera en hausse et […] les gouvernements devront faire face à une crise sociale», a-t-il affirmé. Une analyse qui laisse perplexes certains acteurs de l'économie mondiale présents à cette rencontre qui feront remarquer que la crise est «déjà sociale», comme le signifiera Richard Attias. Ce dernier, après avoir organisé durant longtemps le sommet de Davos, se lance actuellement dans l'organisation d'un nouveau forum économique, qui se tiendra en juin prochain à New York. Une alternative qui pourrait plaire aux déçus de Davos… S. B.