Photo : APS Entretien réalisé par Salah Benreguia LA TRIBUNE : Quel regard portez-vous sur cette rencontre tenue la semaine dernière entre les hommes d'affaires brésiliens et leurs homologues algériens ? Sergio França Danese : Nous avons préparé cette rencontre avec plusieurs objectifs. Le premier consiste à mieux faire connaître le Brésil aux hommes d'affaires et politiques algériens pour leur montrer que notre pays peut être un bon partenaire aussi bien pour les opérateurs économiques algériens que pour les dirigeants de ce pays, et ce, dans plusieurs domaines. Le deuxième est de mettre en contact direct nos hommes d'affaires avec leurs homologues algériens. Pour cela, une importante mission, composée de 96 opérateurs brésiliens exerçant dans plusieurs secteurs d'activité, est venue spécialement pour cette rencontre. Les secteurs représentés sont : l'industrie automobile, les machines, le textile, les chaussures et la défense. Donc, amener avec le ministre de Développement du commerce extérieur un bon échantillon pour essayer d'encourager ce partenariat qui existait déjà. Quels sont les secteurs qui intéressent beaucoup plus les hommes d'affaires brésiliens ? L'Algérie est un bon marché pour le Brésil. On a atteint, l'année dernière, pas moins de 3 milliards de dollars dans le commerce bilatéral. C'est un marché où nous avons, évidemment, un déficit commercial énorme, et nous essayons, non de le neutraliser, mais d'améliorer notre position dans les secteurs que nous maîtrisons. Nous avons des entreprises brésiliennes qui exercent ici, et nous en cherchons d'autres. Nous avons une grande entreprise brésilienne qui construit de grandes remorques routières, de qualité très compétitive, ce qui est un bon partenariat avec Cevital. Je pense que nous allons le renforcer de plus en plus. C'est pour cette raison que ces investisseurs sont venus prospecter ; je pense qu'il existe des hommes d'affaires qui ont de bons rapports avec leurs homologues algériens. Il y a également ceux qui ne connaissent pas du tout l'Algérie, d'où cette visite. Par le nombre d'opérateurs algériens qui ont participé à cette rencontre, au nombre de 110, selon nos registres, il y a eu plusieurs rencontres et certainement des discussions qui ont été couronnées par des contrats. Est-ce que le fait de visiter l'Algérie avant la Tunisie et le Maroc signifie que le Brésil accorde un intérêt particulier à notre pays ? Je pense que l'intérêt particulier réside dans la longueur de cette visite. C'est vrai qu'ils ont été en Libye avant l'Algérie, mais je pense que la délégation est quand même restée deux jours dans votre pays. Une période durant laquelle notre ministre a eu plusieurs entretiens très fructueux avec sept ministres algériens. Une rencontre avec le Premier ministre Ouyahia a eu lieu durant laquelle il lui a remis une lettre du Président Lula pour son homologue algérien. Notre ministre s'est également entretenu quatre fois avec le ministre du Commerce Djaaboub. C'est dire que cette rencontre a permis aux hommes d'affaires brésiliens d'avoir des entrevues très ponctuelles, mais aussi de renouveler les contacts avec les responsables algériens. Je pense, en somme, que les entretiens sont très fructueux entre les deux parties. Il est important de dire dans ce sens que le ministre brésilien, en sus des hommes d'affaires qui l'ont accompagné, a fait venir des hauts responsables notamment ceux qui travaillent dans son département. Il s'agit, entre autres, du président de l'Agence brésilienne pour le développement industriel, du premier responsable de l'Institut national de la métrologie et de la certification, un représentant de la Banque nationale du développement économique et social et un représentant de l'Agence brésilienne de promotion des exportations. On a établi des domaines bien définis sur lesquels des missions vont être organisées à court terme, soit en Algérie soit au Brésil, pour traiter certains points très précis. Il s'agit de l'industrie automobile et de l'industrie des pièces de rechange automobiles où nous avons une bonne et longue expérience. Il y a également une coopération très concrète dans la métrologie et la certification. Enfin, nous sommes en train de travailler sur le financement en matière de développement, car nous possédons une grande banque de développement économique et social, qui a plus de 40 ans d'existence. Elle possède un portefeuille annuel de 50 milliards de dollars. Dans ce sens nous sommes prêts à partager avec l'Algérie notre expérience. Le 4e domaine concerne la recherche agricole. Là aussi, nous avons des entreprises brésiliennes qui exercent dans ce domaine. L'Algérie affiche un grand intérêt dans ce sens, notamment pour le développement de l'industrie du lait, les abattoirs, les céréales et le fonctionnement génétique du bétail. Donc, ce sont, là, des domaines sur lesquels nous pouvons coopérer toute de suite. Ne pensez-vous pas que pour mieux concrétiser ces relations d'affaires, il faudrait avoir également une ligne aérienne directe qui relierait l'Algérie au Brésil ? Non, pour l'instant. Une ligne aérienne vient à une certaine étape d'un processus. Elle doit répondre à une certaine demande présente. Les liens entre les deux pays se développent davantage, et il suffit seulement voir le nombre de visas d'affaires qui connaît ces derniers temps une courbe ascendante. Il ne faut pas se faire d'illusions, mais plutôt travailler avec beaucoup de réalisme. Il faut savoir que nous avons une communauté brésilienne en Algérie très réduite, et vice versa (60 Brésiliens en Algérie et 80 Algériens au Brésil). Dans votre pays, nous avons, certes, une communauté brésilienne qui s'accroît et cela est dû aux entreprises qui activent ici. Sur ce point, il faut dire que nous avons une tradition qui consiste en ce que les entreprises brésiliennes travaillent avec la main-d'œuvre locale du pays où elles exercent. C'est une chose qu'on a faite en Angola et ailleurs. Mais la communauté brésilienne va doubler de nombre sans aucun doute. Toutefois, à certains moments, si les affaires arrivent à un certain degré, cela peut se faire. Là, c'est quelque chose qui doit répondre à un intérêt très particulier. En économie, ce ne sont pas des formules magiques. Nous travaillons sur des choses très concrètes. D'où la mission de cette semaine, qui veut montrer aux Algériens que le Brésil peut être un bon choix, et que ce dernier doit être conscient. Il faut savoir que le Brésil est très connu en Algérie, mais on veut dépasser le stade du football qui est, d'ailleurs, notre plus grand ambassadeur. Mais pour les économistes, il faut connaître le Brésil, notamment par des visites.