Un site web dédié au patrimoine culturel algérien. C'est assurément une bonne initiative qui mérite d'être encouragée et de se faire connaître. En tapant l'adresse «patrimoineculturelalgerien.com» (on aurait pu penser à un nom plus court !), on se retrouve sur la page d'accueil à partir de laquelle on peut aller à la découverte de la musique andalouse, de la littérature, l'artisanat et bien d'autres pans du patrimoine national aussi riche que varié. Patrimoine matériel et immatériel sont listés. Les concepteurs de ce portail de recherche élaboré sous l'égide du ministère de la Culture, ont estimé utile d'étrenner le site par le patrimoine relatif à la musique andalouse, avec les trois écoles qui composent ce genre musical, Alger, Constantine et Tlemcen. Cinéma, théâtre, livres, poésie, musées ont leur place sur ce site arrangés en rubriques pour le large public, qu'il soit spécialisé, féru du domaine ou néophyte. C'est un travail colossal qui a nécessité plusieurs années de recherches, numérisation et classifications pour concevoir cette encyclopédie disponible en un clic. Mais on relèvera que le patrimoine national s'étend à d'autres richesses qui pour l'heure n'ont pas été listées sur ce portail. On pourrait mettre ça sur le compte de la nouveauté. C'est un début, et cette initiative toute fraîche est appelée à connaître une consolidation et un enrichissement, progressivement, à mesure que parviennent de nouvelles données inhérentes à un domaine ou un autre. Mais il ne s'agit pas là d'une petite omission. Ce n'est pas le petit outil d'un métier artisanal ou la date exacte de la tenue d'un maoussem qu'on a oublié, mais tout un pan du patrimoine immatériel qui constitue l'identité du pays : l'art gastronomique, ou plus prosaïquement la cuisine du terroir, plutôt les cuisines des terroirs, tant il y a de plats identifiant chaque région d'Algérie. «La cuisine algérienne est complexe et complète, qui se caractérise par sa diversité et sa richesse culturelle. A l'époque, c'est un art transmis de mère en fille. Aujourd'hui, la gastronomie algérienne est devenue une discipline très célèbre, enseignée dans les grandes écoles hôtelières», indique une synthèse qu'on a retrouvée sur un site spécialisé. Aussi, ne peut-on que s'étonner de l'absence totale d'une rubrique dédiée à l'art culinaire sur ce site qui est censé présenter un aperçu global du patrimoine matériel et immatériel de l'Algérie. Pourtant, beaucoup de plats traditionnels algériens ont conquis les papilles gustatives de gourmets aux quatre coins du monde. «Le label culinaire national est une valeur sûre qui doit figurer dans le patrimoine», atteste un spécialiste. Tout en soutenant le propos, d'autres observateurs pointent du doigt «la floraison ces dernières années de divers ouvrages en la matière, qui désorientent la plupart des cuisiniers ou cuisinières initiés. Dans des salons du livre, on est devant des centaines d'ouvrages qui traitent de la gastronomie algérienne en générale, surtout celle spécifique à chaque région (Est, Centre et Ouest). Mais pour y trouver la recette la plus appropriée et la plus précise cela reste difficile». «Le couscous de Mila et celui de Constantine diffèrent sur un détail. Il en est de même pour les autres plats dans d'autres localités», arguent-ils. Plus loin, ils estiment que la notion du chef, quasi absente des cercles «académiques» de l'art culinaire, ne prend place que dans des circuits «figés» de fêtes où les fantaisies agrémentent abusivement les assiettes. Le recours à des séminaires avec le concours et l'appui de «spécialistes», qui ne sont pas des diplômés d'une grande école mais plutôt des grand-mères qui ont hérité de recettes de leurs mères, elles-mêmes l'ayant reçues des leurs, et des chercheurs en la matière, reste une étape préliminaire importante pour recueillir le patrimoine gastronomique apte à recevoir la «griffe» patrimoine de l'Algérie et qui s'ajoutera aux autres rubriques du site web suscité. Tout comme le domaine musical, la gastronomie algérienne l'une des plus réputées au monde est variée et nécessite autant de considérations. Elle rassemble des spécialités berbères, turques, maghrébines… avec en tête le couscous, qui demeure le met le plus connu et prisé à l'étranger. Il faut faire vite pour le «labelliser», comme l'ont fait nos voisins marocains, et on aura ainsi les couscous d'Algérie (parce qu'il y en a plusieurs) et le couscous marocain ! Parallèlement, il faudra également mettre en place les critères de préparation et de présentation des chefs-d'œuvre culinaire. Quand on parle de patrimoine, on parle forcément d'origine, de pureté et de respect des normes. Des critères ancestraux délimitent la confusion. Des balises déjà connues et qu'il faudra simplement perpétuer peuvent servir de bases de données une fois que le portail du patrimoine daignera d'élargir ses rubriques à ce pan patrimonial qui complètera l'identité culturelle de l'Algérie. N. H.