Avec l'amenuisement à grande vitesse des recettes extérieures du pays, l'Algérie est tenue de réduire ses dépenses et de rationaliser ses budgets. Et une des enveloppes budgétaires qui pèsent sur le Trésor public est indéniablement celle réservée aux subventions. Economistes et experts s'accordent sur la nécessité pour l'Algérie de revoir sa politique de subvention. Le Fonds monétaire international (FMI) rejoint cette position. Dans son dernier rapport, l'institution de Breton Woods recommande à l'Algérie de procéder en urgence à la réforme des subventions. Dès lors, la question est de savoir si les pouvoirs publics sont prêts à s'engager dans l'immédiat dans cette démarche et surtout de quelle manière. La situation financière du pays n'est guère reluisant, ce qui ouvre ainsi le débat sur la lancinante question du maintien ou non de la politique des subventions. Un épineux problème qui se pose avec beaucoup d'acuité mais auquel il faudra vite trouver une solution. C'est d'autant plus fort indiqué dans la mesure où les réserves ont diminué de 35 milliards de dollars, terminant l'année 2015 à 143 milliards de dollars et que le FRR s'est vu puisé à hauteur de 80% sur les 10 premiers mois de l'année écoulée, n'accumulant que 255,95 milliards de dinars. Ajoutons à ce descriptif que l'ensemble des transferts sociaux s'élevait en 2014 à 29%. Du coup les pouvoirs publics se retrouvent devant une équation difficile à résoudre. Qu'on en juge : les recettes extérieures du pays dont dépend à 90% le pays n'en finissent pas de s'amoindrir depuis plus d'un an suite à la baisse du prix du baril alors que les subventions ont coûté à l'Etat environ 2 293 milliards de dinars (presque 23 milliards de dollars) en 2015. Pour le détail les subventions énergétiques, à elles seules, ont représenté plus de la moitié de ce montant, suivies par des subventions au logement, la nourriture et aux taux d'intérêts, pour les prêts immobiliers notamment. Tout cela correspond à 13,6% du PIB, l'égal de deux fois les budgets combinés des ministères de la Santé et de l'Education nationale ou aux trois quarts du total de l'investissement public. Comme il faut savoir au passage que l'enveloppe allouée aux transferts sociaux de l'Etat a explosé ces dernières années. Toujours dans cet ordre d'idées, des études menées par des économistes rapportent que les transferts sociaux budgétisés ont été multipliés par 7,5 entre 1999 et 2012, passant de 254 milliards de dinars à 1 863 milliards de dinars en 2012, soit 10% du PIB dont un quart consacré aux aides aux ménages. Les subventions aux prix du lait et des céréales représentaient 50% de ces aides aux ménages en 2014. Les aides aux ménages sont passées de 54 milliards de dinars à 424 milliards de dinars en 2012, soit une augmentation de 342%, selon les études. Cela sans compter les subventions implicites. Cet état des lieux ne peut laisser indifférent car il suscite de l'inquiétude. Et partant «l'Etat va devoir abandonné son rôle social car il le rend de plus en plus mal à l'aise», c'est du moins l'avis de nombreux experts financier. Autant dire aussi sans embage que la situation financière risque de devenir des plus critiques à moins que les pouvoirs publics décident de mesures qui puissent épargner de douloureuses conséquences sur le plan économique et social du pays. Sur ce dernier point, nul doute que le gouvernement va devoir accélérer la diminution des subventions. Et non plus progressivement comme il en avait décidé auparavant. Pour l'heure, les carburants et l'électricité sont les seuls concernés, mais ils ne seront certainement pas les derniers. Les responsables du secteur de l'eau ont déjà laissé entendre que les prix iront inévitablement vers la hausse. Il pourrait en être également le cas pour les produits alimentaires de première nécessité. Dans cette perspective, le ministre des Finances s'est donné deux ans à partir de 2015 pour mener à bien ce processus qui pourrait creuser les inégalités et faire basculer beaucoup de familles dans la pauvreté s'il n'était pas accompagné d'un autre type de soutien plus direct et ciblé en vers les couches de la société les plus vulnérables. Toujours est-il, le gouvernement est appelé à prendre les décisions qui s'imposent : celles de s'orienter au plus vite vers une vérité des prix. Cela devient d'autant plus inévitable quand on sait que les recettes extérieures du pays vont encore rester en chute libre. Réforme des subventions telles que préconisées par le FMI Devant un tel scénario, la seule alternative qui soit offerte aux décideurs est d'agir sans atermoiements sur les dépenses et pour lesquels gouvernement et citoyen doivent chacun de leur côté s'y atteler. Une option que conseille le FMI à l'Algérie dans un document intitulé «La réforme des subventions en Algérie». En effet, le FMI préconise dans un contexte de réduction des recettes budgétaires, que le gouvernement passe progressivement du système actuel de subventions universelles sur les biens et services à un programme de transferts ciblés aux ménages à faible revenu. Pour ce faire, il (ndlr : le FMI) recommande à ce que les hausses de prix devraient être étalées dans le temps et varient selon le produit. Ainsi d'après le FMI, les subventions les plus coûteuses devraient être abordées en premier «à condition que le gouvernement mette en œuvre des mesures d'atténuation pour protéger les pauvres. Une démarche que partage la partie algérienne mais elle attend que les études de la Banque mondiale entamées en 2013 sur l'incidence de ces réformes lui parviennent pour qu'elle passe à l'acte. Pour l'heure, et comme le conseillent vivement des experts financiers, il faudra vite mener une lutte contre la débauche dépensière qui s'est installée pour des raisons connues. Il s'agira donc dans ce sens de commencer par réduire les dépenses notamment celles qui sont superflues et d'autres qui font mal aux yeux. C'est le cas du pain et les dérivés de la semoule. En effet, le paradoxe de leur accessibilité en a fait les contenus habituels des poubelles. Les pics de ce gaspillage généralisé sont particulièrement observés au mois de piété que suppose le Ramadan où les artisans boulangers affirment que pour la première semaine de jeûne de l'année dernière, plus de 50 000 000 de baguettes de pains ont été jetées au rebut. Pour l'heure, il est admis que l'Etat n'est plus en mesure de répondre à la demande globale. C'est pourquoi tout le problème est de savoir si le gouvernement va prendre en considération les dernières recommandations du FMI et autres experts financiers pour amorcer une nouvelle feuille de route dans sa politique de subvention. On le saura peut-être quand sera rendu public le nouveau modèle économique que compte mettre en place dans les prochains mois le Premier ministre Abdelmalek Sellal. Z. A.