Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Comparativement au nombre impressionnant de bidonvilles à Constantine, le centre de transit Sotraco pourrait bien faire l'objet d'un transfert bien avant la multiplication des taudis qui ralentissent incontestablement la résorption de l'habitat précaire. Le mal est profond, attestent les décideurs locaux qui tentent de gérer un legs empoisonné laissé par leurs prédécesseurs. Constantine n'aura pas été nettoyée de toute sa précarité en dépit du soutien indéfectible que lui confère la haute sphère des décideurs. Y a-t-il anguille sous roche dans la procédure d'éradication ? Ce que l'on observe sur le terrain vient apporter des réponses, on ne peut plus claires, sur le nombre croissant de baraquements, quoique les pouvoirs publics s'attellent à minimiser son ampleur en «recasant» autant de familles sinistrées ou concernées par une expropriation, justifiant ainsi d'utilité publique le terrain squatté. Constantine occupe de multiples facettes dans son tissu urbanistique. Entourée de bidonvilles, comme l'ont sans doute constaté tous ceux ayant foulé le sol de la capitale de l'Est, cette caractéristique a vraiment la peau dure. Sinon comment expliquer les latences enregistrées dans le relogement et l'éradication de tous ces taudis éparpillés à travers la circonscription qui viennent entacher, voire fausser le décor d'une métropole en pleine mutation de par ses grands projets structurants. Un lourd héritage, légué depuis les années 1960, ne parvient toujours pas à rendre l'âme en faveur d'une urbanisation moderniste, sans anarchie, à l'image de la majorité des villes du pays, comme Sétif par exemple. Selon le dernier recensement établi peu avant l'année 2009, la ville des Ponts compte près de 7 000 habitations précaires et plus de 40 cités construites en contradiction avec la réglementation, sans études d'impact, pénalisant ainsi les propriétaires fonciers, le tout avec une passivité permissive de la municipalité, qui a du mal à récupérer ses biens… La commune de Constantine se taille la part du lion dans ce décompte avec 4 900 bidonvilles. «C'est une plaie profonde», reconnaît le nouveau chef de daïra fraichement installé, M. Yamani en l'occurrence, et de soutenir : «Les budgets destinés à la construction de logements auraient été alloués à d'autres projets. Désormais, il ne sera plus question de tolérer les habitations illicites, sous toutes leurs formes de prolifération. Pour ce faire l'état apportera des mesures restrictives et coercitives qui s'imposent à l'encontre des réfractaires.» Sous un autre angle, le responsable prône comme solution l'occupation immédiate du site vidé sous peine de le voir réexporter par des opportunistes du « préfabriqué». On se rappelle de l'évacuation du terrain Tenoudji, lequel est resté sans exploitation alors que l'on projetait la construction d'un centre des arts et métiers. Mais cela est un autre débat. Inéluctablement, c'est un mal qu'il faut extraire à travers un programme progressif d'éradication. Fedj Errih, Oued El Had, Boumerzoug, Ghemmas, ces cités se partagent les bidonvilles depuis des décennies. Ainsi, ils ne seront pas recasés d'ici demain. La demande est plus importante que l'offre. Cela s'explique désormais par les besoins de la cité, à l'horizon 2013, qui nécessite plus de 17 000 logements pour éradiquer l'habitat précaire. Un pari difficile, lorsque l'on sait que les 5 000 logements prévus dans le dernier programme aura eu du mal à se dessiner. La disproportion est alarmante ! D'autant que le planning s'articule autour de trois types d'actions essentielles. Résorption de l'habitat précaire (RHB), des bidonvilles et des centres de transit. Chaque quota permettra de résorber une partie de ce genre de populations, néanmoins ce sont les personnes se trouvant dans le droit absolu de bénéficier d'un logement demeurent dans l'expectative, en dépit de leur nombre peu important par rapport à celui enregistré dans les précédents recensements. Cette nuance est bien constatée chez les 700 familles du centre de transit Sotraco. Leur nombre n'était pas aussi important il y a quelques années de cela. Le laisser-aller aura multiplié leur nombre et du coup rendu leur recasement difficile. Aussi, il est important d'évoquer les résidents de Aouinet El Foul, dont le transfert tarde à se réaliser, comme ceux de la vieille ville. Toute cette catégorie, bien qu'elle soit «gérable», dans la mesure où elle occupe une infime partie du programme, elle se trouve dans une situation «dangereuse» du fait du problème de glissement de terrain qui la menace. «En considération de cette situation, nous devrions dire que le mal est profond», estime le chef de daïra, qui semble désemparé par l'ampleur du retard cumulé depuis des années. «On ne peut mélanger les priorités, chaque catégorie concernée par un éventuel recasement devra attendre son tour… cela est tributaire de la réalisation de logements à la nouvelle ville Ali Mendjeli et Massinissa, deux sites prévus à cet effet», devait expliquer M.Yamani, indiquant que «le programme 2009 relatif à l'habitat sera lancé incessamment afin de mener le combat contre la précarité. C'est le wali qui l'a annoncé au cours d'un briefing». Pour sa part, le chef de l'exécutif nous fera part d'une lutte sans merci pour mettre le holà à la bidonvilisation de la ville. «Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour débarrasser la ville de Constantine de ce phénomène auquel elle fait face.» Mais une hirondelle ne fait pas le printemps sans un suivi rigoureux de tous les services concernés par le recensement des populations et la répercussion en matière de sanctions à l'égard des occupants des illégaux du domaine public. Malheureusement, le programme quinquennal 2005-2009 s'achève en queue de poisson puisque des familles se retrouvent toujours sans toit ! Auxquelles s'ajoutent celles qui demeurent dans l'expectative depuis longtemps, faute «d'un coup de pouce» parfois utile pour aiguillonner les différentes commissions à avaliser leur requête. Quand le social (avec ses 86 000 demandes de logement dans la seule commune de Constantine) se mêle à l'éradication des constructions illicites et le transfert imminent des autres franges susmentionnées, c'est une problématique qui interpelle autant d'acteurs pour la solutionner. Franchement, le bout du tunnel n'est pas pour bientôt… si un recensement efficace des familles à reloger n'est pas entrepris à une cadence élevée.