L'Autorité de régulation de l'audiovisuel (Arav) installée sous la présidence de Zouaoui Benhamadi et le cahier des charges élaboré par le gouvernement adopté, le ministère de la Communication a adressé, hier, une «dernière» mise en demeure aux chaînes de télévision privées qui exercent dans l'illégalité. Chargé par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, de «mettre fin à l'anarchie qui règne dans le secteur de l'audiovisuel» et de «fermer les chaînes privées non agréées», le premier responsable du département de la Communication, Hamid Grine, passe à la vitesse supérieure, en pressant les chaînes dont l'exercice actuel «relève de l'informel», de se conformer aux textes de loi en vigueur. «Le ministère de la Communication a mis en demeure mardi, pour la dernière fois, les chaînes de télévision exploitant un service de communication audiovisuel de manière illégale en Algérie, en infraction des dispositions législatives et réglementaires applicables en la matière», a rapporté hier l'APS. La même dépêche APS indique que «le ministère a justifié sa décision en soutenant qu'il avait agi dans le respect total de la législation et de la réglementation en vigueur et conformément aux missions et attributions qui lui sont dévolues, particulièrement celle relative à la régulation des activités de communication et celle relative à la promotion d'une information plurielle, responsable et objective». Aussi, le ministère «a rappelé que toute activité de communication doit être exercée, sur le territoire national, dans le respect strict des dispositions législatives et réglementaires y afférentes et qu'il veillera, chaque fois qu'il est nécessaire, à l'application de la loi dans toute sa rigueur contre tout contrevenant». La même dépêche précise que «le ministère de la Communication a adressé cette mise en demeure en application de ses attributions fixées par le décret exécutif n° 11-216». Le mois de mai dernier, lorsque le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, évoquait l'instruction donnée au ministre de la Communication de mettre de l'ordre dans le secteur de l'audiovisuel, il a affirmé qu'une soixantaine de chaînes, domiciliés à l'étranger, émettent en Algérie. Le nombre exact est de «45 chaînes off-shore existantes», selon Grine qui souligne que «seulement 5 de ces chaînes de droit étranger émettaient de manière légale et ont des bureaux agréés en Algérie». En fait, les chaînes agréées sont au nombre de 4, la cinquième ayant fermé pour d'autres raisons. Les quatre chaînes agréées sont En Nahar TV, Echourouk TV, Dzaïr TV et El Djazaïria. Toutes les autres sont parfois tolérées mais pas du tout autorisées. Certaines sont même sévèrement critiquées pour le contenu de leurs programmes et sont accusées de «diffamation» et de «chantage». Pire, «d'appels à la violence et à la fitna». Ces «actes seront fermement combattus et sanctionnés» a prévenu Sellal lors de la cérémonie d'installation des 9 membres de l'Autorité de régulation de l'audiovisuel (Arav), la semaine dernière. Et le même responsable de poursuivre sur un même ton ferme: «La loi sera appliquée dans toute sa rigueur.» De son côté, le ministre Grine, en avril dernier, a affirmé qu'aucune chaîne de télévision ou de radio «ne pouvait être créée sans l'accord des autorités». Pour le représentant du gouvernement, «la tolérance de l'Etat a des lignes rouges qu'il ne faut pas franchir». A certaines de ces chaînes privées, il est aussi fait le reproche, pour ne pas dire l'accusation claire du gouvernement, de pirater des films et des productions artistiques. L'Office national des droits d'auteur (Onda) s'en est plaint plusieurs fois. «L'on doit reconnaître que certaines chaînes de télévision pratiquent la publicité mensongère, la manipulation, l'humiliation. Cela peut créer un déséquilibre dans la société algérienne, provoquer la fitna et favoriser le régionalisme», a encore affirmé récemment le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Et de poursuivre : «Les valeurs et les principes de la société algérienne sont des lignes rouges.» Pour rappel, ce n'est pas la première fois que le département de la Communication et/ou l'équipe de l'Arav, même au temps de Miloud Chorfi qui était son président avant qu'il ne soit désigné sénateur du tiers présidentiel, interpellent, de manière officielle ou non, des responsables de chaînes de télévision privées pour leur dire de se conformer à la loi. Chorfi a même organisé une série de rencontres avec les dirigeants et des journalistes de ces chaînes, leur demandant de veiller au respect des règles d'éthique. Parfois, de manière diplomatique et parfois avec sévérité et menaces de sanctions. L'on se rappelle, à ce propos, «l'avertissement verbal» adressé à la chaîne El Djazaïria pour «dérives» dans une émission satirique. Le communiqué de l'Arav, accusait El Djazaïria de «dérives répétitives et de verser dans le sarcasme et le persiflage à l'encontre de personnes dont des symboles de l'Etat et de hauts responsables de différentes institutions de l'Etat». Une «caméra cachée» sur Echourouk TV a été aussi critiquée et sévèrement par les téléspectateurs avant les institutions, principalement les utilisateurs des réseaux sociaux. C'est l'épisode où le joueur international, Madjid Bouguerra, en était la victime de «faux terroristes» qui a suscité particulièrement l'indignation des Algériens, nombreux à l'exprimer. La chaîne El Adjwa, également, a été plusieurs fois interpellée pour sa diffusion de films et programmes piratés. Et début cette année 2016, Miloud Chorfi a convoqué des responsables d'En Nahar TV suite à la diffusion d'un entretien avec le député du FLN Tliba qui s'est attaqué ouvertement au Parti des travailleurs et à sa patronne, Louisa Hanoune. La SG du PT l'avait aussi fustigé d'une manière virulente sur la chaîne KBC. Ferme, le gouvernement poursuit dans sa démarche d'assainir tout le secteur de la communication et non seulement l'audiovisuel. A ce propos, il est à rappeler que lors d'une sortie effectuée, lundi, dans la wilaya de Tipasa, le ministre de la Communication, Hamid Grine, a affirmé que l'ère où la presse écrite s'appuyait sur la publicité publique est révolue : «L'époque où les dossiers d'agrément des journaux étaient accompagnés de la recherche d'une convention avec une agence de publicité pour lui accorder trois pages est bien révolue.» La prospérité financière, poursuivra Grine, «est bien finie. C'est pour cela que nous n'accordons plus d'agrément à de nouveaux titres en quête de richesse grâce à des pages de publicité et loin du travail professionnel bien fait». Par ailleurs, lors de cette sortie à Tipasa, Grine a annoncé une possible installation, en septembre prochain, de l'Autorité de régulation de la presse écrite, après celle de l'Audiovisuel (Arav), la semaine dernière. K. M.