La realpolitik semble avoir pris le pas sur la posture antérieure de la Turquie dans le conflit syrien qui la concerne directement. Un processus graduel, mais apparent semble entamé pour changer le fusil d'épaule. Le Premier ministre turc, Binali Yildrim, semble avoir pour mission d'entamer et de mener ce processus. Le remplacement dans les conditions que l'on sait de son prédécesseur, Ahmet Davutoglu, semble avoir constitué l'entame d'une mutation politique d'une posture qui aura fait gravement fragilisé une Turquie qui avait misé sur une chute rapide du régime syrien. Yildrim lors de son premier discours face au Parlement notera l'inanité de la guerre en Syrie et la nécessité d'opter pour la politique «zéro problème avec les voisins» La situation en Syrie est en train de prendre un virage particulièrement crucial avec la posture graduelle de la Turquie, un des acteurs les plus importants de la tragédie syrienne. Le Premier ministre turc reconnaît que le président syrien, Bachar Al-Assad, est un acteur politique incontournable dans toute transition future en Syrie. Binali Yildirim a déclaré aussi que la Turquie s'apprêtait à s'investir dans le dossier syrien au cours des six prochains mois. Le discours du responsable turc est étonnement courtois envers Damas alors que Ankara, il y a seulement quelques mois, ne parlait du régime syrien qu'en termes d'accusations de crime et de répression. Qui aurait cru que la Turquie qui ne voulait pas entendre ne serait-ce l'idée de négociation avec le gouvernement syrien, s'arcboutant au préalable du départ de Assad, tienne ce type de discours d'ouverture envers son voisin. La realpolitik semble avoir pris le pas sur la posture antérieure de la Turquie dans ce conflit qui la concerne directement. Un processus graduel, mais apparent semble entamé pour changer le fusil d'épaule. Le Premier ministre turc, Yildrim, semble avoir pris pour mission d'entamer et de mener ce processus. Le remplacement dans les conditions que l'on sait de son prédécesseur, Ahmet Davutoglu, semble avoir constitué l'entame d'une mutation politique et le changement d'une posture qui aura gravement fragilisé une Turquie qui avait misé sur une chute rapide du régime syrien. Yildrim lors de son premier discours face au Parlement notera l'inanité de la guerre en Syrie et la nécessité d'opter pour la politique «zéro problème avec les voisins». Un certain nombre d'éléments ont particulièrement accéléré cette volte face de la Turquie. L'incident de l'avion de chasse russe abattu par les Turcs sur la frontière syrienne aura particulièrement mis Ankara dans une situation embarrassante face à une puissance incontournable dans la région : la Russie. La gestion médiatique et politique de cette affaire aura été calamiteuse pour Ankara qui ne savait point comment calmer la colère de Poutine qui exigeait des excuses et surtout préserver ses importants intérêts avec ce partenaire ombrageux. L'empressement de la Turquie à renouer avec Moscou explique l'importance pour Ankara d'avoir des relations apaisées avec la Russie. D'autant plus que la Turquie aura vécu comme une déception le manque d'entrain des alliés de l'Otan (dont elle est membre) pour la soutenir dans son face à face avec les Russes. Vient ensuite l'inévitable question kurde. Erdogan a compris que les puissances occidentales avec les Etats-Unis en tête n'hésiteront pas à appuyer les kurdes dans leur volonté d'instaurer un Etat dans la région. Une véritable hantise pour Ankara pour qui l'intégrité territoriale serait directement menacée. Arrive le coup d'Etat manqué mi-juillet directement imputé par Erdogan au prédicateur Fethullah Gulen réfugié aux Etats-Unis. Erdogan semble avoir réalisé que son pays qui aura accompli des avancées indéniables sur le plan économique s'est particulièrement fragilisé en s'engageant frontalement dans la crise syrienne contre Damas. D'autant plus que les «alliés» de l'Otan se sont caractérisés par une neutralité vécue comme une trahison par Ankara. Entre Daech et les kurdes La problématique kurde redevient ainsi prioritaire pour la Turque qui a vu une recrudescence des attentats terroristes ayant même touché Istanbul ville qui attire des millions de touristes de par le monde et qui constitue la vitrine du pays. Aujourd'hui Ankara change de discours. Notamment concernant ses deux hantises. Les kurdes et Daech. La frontière de la Turquie avec la Syrie doit être entièrement «nettoyée» du groupe Daech avait affirmé le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, après un attentat sanglant sur le sol turc, commis probablement, selon Ankara, par Daech. Un kamikaze s'est fait sauter samedi dernier lors d'une fête de mariage kurde à Gaziantep ville proche de la frontière syrienne, tuant selon un dernier bilan 54 personnes, dont un grand nombre d'enfants. L'attaque a provoqué une onde de choc en Turquie. Ankara promet de soutenir «toute opération» contre cette organisation en Syrie. L'artillerie turque n'hésite pas à pilonner depuis plusieurs jours les positions tenues par Daech à sa frontière avec la Syrie. «Nous allons lutter jusqu'au bout contre Daech et soutenir aussi le combat mené par les autres pays contre cette organisation terroriste», promet le ministre turc. Récemment l'aviation syrienne a procédé à des frappes sur des positions kurdes, pour la première fois depuis l'éclatement de la crise. Une «nouveauté» saluée par le Premier ministre turc qui a dit que «Damas a compris que les kurdes constituent également une menace pour la Syrie». La prompte réaction américaine en envoyant l'aviation US à la rescousse des Kurdes dans la région de Hassaka aura confirmé que Washington est prêt à rentrer en guerre pour protéger ses alliés kurdes. Les relations entre Ankara et les pays du Golfe dont Riyad semblent passer par une phase de froideur remarquée, d'autant que les responsables turcs regardent de plus en plus du côté de Téhéran avec l'annonce d'une importante future visite d'Erdogan en Iran. Autant d'éléments qui peuvent êtres annonciateurs d'un bouleversement des équilibres dans la guerre en Syrie. M. B.