De notre correspondant à Constantine A. Lemili Les magasins commercialisant des instruments de musique sont de retour à Constantine. Le nombre est encore restreint, trois de décomptés, selon nos investigations, mais conséquemment approvisionnées. Il faudrait préciser que l'éventail n'est pas énorme sauf qu'il semble répondre à la demande sinon aux choix restreints de la clientèle majoritairement constituée de jeunes et de filles. La renaissance du commerce est sans doute à mettre sur le compte de l'existence depuis quelques années d'un conservatoire communal, même si l'accès y est très sélectif. Sa composante actuelle reproduit très fidèlement la nature même de l'extraction sociale des apprenants ou mieux l'utile réseau relationnel de leurs parents. Cela même si dans une pratique populiste, le comité des fêtes de la commune ou la vice-présidence élue ad hoc se sont évertués à fixer un prix très abordable pour l'adhésion. Comme quoi on ne prête qu'aux riches. Internet pour sa part aura énormément contribué à l'émergence d'une jeunesse, voire d'une catégorie d'adolescents portés par un engouement sur l'art de la musique facilité par son universalité. Les conditions de résurgence étant clairement établies, il appartenait dès lors à quiconque désirant faire fructifier un commerce porté par une demande effective et des débouchés certains de mettre à profit une telle opportunité. Dans un ordre de préférence somme toute logique, ou répondant à la nature même des mélomanes qui se respectent, c'est la guitare classique qui est la plus demandée chez les commerçants, vient ensuite le violon alto, ce qui, également, semble relever de l'ordre normal des choses dans la ville du malouf et de la musique andalouse. Viennent après les instruments à corde électriques, notamment la guitare solo et d'accompagnement «Finder». «Une copie Finder», tiendra à souligner un jeune vendeur «qui coûte 8 000 ou 15 000 DA selon le modèle. Quant à la guitare classique, elle se situe dans une fourchette de 7 000 à 12 000. Enfin, pour les violons qui sont quand même un peu plus chers, ils vont de 14 000 à 23 000 DA». Etrangement, les magasins sont orphelins d'instruments à percussion, à l'image de la batterie, de la grosse caisse, voire du tambour. D'ailleurs, un homme venu du sud du pays, rencontré par hasard sur place, à la recherche d'un bendir aïssaoui, est resté sur sa faim et n'a même pas pu accéder à une quelconque information de nature à lui indiquer où il pourrait trouver l'instrument dont il était à la recherche, sauf un vague «essayez d'aller à Mila, il pourrait s'en trouver là-bas». La disponibilité aurait-elle un lien causal avec la délocalisation du Festival de musique aïssaouie depuis deux ans de Constantine à Mila ? Ce n'est pas exclu. Le gérant du magasin soulignera à notre intention que «la relative facilité d'approvisionnement en équipements de musique de tous genres. Sinon très franchement, je n'aurai pas choisi cette activité. Maintenant, il est vrai que l'éventail d'instruments proposé à la vente est limité, mais il s'agit pour nous aussi faire fructifier un placement et non pas seulement de remplir un magasin d'instruments pour de peu probables preneurs». En conclusion, il faut préciser que, durant les années soixante-dix, il existait trois fois plus de magasins de vente d'instruments de musique qu'actuellement. Mais il faudrait quand même admettre un regain d'intérêt pour la chose. Et ce n'est que bénéfice pour tout le monde.