Enorme feu au gigantesque parc de loisirs Dounia à l'Ouest d'Alger. Sur ses 1 059 ha, seize ont été détruits. Concomitamment, 30 gros incendies de forêts et de maquis ont été enregistrés à travers le territoire national. Autre exemple de sinistre, en une seule journée de cet été, 24 incendies et des dizaines d'hectares de forêt détruits au niveau national. Comme cette fois-ci, la principale cause serait la hausse des températures et les vents du Sud qui ont favorisé la propagation rapide des feux. Chaque année, le nord du pays flambe et de plus belle ! Mais même si, en valeur absolue, les superficies brûlées restent relativement modestes au regard d'autres pays méditerranéens, l'Algérie reste quand même une zone où le problème des feux forestiers se pose toujours, avec acuité, en raison de son impact dévastateur. La rareté des forêts et les risques de désertification font que ces incendies ont un effet particulièrement désastreux. Le pays ne possède qu'un peu plus de 4 millions d'hectares de forêts, soit un taux de boisement de 1,76%. Or la fréquence rapprochée des incendies a une incidence catastrophique sur le plan écologique. A titre indicatif, l'analyse des feux passés, au niveau des wilayas boisées, fait ressortir pour la période 1985-2010, 42 555 feux qui ont ravagé 910 640 hectares. Les chiffres sont inquiétants et il n'y a pas lieu de déterminer après tout le vrai seuil du pire ! Déjà, à plus de trente mille hectares le dantesque sinistre, c'est vraiment «Apocalypse now» ! Dans l'évolution temporelle des feux de forêts, le pays a certes déjà connu le pire. Avec une lugubre mention spéciale pour 1956, 1957 et 1958 mais qui seront dépassées par l'année terriblement néfaste de 1983 (221 367 ha) et de la trilogie infernale 1992-1993-1994. Et 1994 fut vraiment l'année du record absolu : avec 271 598 hectares consumés, elle dépassa largement le triste record de la colonisation, enregistré en 1956 (204 220 ha !) Dans la chronique des années de braise, l'an 2012, même s'il ne constitue pas un record absolu, a tout de même frappé les imaginations par l'étendue des surfaces consumées et la fréquence des incendies. Le score absolu, périodes de la colonisation et de l'indépendance comprises, reste donc celui de 1994, avec un pic vertigineux de 2 322 feux ! Ces chiffres méphistophéliques sont à apprécier par rapport à la moyenne de 1 388 feux par an entre 1980 et 2008, périodes qui ont connu la fréquence de feux la plus élevée en moyenne depuis la colonisation. En Algérie, le pire n'est pas toujours encore à venir, mais il est toujours à redouter. Mais comment dès lors expliquer, sur l'échelle de la carbonisation sylvicole, le fait que 645 414 hectares ont été cramés durant la guerre de Libération, alors que les années de l'Indépendance ont enregistré l'apocalyptique chiffre de 1 556 807 hectares entre 1963 et 2007 ? D'aucuns diraient que le temps de la lutte antiterroristes fut particulièrement inflammable. Mais, en fait, le terrorisme, conflit de basse ou de moyenne intensité, n'est en rien comparable au conflit de haute intensité que fut la guerre d'Indépendance durant laquelle le napalm a été utilisé. Preuve par les années 1956, 1957 et 1958 qui furent celles de Lucifer et de Dante réunis ! En fait, les causes de ces incendies ne sont pas toujours liées aux seules conditions climatiques. La négligence criminelle, les pyromanes et la xéricité des milieux arboricoles et des espaces de maquis expliquent le départ des feux. En Algérie, comme dans le reste du pourtour méditerranéen, les origines des incendies sont multiples, imputables à l'homme, à la nature ou à la fatalité. Causes naturelles, motifs accidentels, malveillance et raisons non identifiées, éclaireraient, selon les cas, le déclenchement des feux. Après tout, chez nous, la question ne réside finalement pas dans les seuls moyens ou le savoir-faire des pompiers. La Protection civile a les outils et les ressources humaines en quantité et en qualité. Ces dernières années, par exemple, 5 000 techniciens de plus ont été formés en France. Le problème est nécessairement dans l'existence d'une double politique de prévention et d'amélioration de la réactivité à l'alerte, surtout dans la rapidité de la première intervention. Encore plus singulièrement dans l'ouverture de plus de pistes d'accès aux forêts et aux maquis, à laquelle beaucoup de propriétaires de terres limitrophes ou incluses s'opposent systématiquement. La solution est donc connue. Elle s'appelle réaction, information, sensibilisation, analyse de risque et aménagement judicieux du territoire. N. K.