Derrie la crise, les subventions et… «Des gisements financiers de l'ordre de 23 milliards de dollars/an existent si le gouvernement veut se donner les moyens d'une réforme qui ne se suffit pas de cibler les couches sociales les plus démunies », écrit d'emblée l'économiste, universitaire, auteur (une dizaine de livres) et ancien ministre du Commerce (1989-1991) dans Libre Algérie, journal en ligne édité par le FFS. Au cœur de la LF (loi de Finances) 2017, la question des subventions qui représentent 27 milliards de dollars/an impacte directement les couches sociales les plus démunies. Sans débat incluant tous les acteurs concernés, les mesures préconisées peuvent-elles prétendre à l'efficacité ? D'autres gisements financiers existent qui totalisent 23 milliards de dollars par an. Mais pour les capter, il faudrait un large consensus autour d'une réforme sérieuse du commerce extérieur, de la fiscalité et de la politique de change, préconise Smaïl Goumeziane, mettant ainsi le doigt sur les points noirs du blocage de l'économie nationale. Sous-entendant, du même coup, la nécessité d'une volonté politique forte, plus forte que les résistances organisées au changement. Face à la crise financière subie par le pays suite à la chute brutale et durable des prix pétroliers, le gouvernement a pris une série de mesures, notamment à travers la loi de Finances pour 2017, afin de rétablir les «grands équilibres». Au cœur de ces mesures, la question, ô combien sensible, des subventions en faveur des citoyens pour un montant avoisinant les 27 milliards de dollars par an, dont 18 milliards de dollars pour les seuls produits énergétiques. Un montant suffisamment important pour que les autorités y puisent de quoi réduire sérieusement le niveau des dépenses publiques et par conséquence le déficit budgétaire. Pour autant serait-ce là la solution idoine ? Rien n'est moins sûr. En effet, si la nécessité d'une analyse sérieuse de la politique de subventions est incontournable, ne serait-ce que pour en comprendre les avantages et les inconvénients, voire les effets pervers, il reste qu'en la matière toute décision hâtive ou bureaucratique est à proscrire tant ce sujet est particulièrement sensible car touchant, pour l'essentiel, au pouvoir d'achat des couches sociales les plus démunies. Avec d'autant plus de sensibilité que ces couches, de plus en plus nombreuses, sont déjà frappées au quotidien par toute une série de difficultés d'accès aux biens et services essentiels : logement, santé, éducation, alimentation. Pour cause de chômage ou de niveau faible des rémunérations. Dès lors, s'il apparaît évident qu'il faille revoir la politique des subventions pour passer de son caractère «universaliste» à un ciblage plus précis des couches sociales les plus démunies, il est tout aussi évident qu'une telle approche, pour être efficace, indolore et comprise doit recueillir le consensus du plus grand nombre. C'est dire que cette démarche des autorités doit intégrer dans sa réflexion et dans son application tous les acteurs concernés par cette question : consommateurs et usagers, agents économiques, syndicats, partis politiques et autres associations de la société civile. Dans ces conditions, il apparaît également que toute restructuration des subventions et modification des mécanismes de leur allocation doit se faire en respectant un principe essentiel : celui de la progressivité. Car, on ne peut bouleverser un tel système en une ou deux lois de finances. Certes, la crise des finances publiques est douloureuse mais on ne peut remplacer une douleur, celle subie par les autorités, par une autre douleur, celle subie par les couches sociales les plus démunies. Et, la seule baisse, voire suppression des subventions ne fait pas une politique budgétaire. Les surfacturations liées au commerce extérieur, les transferts invisibles de capitaux et la fraude fiscale, sans oublier les ravages du change parallèle sont des gisements où puiser D'autant qu'à y regarder de plus près, d'autres «gisements financiers» existent dans lesquels les autorités pourraient «puiser» pour boucher les déficits publics : les surfacturations liées au commerce extérieur, les transferts invisibles de capitaux et la fraude fiscale, sans oublier les ravages du change parallèle. En effet, selon les chiffres avancés par les autorités elles-mêmes, le pays fait face, annuellement, à quelque 18 milliards de dollars de surfacturations, à des transferts invisibles de capitaux de l'ordre de 1,5 à 2 milliards de dollars et à près de 3 milliards de dollars de fraude fiscale. Soit un montant global et annuel de l'ordre de 23 milliards de dollars à comparer aux 27 milliards de subventions. Serait-il plus aisé de «toucher» aux subventions ? Il est vrai que pour «récupérer» toutes ces sommes «invisibles» il faudrait s'atteler au plus vite à trois grandes réformes : celle du commerce extérieur, afin d'en maitriser les flux physiques et financiers ; celle de la fiscalité, pour mettre un terme à la fraude, aux rentes spéculatives et à l'enrichissement sans cause» ; celle, enfin de la politique de change et de l'éventuelle convertibilité du dinar. Des réformes qui, on s'en doute, ne peuvent pas faire non plus l'économie d'un large débat au niveau national afin d'obtenir un minimum de consensus pour leur élaboration et leur application. S. G.