La réhabilitation du patrimoine national immobilier a été débattue, hier, au centre d'El Moudjahid, à Alger, en présence de spécialistes et de professionnels du domaine. Depuis 1982, plus de 3 millions de logements sont classés vieilles bâtisses nécessitant d'être réhabilitées. L'expert architecte et président du Collège national des experts architectes (CNEA), Abdelhamid Boudaoud, qui milite pour la réhabilitation du patrimoine national immobilier, a d'emblée appelé les autorités à mettre en place d'urgence une stratégie pour la réhabilitation des bâtisses vétustes. «Il n'y a pas de stratégie nationale en matière de gestion de l'habitat en général et de l'habitat vétuste en particulier. On n'a pas de gestionnaires dignes de ce nom», a-t-il souligné, avant de présenter quelques résultats d'une opération de diagnostic au niveau de 7 communes de la wilaya d'Alger. Selon le diagnostic, sur les quelque 17 000 bâtisses recensées, 259 menacent ruine, dont 1% classées dans la catégorie 3, c'est-à-dire des logements à moyenne dégradation, et 15% dans la catégorie 4 (dégradation avancée). L'expert a appelé encore une fois à la création d'une agence nationale de réhabilitation, qui serait parrainée par les banques, et d'une agence de rénovation urbaine avec des structures décentralisées au niveau régional et communal, où l'entretien de l'immobilier doit commencer. «Chaque municipalité doit mettre au point un plan de gestion du patrimoine immobilier. Elle se doit d'inventorier l'ensemble du patrimoine situé sur son territoire et d'élaborer un plan pluriannuel de réhabilitation.» Citant les 1 548 communes d'Algérie, le conférencier a insisté sur la nécessité de lancer des prêts à taux d'intérêt nul. «Ainsi, pour réhabiliter son logement, le citoyen pourrait demander un prêt sans intérêts qui sera parrainé par des banques», a-t-il expliqué. Il a par ailleurs plaidé, en tant qu'architecte, pour l'introduction des «carnets de santé» pour les logements. Chaque logement devrait ainsi avoir une fiche de santé pour que, en cas de vente, l'acheteur soit informé du moindre problème tel que le gaz et l'électricité. «Et ce carnet doit suivre l'acquisition», a-t-il expliqué, appelant les agences immobilières à exiger des usagers de présenter ce carnet de santé pour pouvoir vendre leurs logements. Il a également préconisé de sensibiliser les maîtres d'ouvrage, notamment les privés et les co-propriétaires, lesquels sont obligés d'avoir en leur possession un cahier des charges et de les forcer à avoir cette culture de réhabilitation au lieu de compter seulement sur l'Etat. «Une simulation faite en 1987 a démontré que, pour amortir un logement dont la construction a coûté 30 millions de centimes, avec les loyers appliqués à l'époque, il faut au moins 80 ans. Les charges étaient supérieures aux loyers», a-t-il souligné, avant d'ajouter : «Pour réhabiliter dans les années 1980, il fallait réviser les loyers à la hausse.» D'ailleurs, le parc immobilier national est représenté à raison de 35% de logements construits avant 1948, 20% sont édifiés entre 1948 à 1968, 28% entre 1968-1977 et 17% après 1978. «Ces chiffres, qui doivent être rapprochés de ceux que révélera le recensement de la population et de l'habitat de 1978, illustrent bel et bien l'état de vétusté qui caractérise notre patrimoine immobilier. N. B.