C'est l'équivalent de plus de 10 millions d'habitants. Le parc immobilier dont dispose l'Algérie, notamment celui situé au nord du pays reste vulnérable. Il est devenu, au fil des années, vétuste et trop fragile. Un patrimoine de près de 2 millions de logements nécessite une réhabilitation en urgence. Sur un ensemble de 4 millions d'appartements, 50 % sont vieux et demandent une prise en charge par une restauration immédiate. Si les 35 % du parc construits avant 1948 et les 20 % entre 1949 et 1977 sont vétustes, il n'en demeure pas moins que ceux édifiés entre 1969 et 1987 sont dans un état de dégradation critique. Ce vieillissement prématuré a été provoqué par l'abandon dont ont fait l'objet ces habitations. L'absence d'administrateurs de biens depuis des décennies a engendré des problèmes d'entretien dus à la surexploitation des immeubles, au taux élevé d'occupation des logements et aux insuffisances dans la gestion et la maintenance du parc immobilier. Plus de 1 530 immeubles recensés avant mai 2003 à Alger nécessitent une intervention. La daïra de Sidi M'hamed qui représente le patrimoine le plus vétuste au plan national n'a pas subi d'entretien depuis 1962. Le Collège national de experts architectes (CNEA) qui a établi un constat peu reluisant du vieux bâti dans notre pays propose l'établissement d'une sorte de carnet de santé du bâtiment. Cet outil permettra, selon M. Boudaoud, président du CNEA, invité, hier, au forum d'El Moudjahid, un meilleur entretien et un suivi idoine de ces immeubles. Pour cet expert, il est possible de prolonger davantage la durée de vie d'un bâtiment dont la moyenne d'existence est de 50 années. “La durée d'occupation et d'habitabilité d'un bâtiment dépend de son entretien”, précisera M. Boudaoud. Pour faire face à la problématique du vieux bâti, le CNEA suggère au préalable un recensement par les communes de tout leur patrimoine. Car, pour lui, il n'y a pas de crise mais un manque de logements uniquement. Ensuite, il est utile, estime le conférencier, d'analyser et de porter un jugement sur les défaillances techniques du bâti et évaluer les coûts. Apprécier la qualité esthétique des bâtiments et évaluer l'usage actuel du logement est l'autre action que nécessite cette démarche de réhabilitation. “Réhabiliter un immeuble ancien est une opération fort complexe qui exige compétence, dextérité de la part des différents intervenants”, reconnaît le président du CNEA. Toutes ces actions passent impérativement par une étude minutieuse qui prend en considération tous les aspects pour établir un diagnostic complet et de la situation du cadre du bâti à réhabiliter. Ce dernier doit être non seulement recensé mais classé par types, à savoir la catégorie à réhabiliter, à rénover et à conforter y compris celui à démolir. “L'objectif recherché à travers ce programme vise à ressusciter l'âme des quartiers et des immeubles”, expliquera M. Boudaoud. Ce qui, par conséquent, atténuera un tant soit peu la pression sur la demande de logements neufs en offrant aux citoyens des immeubles anciens solides et un cadre de vie meilleur. La réhabilitation incitera également les habitants à un usage meilleur des immeubles et leur donnera l'opportunité de réfléchir à l'accession à la propriété. Après avoir dressé ce bilan, le CNEA propose aux responsables concernés la création d'un fonds national d'amélioration de l'habitat et le lancement d'un programme d'urgence de réhabilitation du vieux bâti et de restructuration des anciens quartiers parallèlement aux constructions nouvelles projetées. La mise en place d'une assise juridique exigeant des propriétaires du bâti une expertise technique, la réinstallation de concierges, d'administrateurs de biens, la spécialisation des entreprises dans les domaines de confortement, de réhabilitation… sont autant de recommandations émises par le collège des architectes et qui devraient constituer la politique nationale pour la prise en charge du vieux bâti. B. K.