Après Netflix, c'est au tour de Disney d'être victime d'un chantage à la diffusion sur les réseaux d'un film avant sa sortie officielle, révèle The Hollywood Reporter. Explications. Les «rançongiciels» n'épargnent pas Hollywood et l'industrie du divertissement. Après Netflix au début du mois, c'est au tour du géant Disney de subir un chantage sur le mode «tu paies ou on diffuse». L'affaire, révélée par The Hollywood Reporter, remonte au début de la semaine. D'après la gazette du milieu cinématographique, Bob Iger, PDG de la Walt Disney Company, a annoncé au cours d'une réunion à New York avec les employés de la chaîne ABC que des pirates informatiques lui demandaient une «énorme rançon» pour ne pas diffuser sur les réseaux un film inédit. Bob Iger n'a pas indiqué de quel film il s'agissait, mais a affirmé qu'il refusait de se plier à ce chantage. Selon The Weekly, qui cite de nombreuses sources anonymes, Disney collabore avec la police fédérale et guette toute fuite de ce film pas encore sorti sur les écrans. Selon le site Internet spécialisé Deadline, qui ne cite pas plus ses sources, le film piraté en question pourrait être le nouveau et cinquième volet de la saga des Pirates des Caraïbes (La vengeance de Salazar), qui doit sortir en salles le 26 mai. Depuis ses débuts en 2003, cette franchise, avec Johnny Depp en tête d'affiche, a engrangé plus de 3,7 milliards de dollars de recettes. D'autres sources parient plutôt sur les nouvelles aventures de Flash McQueen, le célèbre héros des Cars de Pixar, qui doivent sortir en juin. Comme à l'accoutumée, les pirates informatiques ont demandé à être payés en bitcoins. Cette monnaie virtuelle est un outil idéal pour se faire payer des rançons puisqu'ils peuvent être acceptés partout dans le monde sans avoir à révéler son identité. Les pirates ont menacé Disney de montrer d'abord cinq minutes du film volé, puis vingt minutes si la rançon n'était pas payée. Ce piratage fait suite à une récente attaque informatique dont a été victime Netflix au début du mois. Les «hackers», qui s'étaient baptisés «The Dark Overlord», avaient mis la main sur les fichiers originaux de dix épisodes de la série Orange is the New Black en piratant le serveur d'un prestataire externe, via une faille de sécurité. Ils auraient réclamé une rançon de 50 bitcoins, soit environ 80 000 euros, pour ne pas mettre leur menace à exécution. Devant le refus du producteur de céder, les épisodes ont été postés sur le site Pirate Bay, six semaines avant la date de sortie prévue par Netflix, le 9 juin. Joint par Libération, le producteur Pascal Breton, à la tête de Federation Entertainment (Marseille sur Netflix, le Bureau des légendes sur Canal +), estime que ces attaques marquent un changement de dimension dans la piraterie des contenus audiovisuels. «En raison de la chronologie des médias, le cinéma a toujours été victime de piratage dès sa sortie en salles, ce qui n'est pas le cas des séries que l'on diffuse d'emblée sur tous les supports, explique-t-il. Sauf que désormais, les pirates, qui ne faiblissent pas dans l'inventivité et montrent qu'ils ont toujours quelques coups d'avance, passent à la vitesse supérieure comme on l'a vu ce week-end.» Un épisode d'une série comme Orange is the New Black coûte près de 4 millions de dollars (3,6 millions d'euros), soit près de 50 millions de dollars pour une saison. «Bien sûr, ce n'est pas la même chose de voir un épisode sur Netflix ou une version piratée sur une plateforme de streaming, poursuit Pascal Breton, mais cela va pour le moins fragiliser le modèle si ce genre d'incidents se reproduisent.» D'où l'obligation, pour une industrie qui n'y était guère habituée jusqu'ici, de mieux sécuriser ses fichiers. Producteur de films (Django, récemment) et de séries, Marc Missonnier juge que les films français sont relativement bien protégés jusqu'à leur sortie en vidéo. «Quand on fait une avant-première et que l'on transmet un fichier, parce qu'à la fin, un film, ce n'est qu'un fichier, on ne peut le lire que si on a une clé et pour une période précise, telle date de telle heure à telle heure, explique-t-il. Maintenant, on trouve toujours plus malin, on fait du mieux qu'on peut.» «On le voit, ces systèmes mafieux sont incroyablement forts pour inventer de nouveaux modèles lucratifs, reprend Pascal Breton, qui confesse que les transferts de «masters» ne sont toujours pas hyper sécurisés. «Ce n'est pas notre métier et il va falloir faire plus attention, les labos où l'on monte les films et séries vont devenir des banques, dit-il, le numérique marque le début d'une nouvelle ère avec des productions de plus en plus mondialisées dans leur montage et leur diffusion. Cela crée de nouvelles opportunités mais qui ne sont pas sans risques car on touche à des produits de création qui ont beaucoup de valeur.» C. A.