Répondant à la question sur le recours à un «étranger» pour la réalisation du film, le ministre dira que «le travail cinématographique contemporain est puisé dans de multiples ressources humaines. Point de frontières dans le choix des réalisateurs, producteurs...» «Ceux qui ont jugé le film Ben Badis avant même de le voir vont certainement, aujourd'hui, changer leur opinion.» Le ministre de la Culture Azzedine Mihoubi, qui a assisté, mardi soir dernier au zénith de Constantine, à la projection en avant-première du long-métrage Ben Badis du réalisateur syrien Basil El Khatib, sur un texte de Rabah Drif et une musique de Salim Dada, s'est montré mordant envers «ses détracteurs». Autrement dit, les médias et autres sphères qui ont critiqué l'œuvre avant même qu'elle ne soit visionnée. Ayant défendu bec et ongle ce projet tardif de la manifestation de «Constantine, capitale de la culture arabe 2015», le ministre balisera d'emblée les débats : «Un suivi sensible a caractérisé ce travail. Ce n'est pas un film documentaire.» Et de renchérir : «Si on voulait aborder toutes les stations qui avaient marqué la vie du réformiste, plus de 50 épisodes auraient été insuffisants. C'est un film qui s'attarde sur les points qui ont marqué la vie de l'uléma marquant son parcours, ainsi que l'évolution du mouvement réformiste national. Et la proéminence du discours national revendiquant liberté et indépendance. Ben Badis, penseur, détenait la clé de voûte du mouvement national et de la guerre de libération.» M. Mihoubi versait dans une plaidoirie dans son prélude mettant en relief «les normes avec lesquelles ce film de près de deux heures a été confectionné avec une équipe pluridisciplinaire. Avec en sus une fierté nationale : tous les acteurs sont algériens, dont l'acteur principal Youcef Sehaïri. C'est un acquis d'autant que ce genre de traitement réservé aux personnalités nationales n'aura jamais été abordé jusqu'ici. C'est délicat. Je suis persuadé que cette œuvre laissera une empreinte dans la vie culturelle et dépassera les frontières». Le ministre rétorquera sans détour aux questions sur le recours à un «étranger» pour la réalisation du film. «Le travail cinématographique contemporain est puisé dans de multiples ressources humaines. Point de frontières dans le choix des réalisateurs, producteurs…», dira-t-il. Dans le même sillage, pour défendre sa thèse, Mihoubi évoquera son entrevue avec le metteur en scène algérien Merzak Allouache sur l'éventualité de concrétiser ce long-métrage : «Il m'a avoué que son registre ne cadre pas avec ce genre de film», indiquera-t-il. Le réalisateur, Basil El Khatib n'a pas manqué de souligner la complexité et la difficulté de produire un tel travail qu'il juge sensible. «Je n'ai pas dormi pendant des nuits pour ne rien laisser au hasard. Je passais de nombreux coups de fil par journée à Rabah Drif qui a écrit le scénario», dira-t-il, ajoutant que «le réformiste reste une figure emblématique qu'il a fallu traiter avec autant de détails et de justesse. La sensibilité du sujet pour les Algériens est manifeste». Le conférencier est convaincu que «le public venait de découvrir une autre facette sur la vie de Ben Badis». Quant au compositeur de la musique du film, il dira que sa composition fut enregistrée en Bulgarie et interprétée par un orchestre symphonique. «Les silences de Ben Badis sont exprimés en musique», précisera-t-il. Le film, projeté devant une assistance nombreuse en présence des membres de la famille du réformiste, a trouvé bon réceptacle parmi le public quand bien même certaines personnes avouaient vouloir découvrir tous les passages qui jalonnaient l'itinéraire de l'association des oulémas musulmans. Il reste l'avis des critiques cinéma qui devront apporter leur opinion sur la réalisation. «Dommage qu'aucune intervention d'un professionnel du 7e art n'ait été émise dans la salle des conférences», déplorent quelques férus du grand écran. Cette production, qui, selon Mihoubi, constitue un déclic pour le cinéma algérien, sera présentée à l'opéra d'Alger, puis à Oran avant qu'elle n'entre dans son circuit de diffusion commerciale (à travers les wilayas) par le biais de l'Office de la culture et de l'information (ONCI).