«The game is over in Syria.» Les propos de l'ancien ambassadeur américain à Damas, Robert Ford, dans une interview accordée au journal saoudien Al-Chark Al-Awsat, le 19 juin, auront été prémonitoires sur l'évolution future de la situation en Syrie. Le diplomate US qui était en poste à Alger en 2006 est connu pour avoir été à la manœuvre dans plusieurs points d'instabilité notamment au Proche-Orient. Pour lui la tragédie irakienne a accouché d'un échec pour son pays et ses alliés. Un mauvais calcul qui n'aura fait finalement que renforcer le fameux «axe du mal» cher à J.W.Bush. La situation sur le terrain syrien aura finalement évolué dans le mauvais sens pour les Américains et leurs alliés. Et ce, malgré les grands moyens mis dans la bataille. Le «Printemps arabe» devait continuer sa mission morbide, fragiliser la Syrie en faisant chuter le régime en place et le substituer par un régime «ami», couper le Hezbollah de sa base arrière syrienne, et mettre l'Iran en joue en atomisant l'axe Téhéran-Baghdad. Le résultat s'est avéré, près de sept ans après le début des grandes manœuvres, négatif voire aléatoire pour «l'équilibre» voulu par Washington dans la région. Les Américains n'ont probablement pas évalué à sa juste mesure la situation sur le terrain, ils n'auraient pas imaginé l'intervention des Iraniens et des Russes dans la bataille, avec cette détermination. Aujourd'hui la Syrie semble de plus en plus sortir du guêpier préparé et mené contre elle par plusieurs acteurs internationaux et régionaux. Après cette épreuve probablement la plus dramatique de l'histoire du pays, la Syrie ne s'en trouvera que plus ragaillardie. Mauvaise nouvelle pour tous ceux qui ont grandement misé sur le départ d'Assad et la chute du régime. Israëel, par exemple, qui poussait indirectement à la fragilisation de la Syrie en renforçant les fameux groupes armés, se retrouve aujourd'hui face à une situation plus problématique qu'avant. Le mouvement de résistance Hezbollah sort davantage renforcé de cette guerre après avoir pris les plus grands risques en y participant. En plus de l'engrangement de l'expérience le mouvement libanais peut désormais compter sur une autre base arrière : l'Irak. C'est justement là que les stratèges américains, français, britanniques et même turcs, c'est-à-dire atlantistes auront perdu la partie. Hériter d'une situation géopolitique moins favorable à l'arrivée alors qu'on a tablé sur un bouleversement de la région en notre faveur c'est indéniablement perdre la guerre. Difficile de l'admettre. La Russie semble se charger actuellement «d'aider» l'hyper-puissance à sauver la face. Et sortir du guêpier syrien avec le moins de «dégâts» pour l'image. Le diplomate Robert Ford, rompu à la lecture des événements et ayant une grande connaissance de la région, avait déjà prédit ce revers. Le jeu est terminé. M. B.