Moussa Touati ne croit plus à un deuxième tour. Il le regrette en déclarant que «s'il n'y avait pas eu fraude, un deuxième tour aurait été inévitable». Il dira même que le taux de participation a été «décidé et fixé et il sera aux alentours de 60%. Les résultats vont être au bénéfice de celui qui a déclaré ‘‘je veux être élu avec une majorité écrasante''». Mais le candidat du Front national algérien (FNA), qui a répondu aux questions des représentants de la presse hier vers 18 heures à son siège, ne pense pas que les scores des autres candidats vont être fixés. «Je ne pense pas que mon score va être fixé. Ce qui importe c'est d'octroyer la majorité à un candidat.» Il dira même que la fraude ne visait pas en premier lieu à faire éclipser l'abstention mais à offrir la majorité à un candidat libre. Venu confirmer les dépassements dont ont fait part ses partisans dès les premières heures du début du scrutin, le candidat du FNA affirme que «de nombreux dépassements ont été enregistrés depuis la matinée. Il y a lieu de faire part, entre autres, de l'interdiction d'accès à nos représentants dans certains bureaux de vote. Il y a aussi cette caravane d'une trentaine de bus remplis de citoyens qui a quitté hier [mercredi soir, NDLR] la capitale en direction de Ghardaïa. Les occupants des bus ont bénéficié du transport et de la nourriture pour aller voter. Avec quel argent ? Et dans quels bureaux de vote ?», révélant par la suite que l'administration n'a pas été neutre dans ce scrutin. «A Tébessa où le nombre d'inscrits est de 392 573, le nombre de votants donné à 8h du matin est de 309 311, ce qui représente un taux de 70,79% à Aïn Defla ! A Aïn Defla, il a été constaté par notre surveillant, lors du contrôle de l'urne avant l'ouverture du bureau de vote, qu'elle était bourrée. En exigeant l'ouverture des autres urnes, il s'est heurté à un refus ferme du chef de centre». Et pour nommer le candidat en faveur duquel les urnes ont été bourrées, Moussa Touati choisit la périphrase : «Nous avons aussi relevé qu'un seul candidat libre a pu avoir des représentants dans l'ensemble des bureaux de vote. C'est en sa faveur d'ailleurs que les urnes ont été bourrées.». Moussa Touati qui n'a pu avoir que 13 000 représentants éparpillés sur les 45 000 bureaux de vote explique que le FNA n'avait pas les moyens de rémunérer les surveillants sur l'ensemble du territoire national. «Cela aurait coûté 4,5 milliards de centimes et nous n'avons pas cette somme. Nous avons alors fait confiance à l'administration qui a le devoir d'être neutre mais malheureusement cela n'a pas été le cas comme nous avons eu à le constater.» A ce sujet, Moussa Touati rappelle que son parti a adressé une lettre au Premier ministre et président de la Commission nationale de préparation des élections présidentielles, dans laquelle il propose que «l'argent destiné à payer les représentants des partis non concernés par cette élection soit versé pour le paiement des surveillants des partis participant au scrutin. La réponse a été négative malheureusement». Soutenant que le taux réel de participation ne doit pas excéder les 40%, le candidat Touati a expliqué que la décision de permettre aux corps constitués et aux étudiants de voter dans les bureaux à proximité de leur lieu de travail ou de résidence a donné cet effet de participation massive. «Les membres des corps constitués en tenue civile ou encore les étudiants acheminés par les bus du COUS vers les bureaux de vote et leur entrée en masse dans les écoles a permis aux caméras de l'ENTV d'offrir des images illusoires d'une participation massive». Moussa Touati s'arrête un moment avant de lâcher : «Cela ne nous dérange pas que les électeurs votent, qu'ils soient des corps constitués ou autres mais ce qui est regrettable, c'est l'ajout des bulletins de vote.» Affirmant que, malgré cette fraude, le FNA est décidé à poursuivre sa lutte comme un parti de l'opposition, Moussa Touati annonce : «On va agir au moment opportun.» Quant à sa confiance dans la neutralité de l'administration qui a été «trahie», le conférencier regrette que «le fonctionnaire ne soit pas protégé par la loi, ce qui lui permettra d'avoir une autre culture et d'être convaincu que l'Etat ne disparaît pas avec la disparition des hommes». H. Y.