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«L'Algérie joue un rôle important dans les affaires mondiales et en Méditerranée»
Yves Lacoste, initiateur de la réflexion géopolitique en France :
Publié dans La Tribune le 07 - 05 - 2009


Entretien réalisé par Sihem Ammour
LA TRIBUNE : Pouvez-vous nous expliquer quelle place occupe l'Algérie dans les enjeux géopolitiques de la Méditerranée ?
Yves Lacoste : L'Algérie est un très vaste Etat et il s'étend sur une grande partie du Sahara, jusqu'au Sahel, qui forme la frange des pays de ce que l'on appelle l'Afrique noire.
On sait que le Sahara ne fut jamais une «barrière» entre le Maghreb et l'Afrique noire car, durant des siècles, il fut traversé, grâce aux escales que sont les oasis, par les caravanes des «routes de l'or du Soudan» vers la Méditerranée (celles dont parle Ibn Khaldoun). Aujourd'hui, avec les camions et les 4x4, le Sahara est traversé du sud vers le nord, notamment par les trafics plus ou moins clandestins. Le Sahel, qui s'étend d'est en ouest, du Soudan à l'Atlantique, est aussi une zone d'influences plus ou moins occultes, et l'Algérie a la charge de les surveiller pour sa propre sécurité et celle des pays qui entourent la Méditerranée.
L'Algérie joue un rôle important dans les affaires mondiales du pétrole et surtout du gaz non seulement à cause de ses propres gisements, mais aussi à cause de ce que je pourrais appeler son expérience géopolitique.
En effet, la longue lutte qu'elle a menée pour son indépendance lui a valu une expérience particulière dans les affaires internationales, l'attention et la sympathie de nombreuses nations (et pas seulement celles du tiers-monde). Elle fait partie de l'OPEP, du monde arabe, du monde musulman, mais à l'époque de la «guerre froide» elle a su tenir l'équilibre entre l'Union soviétique et les Etats-Unis. Les diplomates algériens ont une grande expérience dans des affaires géopolitiques compliquées et ils jouent un rôle important lorsqu'il s'agit de trouver une solution à de graves crises. Enfin, l'importance géopolitique de l'Algérie en Méditerranée tient au fait qu'elle est le pays de la «rive sud» de cette longue étendue marine, qui entretient le plus de relations avec un pays de la «rive nord».
Et cela est d'autant plus à souligner qu'entre les deux nations les relations ont été bien plus difficiles qu'entre la plupart des puissances coloniales et leurs colonies. La guerre d'indépendance d'Algérie (1954-62) n'a d'équivalent que la guerre d'indépendance du Vietnam (1946-54), et la bataille de Dien Bien Phu (mai 1954) a inspiré les Algériens qui ont fait le 1er Novembre 1954.
Mais le Vietnam est loin de la France et il a été ensuite entraîné jusqu'en 1975 dans la terrible guerre avec les Américains. Aussi, les Vietnamiens qui vivent en France sont bien plus nombreux que les Algériens : les personnes d'origine algérienne sont environ la moitié des quelque six millions de musulmans qui vivent en France et qui continuent d'entretenir leurs liens avec leur patrie d'origine.
Il existe bien d'autres relations post-coloniales, entre le Royaume-Uni, entre la France, et d'autres pays de l'ex-empire colonial, mais ces relations n'ont pas été précédées de guerre. L'importance des relations entre l'Algérie et la France, malgré les souvenirs d'une guerre combien cruelle, est un cas très singulier. Le rôle géopolitique de l'Algérie, comme celui de la France, est de veiller à ce que les Algériens qui vivent au nord de la Méditerranée, pas plus que les Français, ne se laissent pas entraîner par certains dans des aventures dangereuses.
Quelles sont les chances d'aboutissement du processus de paix et de la création de deux Etats, avec l'actuel gouvernement israélien et la nouvelle administration américaine ? Pensez-vous que l'UE, l'ONU et d'autres pays peuvent influer sur l'évolution du dossier ?
On est sans doute à l'approche d'importants changements car Barack Obama semble bien décidé à faire pression sur le gouvernement israélien (en réduisant l'aide financière que les Etats-Unis lui accorde) pour l'obliger à mettre un terme à l'implantation des «colonies» dans les «territoires occupés» et surtout pour envisager enfin sérieusement la création d'un véritable Etat palestinien, ce qui implique le départ de la plupart des «colonies» juives.
A noter que la multiplication de celles-ci est le fait des juifs religieux les plus intégristes. La «guerre de Ghaza» a profondément scandalisé l'opinion européenne et américaine et de nombreux citoyens américains juifs (qui ne sont pas des ultra-religieux) estiment désormais que le gouvernement israélien doit trouver une solution raisonnable à un problème qui ne cesse de s'envenimer. Obama, dont de nombreux proches conseillers sont juifs, peut sans doute se faire comprendre, par leur intermédiaire, de la communauté juive américaine. En revanche, les supporters les plus acharnés de la politique israélienne sont les nombreuses Eglises protestantes «évangéliques». Elles constituent ce que l'on peut appeler un «sionisme chrétien» et elles se sont mis dans la tête l'idée suivante : lorsque les juifs auront reconquis la «Terre promise», tout le territoire d'Israël, tel qu'il a été soi-disant promis par Dieu, le Christ-roi reviendra aussitôt sur terre et les juifs se convertiront au christianisme, disent les «évangéliques», (ce qui ne plaît pas aux juifs)… Je ne ferai pas de commentaire sur ces superstitions, mais elles sont dangereuses.
Quel serait le rôle des intellectuels et plus spécifiquement des historiens dans la résolution des différents conflits hérités d'un passé houleux qui marque les relations entre différents pays ?
Le rôle des intellectuels peut être très grand dans l'analyse de l'évolution des situations géopolitiques. Mais pour qu'ils aient un tel rôle, il me paraît nécessaire qu'ils envisagent sérieusement et objectivement dans l'analyse de tout conflit géopolitique les arguments de chacun des adversaires, de chacun des protagonistes dans chaque conflit, dans chaque rivalité de pouvoirs. Il ne s'agit pas de leur trouver des excuses, mais de faire des analyses plus efficaces, c'est-à-dire avoir le moyen de faire une critique plus efficace.
Quel constat faites-vous aujourd'hui sur l'évolution de la géopolitique en tant que discipline ?
Comme vous le savez sans doute, je suis géographe et historien (cf. mon livre sur Ibn Khaldoun que j'ai commencé d'écrire à Alger lorsque j'y étais professeur en 1952-1955), et j'ai commencé ma réflexion sur la géopolitique il y a plus de trente ans.
Le mot géopolitique fait aujourd'hui l'objet d'une véritable mode et elle est excessive. On l'emploie pour désigner des rivalités («géopolitique du football», «géopolitique de la cuisine», etc.) qui n'ont rien à voir avec des rivalités sur du territoire entre des forces politiques et pas seulement entre des Etats.La revue de géographie et de géopolitique Hérodote, que j'ai créée en 1976 et que publient les éditions La Découverte (elle est consultable par mail sur le «portail» Cairn) continue d'être la plus importante revue française de géographie. Elle est l'expression du courant d'idées qui a fondé en 2003 l'Institut français de géopolitique à l'université Paris-VIII (ex-université de Vincennes, aujourd'hui à Saint-Denis).
Etes-vous sur le projet d'une nouvelle publication ?
Je termine actuellement une nouvelle édition de l'ouvrage Géopolitique, la longue histoire d'aujourd'hui (Larousse 2006 et 2008) qui a eu un gros succès, nouvelle édition où je dois tenir compte des changements géopolitiques récents, du fait de la crise économique mondiale et des difficultés des Etats-Unis en Irak, en Afghanistan et sans doute bientôt au Pakistan. Ma recherche la plus importante actuellement porte sur ce que j'appelle la Géopolitique de la question post-coloniale qui paraîtra à l'automne. Il s'agit d'une analyse géopolitique des relations entre les anciennes puissances coloniales et les nations qui ont conquis leur indépendance. Je dis question post-coloniale, car les phénomènes qui suivent les colonisations ne sont pas simples et ils font l'objet de toute une série de discours à la mode d'allure philosophique ou psychanalytique («post moderne», «post-industriel») qui, au lieu d'éclairer les problèmes, les rendent encore plus subjectifs et plus inefficaces. Pour comprendre les relations actuelles qui sont fort importantes, mais compliquées, notamment entre la France et l'Algérie, il faut faire une analyse plus précise des luttes pour l'indépendance car, selon les pays, elles ont été très différentes. Ainsi, l'Inde, la plus importante de toutes les colonies et l'une des plus anciennes, est devenue indépendante en 1947, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avec l'accord complet du gouvernement britannique (pour quelles raisons ?), alors que l'Algérie (dont la conquête avait été au XIXe siècle la plus difficile de toutes) a dû lutter des années pour son indépendance et mener une véritable guerre. Or, c'est entre la France et l'Algérie que les relations post-coloniales sont les plus importantes, tant du fait de l'immigration que sur le plan des idées, en dépit des tensions actuelles dans le monde musulman. Cela mérite qu'on comprenne bien pourquoi, et la méthode d'analyse géopolitique est particulièrement utile.


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