L'association «A nous les écrans» a organisé jeudi soir dernier son ciné-club à la salle ABC avec, au programme, les œuvres du jeune réalisateur algérien Nassim Amaouche dont le premier long métrage, Adieu Gary, sera l'unique participation algérienne au Festival de Cannes. Le public est cependant peu nombreux, une quinzaine de personnes à peine, dont des professionnels du 7ème art. Après un court débat et la présentation de l'association et de ses activités, la séance s'amorce avec la projection du court métrage De l'autre côté (30 min). Réalisé en 2004, le film nous plonge dans la banlieue parisienne à travers le personnage de Samir, jeune avocat talentueux, qui se rend au domicile familial pour célébrer la fête de circoncision de son jeune frère. Depuis son départ, rien n'a changé. Ses parents ont une vie paisible. Ils essayent de s'adapter dans la société. Quant à son frère, Malek, coursier, il vit toujours dans les nuages avec un humour sournois qui déplaît à son père. Samir est la fierté de la famille, au point de susciter un sentiment d'infériorité chez son père. Mais Samir montre à son père qu'il n'a pas honte de ses origines et qu'il sait à quel monde il appartient. Le court métrage plein d'humour est perlé de petites répliques pertinentes et de silences éloquents. On dira que le metteur en scène n'a rien tenté côté scénario, se contentant de refléter la réalité avec des personnages bien définis.Le deuxième court métrage, Quelques miettes pour les oiseaux (29 min) aborde également un thème social, mais d'un autre genre. Tourné dans une région abandonnée en Jordanie, un «no man's land» où vivent des réfugiés palestiniens et syriens, le documentaire s'amorce dans une pompe à essence dont le propriétaire remplit des jerricanes d'essence qui iront de l'autre côté de la frontière. Bien qu'il fasse du commerce illégal, c'est sans aucune gêne apparente que le pompiste pose devant la caméra. La deuxième scène est un hôtel de classe médiocre. Le gérant d'origine syrienne ouvre son établissement à de jeunes prostituées palestiniennes. Les images parlent. C'est le désert, et tout est permis dans cette région presque abandonnée et dont les habitants sont livrés à eux-mêmes. La bande sonore du film est une musique traditionnelle palestinienne. Le lendemain du tournage, le réalisateur revient sur place et filme la réaction des autorités : la station d'essence a été saccagée ainsi que trois hôtels. A la fin de la projection, le public est resté bouche bée avant de réagir avec force applaudissements. Avec deux projections seulement, le réalisateur a su montrer sa capacité à saisir et à dévoiler toute l'intensité des thèmes choisis et traités avec une parfaite maîtrise.