Les massacres perpétrés le 8 mai 1945 par l'armée coloniale française ont été «dûment prémédités» et constituent l'aboutissement d'un plan destiné à étouffer dans l'œuf toute velléité d'indépendance des Algériens. C'est ce qu'a affirmé, jeudi dernier à Sétif, le secrétaire général de l'Union des historiens algériens, le Dr Youcef Menasria. Les assertions selon lesquelles la répression avait constitué une réaction à des «troubles fomentés par des indigènes» ne sont fondées sur aucun fait historique, a ajouté l'historien qui intervenait lors d'une conférence sur le 8 Mai 1945, organisée à l'université de Sétif, rapporte l'APS. Etayant ses propos, il a rappelé qu'en mars 1941 le maréchal Pétain avait déjà ordonné une enquête sur les conscrits algériens de la seconde guerre mondiale, soupçonnés d'appartenir au courant nationaliste, avant de décider de tout mettre en œuvre pour «maintenir l'autorité de l'Etat». Le gouverneur général de l'époque, Yves Chataigneau, avait quant à lui sollicité des militaires «du temps pour isoler l'élite algérienne et l'extraire des rangs des Amis du manifeste et de la liberté» (AML), a également souligné le conférencier. Il s'est agi-là, a-t-il ajouté, de désigner la cible, de donner en pâture ce petit peuple, ces Algériens sans défense qui allaient se trouver, des semaines durant, sous le déluge de feu des forces coloniales. L'élite algérienne, le gouverneur français ne désespérait pas de la rallier à la politique d'assimilation et de l'intégrer dans le giron du colonisateur, a-t-il rappelé. La conférence organisée à l'université Ferhat Abbas à l'occasion de la commémoration du 8 Mai 1945, sous l'intitulé «lecture politique et historique des massacres», donnera lieu à plusieurs autres communications dont celles du Dr Khier Guechi, doyen de la faculté de droit. Ce dernier évoquera «le crime du 8 mai 1945 vu sous l'angle du droit international» et du Dr M'hand Berkouk, professeur de sciences politiques à l'université d'Alger, qui estimera que les massacres du 8 mai 1945 ne furent que l'émanation de la logique coloniale. Le Dr Berkouk a saisi l'occasion de cette conférence historique pour suggérer la création, au sein de l'université Ferhat Abbas de Sétif, d'un centre d'études et de recherches historiques sur les massacres du 8 mai 1945. Cette conférence, inaugurée par le ministre des Moudjahidine, M. Mohamed-Cherif Abbas, avait été marquée à son ouverture par la lecture d'un message du président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, qui avait notamment souligné que les discours récents sur le caractère prétendument positif du colonialisme français en Algérie sont «loin de contribuer à rétablir la vérité et rendre justice à l'Algérie» pour le mal qu'elle a subi. R. I.