La salle de conférences du quotidien El Moudjahid a abrité, hier, une table ronde consacrée au code des marchés publics, notamment les derniers amendements apportés au décret présidentiel de 2003. Animé par notre confrère Tareb Mohamed El Anouar, la rencontre s'était distinguée par une polémique entre les communicants et les entrepreneurs du secteur du BTPH. Auparavant, M. Bouchemla, représentant du ministère des finances et membre de la commission nationale des marchés publics, donnera un aperçu sur les amendements apportés au décret présidentiel. Lesquels, a-t-il souligné, ont pour but d'utiliser de manière efficiente et rationnelle les deniers publics et rendre efficace la commande publique qui est énorme. Son homologue du ministère de l'Habitat insistera lui sur les avantages que recèlent le code, notamment en ce qui concerne la réduction des délais des études des soumissions, la division de la commission en travaux et études, ce qui accélère le traitement des dossiers. Le président du conseil national consultatif pour la promotion de la PME s'est quelque peu attardé sur les dysfonctionnements et la marginalisation des entreprises dans l'octroi des marchés, à travers la multitude des embûches et autres obstacles qui leur sont opposés. M. Bensaci a également mis en avant le fait que la commission procède à l'ouverture des offres techniques et commerciales de manière séparée. Le représentant de l'Union générale des entrepreneurs algériens, lui, se plaindra de la multiplication des contraintes dont les conséquences sur les entreprises algériennes sont dramatiques. M. Bendaoud relèvera que le code des marchés publics fait obligation à l'acquéreur du marché de verser une caution de bonne exécution de l'ordre de 5% sur le montant global du marché, le parti pris de l'administration, etc. Mais c'est sans nul doute l'intervention de Djamel Djerad qui a le plus retenu l'attention. Cet expert comptable et commissaire aux comptes n'y est pas allé de main morte pour souligner les innombrables irrégularités existant dans la passation des marchés publics. Collision entre les soumissionnaires, pratiques de fractionnement des appels d'offres, surfacturation ou fausse déclaration, trafic d'influence, influence sur les évaluation et les décisions, avantages des coûts, mauvaise interprétation de la législation, entente entre les soumissionnaires, manipulation dans le système de pondération et dans la transmission des dossiers aux candidats, multiplication des avenants et des offres de services, le recours abusif à la consultation restreinte et à l'infructuosité des appels d'offres pour favoriser le gré à gré. Ce sont là autant irrégularités recensées par ce financier. Et que l'on peut résumer en deux mots : corruption et délit d'initié. Mais si la première est réprimée par la loi (février 2006), le délit d'initié n'est pas sanctionné en raison du vide juridique et de l'inexistence d'une disposition législative y afférente. D'ailleurs, M. Djerad a indiqué que la meilleure manière de pallier à toutes ces pratiques c'est d'adopter l'Accord sur les marchés publics (AMP) de l'Organisation mondiale du commerce. Ce d'autant qu'en prévision de son adhésion à cette organisation l'Algérie a adapté sa législation. Elle pourrait donc s'inspirer de l'AMP pour régler ou du moins atténuer un tant soit peu les pratiques frauduleuses, la corruption et pourquoi pas pénaliser le délit d'initié. Les débats étaient houleux puisque quelques opérateurs dans le bâtiment n'ont eu de cesse de dénoncer les problèmes qu'ils rencontrent sur le terrain. A telle enseigne que le forum s'est quasiment transformé en mur des lamentations. S'il est vrai qu'ils sont confrontés à des difficultés réelles sur le terrain, beaucoup d'entre eux ne font pas valoir leurs droits, la loi étant en leur faveur dans la plupart des cas. Mais aussi, radins, ils se refusent, et ils l'ont fait savoir hier, à recruter des personnes qualifiées en droit, en construction, en architecture pour ficeler leur dossier avant de soumissionner sous peine de se faire écarter. M. Djerad n'hésitera pas à les qualifier de «monsieur avec tous les cachets humides dans les poches». F. A.