La salle Ibn Zeïdoun a accueilli jeudi soir dernier le musicien malien Habib Koité en compagnie de son groupe Bamada qui y a donné un concert organisé par le Centre culturel français d'Alger dans le cadre de la 10ème édition du Festival culturel européen. Le concert est prévu à 19 h, mais la file d'attente a commencé à s'allonger dès 17h. L'entrée est gratuite, ce qui a drainé une grande foule, plus que ne pouvait accueillir la salle. Mais, au lieu de tenter de bien gérer la situation en faisant preuve d'ordre et d'organisation, les responsables de la salle ont opté pour l'anarchie. L'heure approche et on décide de faire entrer les gens. On a sonné l'hallali. C'est la ruée, la foire d'empoigne. C'est à qui saura jouer des muscles. Bousculades, insultes, injures. Ça a plus l'air d'un bazar que d'une salle de spectacle. Une fois dans la salle, le public s'empresse de prendre les places. Les 500 sièges sont très vite occupés. Mais les gens continuent à affluer jusqu'à dépasser les 700 personnes dans la salle, et il en reste tout autant à l'entrée. L'ambassadeur du Mali à Alger fait son entrée en compagnie d'un nombre important d'étudiants maliens installés en Algérie. Les lumières s'éteignent. Habib Koité apparaît sur scène guitare en main. Il porte une tenue traditionnelle couleur terre. Les autres membres du groupe le rejoignent. Koité amorce une intro avec un bel arpège. Kéléguité Diabaté lui donne la réplique avec son balafon tandis que Kone Mahabou accompagne le rythme avec son tama. Quelques notes suffiront pour enflammer la salle qui demande à haute voix des morceaux rythmés. Sans trop se faire prier, Koité change de ton et accélère la cadence après avoir déclaré sa grande joie d'animer ce premier concert en Algérie. «Je suis très fier et heureux d'être venu dans un pays voisin», dira-t-il. Les jeunes investissent le bas de la scène transformé en piste de danse. Ils crient et s'égosillent jusqu'à couvrir la musique. Le chanteur tente de tempérer les ardeurs avec une chanson douce, mais en vain. Désespéré, il poursuit, mais en hâtant la manœuvre. Il interprète quelques titres de son dernier album Afriki, mais en rythme accéléré, à tel point qu'il nous est difficile de reconnaître les chansons dont les belles mélodies harmonieuses ont cédé la place à un son folklorique fait de tama et de balafon. Un petit solo de guitare est glissé de temps à autre pour donner le change mais très vite la section percussions reprend le dessus. Parmi les morceaux joués, on distinguera difficilement Massakiba, N'ba, N'tiri, N'tesse et Yka bara. Avant d'interpréter le morceau Afriki, Koité s'adressera au public pour lui parler de sa terre natale et de ce qui a motivé la composition de ce titre. «Je suis né à Dakar, mais j'ai passé ma vie à sillonner l'Afrique et, dans ce morceau, je parle de tout ce qui concerne ce continent, absolument tout», dira-t-il. Mais le titre qui a sans doute marqué le public sera celui que le chanteur a réservé à la fin, Namaina. Sur ce morceau, le chanteur a joint sa voix à celle du public pour chanter en chœur Ya lala Fatima. Vers la fin du concert, une jeune Malienne monte sur scène munie d'une sorte de derbouka. Elle électrise l'ambiance. Les jeunes la suivent sur scène et exécutent des pas de danse en compagnie de Koité. Loin de ce qu'on attendait, le concert a viré à la grande fiesta où tout le monde pouvait se mêler au spectacle. De plus, Habib Koité a privé son public de ses plus beaux morceaux, qui ont fait son succès. Parlant de sa musique, Koité nous dira : «Je fais cela depuis tout petit et je le fais spontanément.» Mais au-delà de l'ambiance festive, des connaisseurs diront leur frustration car ils désiraient voir un autre Habib Koité, plus «authentique», loin des tamtams et du spectacle folklorique. W. S.