S'agissant du statut de l'entraîneur en Algérie, il y a au moins une évidence… Il n'en a pas. Nous n'inventons rien et il suffirait de consulter le site de la Ligue nationale de football pour constater que, si celui du joueur est disponible, il n'en est pas de même pour son coach. Néanmoins, une autre certitude… celle qu'il serait difficile pour un joueur de jouer s'il n'en pas les capacités. Forcément, dira monsieur Tout-le-monde. Et, encore faudra-t-il qu'il en apporte les arguments sur le terrain où avant d'aboutir il aura passé des tests, pour celui inconnu, et/ou au moins physiques pour celui qui l'est peu ou prou. Pour l'entraîneur, c'est moins compliqué même si cela devrait être tout à fait le contraire parce que tout d'abord sur le terrain, en fait un échiquier, il est le seul vrai maître d'œuvre et simultanément le chef d'orchestre. Alors, la question que nous poserons est la suivante : un grand joueur peut-il faire un grand entraîneur ? Inversement, un illustre inconnu peut-il faire un entraîneur exceptionnel ? Il serait alors très facile de répondre comme un grand limier de la littérature anglaise : «Elémentaire, mon cher Watson», qui résout plus d'énigmes policières que les… policiers qui étaient payés, certes, mais non formés pour cela. On parlera alors de travail d'art, de doigté, de don et, par la suite, de feeling. Nos compatriotes ne se souviennent certainement pas d'un Aït Djoudi, Biskri, Zekri, Hammouche qui sont évidemment bien loin d'avoir laissé l'image éternelle d'un Madjer, Bensaoula, Attoui, Beloucif, Berferhat et dont les carrières d'entraîneur ont connu des fortunes diverses. Sur le plan mondial, les cas de Mourinho et de Guardiola (les cas de Dick Advocaat, Van Gaal, Hiddink, Luxemburgo, etc… ) sont à l'heure actuelle certainement les plus illustratifs même s'ils ont des pendants un peu partout dans le reste des autres championnats planétaires (Argentine, France, Espagne). Guardiola a traîné sa silhouette de joueur légendaire sur un nombre impressionnant de terrains et Mourihno est devenu une star ex nihilo à partir du moment où il a remporté avec le FC Porto le trophée de la Ligue des champions. L'un a réussi une excellente transition (joueur-entraîneur) et, excusez du peu, dans la continuité, parce qu'il a été un footballeur exceptionnel. L'autre a réussi une excellente mutation parce qu'il a été un extraordinaire élève de coaches dont il était l'interprète et, parfois, le scribe pour devenir un faiseur de miracles à telle enseigne qu'Hollywood a réfléchi à l'idée de faire réaliser un film sur ce phénomène. Même le nom de celui qui devait camper le rôle de l'incandescent coach était déjà avancé et retenu : George Clooney (bien vu !). Ils sont nombreux, en Algérie, ces entraîneurs venus de nulle part en tant que joueurs, nous serions tenté de dire la majorité, d'ailleurs, qui réussissent ou, du moins, donnent l'impression de réussir en ce sens que tout cela n'est que relatif compte tenu de la faiblesse du championnat sinon de la mauvaise répartition des valeurs, humaines (joueurs) s'entend, et, par voie de conséquence, d'un rapport de forces totalement disproportionnées qui fait qu'un entraîneur qui gagne régulièrement des titres et pour cause l'armada, les moyens et infrastructures dont il dispose, ne peut que voir sa cote grimper sur les marchés financiers du football et, partant, sa notoriété en dehors des frontières mais aussi sa popularité décuplée auprès des publics dont il préfère essentiellement s'assurer l'alliance. Comme un autre qui, paradoxalement, peut bénéficier d'une aura égale pour peu qu'il parvienne à installer une certaine forme de stabilité, une continuité dans le travail bâtie sur la formation (le cas de Amrani à l'ASO) sans pour autant qu'il ne lui soit tenu rigueur en l'absence de vrai challenge autrement que jouer le maintien. Ce qui, somme toute, est pourtant l'essentiel d'autant plus qu'une équipe comme celle évoquée (l'ASO) est l'un des rares viviers nationaux en matière d'émergence de nouveaux noms en football et surtout de talents avérés. Ces entraîneurs sont de vrais thaumaturges en ce sens qu'ils guérissent à leur manière la discipline. Ils ne sont pas exubérants, pas trop expansifs, souvent qualifiés arbitrairement de taciturnes mais finalement exigeants avec eux-mêmes et dans la limite de la convivialité, voire de la cordialité avec les joueurs dont ils ont la responsabilité. En conclusion, l'environnement national, à notre sens, est tel qu'il serait plus difficile pour un ancien grand joueur de faire du bon travail parce qu'il serait chargé d'apporter la preuve de son génie qu'un autre qui aurait été totalement inconnu mais qui a contrario a tout à prouver. C'est une règle immuable dès qu'il s'agit d'expression humaine de dimension artistique, la traduction d'un don. Rabah Saadane a été un attaquant tout juste moyen en son temps (même s'il a fait partie de l'équipe nationale universitaire), nous restons persuadés que nul des moins de trente ans ne se souvient de lui en tant que… joueur de l'USM Blida. Cela n'empêche pas qu'il a fait une campagne mondiale (Mexico 86) et qu'il est encore une fois à la tête de l'EN… pourquoi pas pour une autre qualification en poule finale. A. L.