De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Changement de registre, nuance dans le style, mais ça reste toujours l'exploration de cette musique «open» à DimaJazz ! La troisième soirée de ce festival international a apporté son feeling de jazz club avec ces œuvres et improvisations vertigineuses au piano signées Mario. L'instrument par excellence des clubs a donc fait son apparition au cours de ce spectacle, soutenant subtilement et harmonieusement le trompettiste en méditation, mais virtuose Nicolas et le saxophoniste camerounais, compositeur et arrangeur Jean-Jacques Elangué, créateur du quintette Los Africanos. Le jeune bassiste «blanc» de talent, Adrian Ferro aux doigtés agiles, ne lâchait pas d'un quart de soupir ce diable «walking bass» qui lui est propre, réalisant des prouesses et surtout ne lâchant pas l'oreille du public. Quant aux percussions de Denis, elles émettaient des motifs rythmiques aux teintes africaines… Les mélomanes aguerris à ce genre de musique ont pu déguster un récital de haute facture. La plupart sont restés scotchés à leur siège jusqu'à l'extinction de la dernière note. A chaque prouesse soliste, le public ne manquera pas de s'exprimer en s'adonnant à des applaudissements chaleureux. En fait, il y avait du jazz. Celui qui sort des tripes, c'est l'équivalent de «Missounga» en langue camerounaise ! Appellation du dernier album de cette formation. «La musique que l'on joue sort de nos tripes. On exprime ce que l'on ressent. C'est du jazz, le nôtre», a soutenu le saxophoniste du groupe juste après le concert. Une façon de dire qu'il compose sa musique. Celle qui étale son identité africaine. C'était plus qu'un hommage rendu au pays. Jean-jacques nous dira qu'il «explorait quelques motifs rythmiques camerounais et ghanéens pour y faire asseoir une mélodie jazz, reflétant son âme». Cassant le décor de la scène par un habit blanc et coiffé d'un bonnet aux couleurs du pays, le compositeur faisait voyager l'assistance sans qu'elle quitte le TRC ! Un large contraste se dégageait entre son jeu et celui du trompettiste qui va crescendo avec son instrument sans heurter ses soupapes. Toute l'assistance quittait le spectacle vers minuit avec dans la tête un prochain renvoi. Que réserve-t-il à Dimajazz pour son menu du jour ? A vrai dire, à force de déguster de la bonne musique, celle qui fait «jazzer», et pour laquelle cet événement a lieu, le public pourrait en demander davantage. Il n'admettrait pas assurément d'assister à un concert moins attrayant que celui offert par ce «quintette magistral», venu pour la première fois participer à ce regroupement international. «J'ai été sidéré par la profondeur du Rhummel. Une fois sur scène, j'ai constaté chez le public un intérêt musical aussi profond que le ravin du Rhummel», estime Jean-Jacques, l'Africain du jazz qui a entamé sa carrière dans un club, dont cette particularité musicale de fond, avec ces «touches» pianistiques… piano bar que l'on perçoit sans effort. Dimajazz dans la 7ème édition de ce regroupement universel a prévu deux spectacles par soirée. Les Constantinois se sont défoulés avec la première formation, de Mustapha MB (Algérie-France). Natif de cette ville, le chef d'orchestre étrennait son entrée sur scène avec des «istikhbar» légers à la mandoline avant de chanter Constantine sur un air de «fête» avec une basse assez groove, et une guitare à effet de distorsion souvent sollicitée pour faire naître une fusion … grâce au guitariste Florent qui émet des gammes rapides par demi-ton et des notes plus tenues. MB a brassé tous les airs du pays, chaabi, sétifien, kabyle, gnanoui, malouf, pour mettre le TRC en danse avec une rythmique «subtile» propre au groupe. C'était un show de «fiesta» à l'algérienne. Le tout concocté dans l'appellation de «jazz free». La troupe franco-algérienne sortira un album en septembre prochain. Il y inclura des choristes, avec en prime un «groove maghrébin», nous confie «Mus».