Hamid Grine. Un nom de plus en plus familier sur la scène culturelle algérienne. On connaissait de lui le journaliste sportif qui s'est longtemps investi dans les colonnes de grands quotidiens nationaux et à la radio également. On a ensuite découvert l'essayiste qui s'est intéressé aux questions politiques et sociales de l'Algérie. Puis, s'est révélé un peu plus tard le romancier prolifique parfois décrié et d'autres adulé. On s'est laissé intriguer par la posture particulière de l'écrivain journaliste occupant le poste de directeur au sein de l'une des plus puissantes boîtes de communication du pays. On attendait de découvrir l'homme... Il s'est dévoilé presque sans retenue, jeudi dernier, dans une rencontre-débat à la librairie Média Book organisée sous l'initiative de la librairie Mille Feuilles. Souriant et très détendu, il s'est extrait de son œuvre et de sa carrière professionnelle pour parler, avec simplicité et, semble–t-il, beaucoup de sincérité aussi, de ce qu'il est. Le mot d'ordre est tout de suite donné par Hamid Grine lui-même : «Aller au fond des choses et de soi-même.» Il s'est donc d'emblée prêté au jeu des questions-réponses de l'animateur de la rencontre, Sid-Ali Sekhri en présence d'un public restreint mais bien déterminé à en savoir le plus possible. Son parcours, ses angoisses, ses moments forts et ses peines. D'anecdotes en confidences, l'écrivain s'est éclipsé pour laisser la place à la sensibilité de l'homme ordinaire qu'il est. D'abord, les images de l'enfance. Une enfance heureuse mais marquée par «une impression d'amputation» lorsque le père rejoint le maquis pour la guerre de libération, laissant Hamid à l'âge de quatre ans à son incompréhension et dans l'incapacité de verser la moindre larme. Vient ensuite l'âge adulte. Des images de bonheur dans la réussite professionnelle et dans la vie de famille. Puis, des scènes de douleur, à la perte de son frère accidentellement tué par un autre de ses frères. La mort, des années après, de la mère. «Une poétesse et une amie» qui lui a laissé à son départ l'intime conviction qu'«on ne guérissait jamais de la mort d'une mère». Et pour finir, les angoisses grandissantes du père inquiet de l'épanouissement de ses deux enfants dans cette Algérie pleine d'incertitudes et de remous. Mais l'homme est fort de sa lucidité. Puisée dans ses lectures, cette lucidité consciencieuse lui permet d'aborder la vie avec calme et sagesse. «Vivre l'instant présent, accepter ce qui s'offre à nous et être conscient qu'ici bas rien ne dure.» Tels sont les trois principes de vie puisés dans ses lectures de Balthasar Gracian et de Sénèque, entre autres penseurs. La lecture, une source de vie, à l'entendre parler. «Je peux me passer de l'écriture mais pas de la lecture», tranche-t-il sans hésitation. Mais il ne manque pas de définir allègrement son rapport à l'écriture. Un acte de nécessité et de plaisir… Hamid Grine, un homme qui s'est dévoilé sans pudeur à ses lecteurs présents à la rencontre de jeudi dernier mais sans rompre le mystère… Ce n'était là qu'une invitation à le suivre encore dans ses élans créatifs... F. B. Des rencontres littéraires tous les jeudis à la librairie Mille Feuilles La librairie Mille Feuilles lance un nouveau rendez-vous hebdomadaire qui se tiendra tous les jeudis après-midi durant tout l'été. Il s'agit de rencontres avec les écrivains qui marquent la scène littéraire algérienne pour des débats ouverts et spontanés. «Le principe est quelque peu différent des rencontres littéraires classiques», dira Sid Ali Sakheri, l'initiateur de ces rendez-vous qui se veulent tout d'abord des occasions de rapprocher les écrivains de leurs lecteurs en sortant des carcans littéraires et des conférences sélectes et trop solennelles… A suivre ! F. B.