La fabrication des instruments de musique nécessite une formation académique en plus de sa transmission traditionnelle de père en fils, pour garantir le développement et la pérennisation de ce métier, ont estimé des luthiers, dimanche dernier à Alger. Les techniques de la lutherie devraient être enseignées aux nouvelles générations dans un cadre académique et scientifique afin de consolider les connaissances des luthiers et renforcer leur savoir-faire, ont-ils indiqué à l'APS, en marge du colloque international sur la lutherie qui se tient à l'Institut supérieur de musique. L'artisan luthier Rachid Chaffa a déploré l'absence d'écoles ou d'instituts de formation spécialisés dans la fabrication des instruments de musique, mis à part quelques ateliers ici et là, qui transmettent l'art de la lutherie à de jeunes apprentis. Soulignant que «le matériel nécessaire pour la conception d'instruments de musique (vernis, colle et bois) est importé de l'étranger et que ce métier évolue plus dans un cadre familial et traditionnel», M. Chaffa a plaidé pour la création d'écoles spécialisées. Le maître luthier marocain Khalid Belhaiba renchérira en relevant un manque d'écoles ou d'instituts de formation en lutherie dans son pays, affirmant que «la plupart du temps ce métier se transmet de père en fils». Déclarant que ces instruments sont «très demandés» dans les pays arabes et même en Europe, le luthier assurera que le marché des instruments de musique traditionnelle à cordes, dont le luth, le rebab et la cithare, «se porte bien et [est] en permanente évolution», mais il déplorera cependant le «peu» d'échanges dans ce domaine entre les pays du Maghreb, appelant ainsi à «diversifier les rencontres entre luthiers arabes et maghrébins afin de se connaître davantage et entreprendre des projets autour du patrimoine commun que partage la région». Pour sa part, le luthier Mesbah Ali El Ouahem de Skikda, précisant que les ateliers existants «travaillent encore d'une manière traditionnelle», dira que la formation en lutherie devrait être dispensée avec des moyens modernes. Le chercheur iranien en lutherie Madjid Nazempour a, lui, souligné la différence dans les techniques de fabrication des instruments de musique entre les pays arabes, qui se traduit par le son émis par l'instrument, comme dans le cas du luth. Le luthier tunisien Mohamed Elhadi El Asfar, qui a hérité ce métier de son père, a pris la décision d'ouvrir un atelier pour former les jeunes afin d'assurer la perpétuation de ce métier, a-t-il tenu à préciser pour expliquer comment se fait le transfert du savoir dans ce domaine en Tunisie. M. El Asfar, qui enseigne aussi la lutherie à l'Institut supérieur de musique à Tunis, a indiqué que la fabrication des instruments de musique suscite actuellement de l'enthousiasme y compris chez les filles.