Cela fait trois jours que le Festival panafricain souffle un air frais sur Alger. Mais hélas le programme cinéma n'attire guère le public qui le boude jusqu'à présent. Un tour au niveau des salles de projection de l'OREF retenues pour ce pôle suffit pour dresser un état des lieux des plus attristants. Les salles sont vides malgré la qualité des œuvres cinématographiques projetées. Mercredi dernier, ils n'étaient qu'une dizaine à découvrir le long métrage Bab'Aziz du réalisateur tunisien Nacer Khemir à la salle Ibn Zeïdoun. Une œuvre qui vous plonge directement dans le monde des mille et une nuits à travers le personnage de Baba Aziz. Accompagné de sa petite-fille Ishtar, ce vieux derviche soufi et aveugle part à la réunion des adeptes du soufisme qui a lieu tous les trente ans en plein cœur du désert. Pour faire patienter la petite, il lui raconte avec une infinie patience l'histoire d'un prince qui contemplait son âme au fond d'une source d'eau avant de troquer sa vie royale contre une vie de derviche. Le décor est envoûtant, des dunes à perte de vues créant une ambiance très mystique qui empreint le film jusqu'à la fin. Durant leur long et pénible trajet, Baba Aziz et Ishtar font la rencontre de Zaïd, un beau jeune homme qui est à la recherche de Nour, sa bien-aimée. Celle-ci, fille d'un soufi, l'a quitté après une nuit d'amour pour partir, elle aussi, à la recherche de son père. Mais Zaid, épris, refuse de la perdre et décide d'aller à la réunion des derviches avec l'espoir de retrouver Nour. Les trois voyageurs feront également la rencontre d'Ousmane, le jeune rouquin qui s'est jeté dans un puits, prétextant rejoindre son palais. Accusé de folie, ce jeune marchand de sable a quitté son pays et depuis il avance dans le désert sans but précis. Arrivés au lieu enchanté, Baba Aziz abandonne Ishtar en lui confiant une mission, celle d'aider Zaïd à retrouver Nour. La mission est accomplie et c'est là que Baba Aziz, assis dans sa propre tombe, va à la rencontre de la mort après des heures de prière.Ce long métrage (1h36mn) a su captiver l'attention des quelques personnes présentes. Les dialogues en persan et en arabe dialectal ainsi que les chants religieux, comme les images, vous font voyager dans cette ambiance spirituelle. La splendeur et la profondeur du film ont été cependant quelque peu entamées par la qualité de la copie. Le scénario peaufiné par des mains de maître a été très bien mis en valeur par le travail du réalisateur qui a réussi à transmettre les états d'âme des personnages. Il nous fera partager avec eux ce long voyage au cœur du désert, qui n'est en fait qu'un voyage dans la vie. Et comme le dira Baba Aziz : «A chacun son chemin. Il y en qui traversent les montagnes, les mers, les cieuxmais pour nous, c'est le désert.» Des cheminements, des vies et des histoires qui se croisent pour ouvrir la même voie de réflexion. W. S.