Incroyable soirée Panaf à l'esplanade de Riadh El Feth. Samedi soir, les tambours du Burundi ont fait vibrer un public aussi fasciné qu'admiratif face à la performance musicale et physique des tambourinaires Akayazwe du Burundi battant à un rythme d'enfer. Des centaines de personnes sont venues voir ces tambours qui resteront certainement l'un des temps forts du Panaf 2009. A la réputation mondiale, au-delà des frontières de leur petit pays, l'un des plus petits du continent noir, les tambours du Burundi battent comme un cœur. Au repos ou affolé, ce cœur-là vous prend aux tripes. Symbolisant dans toute l'Afrique la bonne orchestration du tambour, leur art est d'abord sacré comme il est aussi profane. C'est, en réalité, un lien mystique entre un pays, un peuple et un instrument. «Ingoma», c'est à la fois le tambour et le royaume. Tambour royal, tambour sacré, sa musique parle en tout cas si bien au cœur et à l'esprit que le public algérois n'a guère hésité à succomber à cette essence divine ! Formant un groupe de vingt personnes, deux jeunes garçons les suivent avec des outils agricoles et un tambour miniature, les tambourinaires burundais entrent en scène, le tambour sur la tête. Un battement de tambour saccadé annonce l'arrivée du groupe, qui surgit, emmené par le chef des batteurs. A aucun moment les 40 kg de chaque tambour porté n'ont ébranlé l'équilibre de l'un de ces tambourinaires valeureux dont les silhouettes majestueuses ont captivé tous les regards d'un public ahuri par ce spectacle hors du commun. Disposés en arc de cercle autour du tambour central, les autres tambourinaires attendent son signal. Dès lors, chacun commençait à battre son rythme dans une harmonie surprenante. Le tambourinaire soliste, celui qui bat le «inkiranya» ou tambour central, exécute par la suite une danse où se mêlent fantaisie et gravité. Danse guerrière, sa gestuelle significative fait plier le corps à ces sensations et ces émotions les plus enfouies. Par moments, le soliste mime le geste de se trancher la gorge. Ceci traduit son attachement à son pays : «Que je meure si je trahis !» Ce dernier opère juste après un magnifique enchaînement, maniant à merveille aussi bien l'humour que la satire, se transforme alors en un gentil clown marchant sur les mains, empruntant une démarche caricaturale, en faisant des clins d'œil au public époustouflé par cette chorégraphie. Etrennant des paroles en kirundi, langue nationale du Burundi, les tambourinaires nous font découvrir de près les rites et cérémonies du passé, époque où le tambour, objet sacré, ne pouvait être battu qu'en des circonstances bien précises et par des batteurs issus de familles d'initiés. Tour à tour, chacun des tambourinaires quittera sa place un moment pour exécuter un numéro en solo, suivant son inspiration, dialoguant avec le groupe, dansant, sautant, gesticulant, mimant, tambourinant, tandis que se poursuit le battement étourdissant de tous les instruments. Hommages à la vache, animal sacré, au pays, au travail des gens, souhait de bienvenue, se succèdent également pendant près de trois quarts d'heure, entrecoupés d'explosions de joie, de fierté, d'ironie. Un bref silence, puis les battements reprennent et un à un, de droite à gauche de l'arc de cercle, les tambourinaires posent leur instrument sur la tête sans cesser d'en jouer, la troupe se met en marche et disparaît. Le souffle coupé, le public applaudira de toutes ses forces et rendra un vibrant hommage à cette troupe sublime. Le concert se poursuivra après avec les chouyoukh du rai, Bouteldja et Boutaiba, qui griseront le public avec les plus légendaires chansons du rai algérien. Reste à déplorer, enfin, le retard «indélicat» de Djamel Laroussi, lequel ne s'est présenté sur la scène que sur les coups de minuit et demi ! A cause de cela, un sérieux décalage a perturbé le déroulement du concert, lequel n'a pu commencer que vers un peu plus de 23h alors qu'il était programmé à 22 h. Le public et, surtout, les autres artistes ont dû prendre leur mal en patience avant de monter sur scène et répondre aux sollicitations d'un public désenchanté. Malheureusement, Djamel Laroussi, qui a fait son apparition vers 1 h du matin pour assurer la troisième partie du concert, n'a même pas eu la «courtoisie» de s'excuser auprès du public. Pourtant celui-ci n'a jamais failli lors de tous les rendez-vous de ce Panaf. Il mérite incontestablement plus de respect ! A. S.